En France, chaque année, l’AVC touche à des degrés divers environ 140 000 personnes. Oui, la mortalité dont il est responsable a baissé de 40 % ces trente dernières années. Mais la mauvaise santé de l’hôpital, avec sa pénurie de personnel, la mise à mal des services d’urgence et le manque de lits en unité spécialisée, bouscule une bonne prise en charge du patient. Savoir identifier les signes précurseurs et les symptômes, faire face à l’urgence, mais aussi adopter les bons réflexes pour prévenir cet « accident » pas comme les autres devient aujourd’hui essentiel. Pour saisir sa chance de rester en vie et d’éviter le handicap.
Selon l’Académie nationale de Médecine, 5000 décès ou dépendances évitables, liés à un AVC, seraient dus à des problèmes majeurs et des dysfonctionnements de l’hôpital d’aujourd’hui. En première ligne, la mise à mal des services d’urgence. Un comble, quand on sait qu’en cas d’AVC, chaque minute compte pour limiter les lésions au cerveau. Le Samu-Urgences de France indique ainsi que pendant l’été 2023, 163 services d’urgence ont été fermés, certains uniquement la nuit, dans une soixantaine de départements français. Les patients ont dû être orientés vers des hôpitaux plus lointains. Malgré les risques de décès ou de survie avec dépendance.
Le manque de lits dans les unités neuro-vasculaires (UNV) est aussi pointé par l’Académie. Alors que ces unités de pointe et spécialisées avec leurs équipes multidisciplinaires sont organisées pour pouvoir intervenir 24 heures sur 24 et ont tout le matériel pour éviter complications et récidives. Quant à celles qui ont des lits, elles doivent souvent en fermer par manque de neurologues ou d’infirmiers spécialisés. Résultat : seule la moitié des patients est hospitalisée en UNV. Un comble. Qui plus est dans les zones de désertification médicale, où l’UNV n’existe tout simplement pas, et où même l’hôpital a fermé. Et de quoi remettre en question les progrès de ces trente dernières années en matière de prévention, de prise en charge et de traitement de l’AVC en France. Pour tous.
Mais enfin, qu’est-ce vraiment que l’accident vasculaire cérébral dit AVC ? Il survient en fait quand il y a interruption de la circulation sanguine dans une zone du cerveau. Et il faut alors trouver le bon chemin rapidement pour y faire face. Car cet accident grave s’avère être aujourd’hui la première cause de handicap physique acquis à l’âge adulte, la deuxième cause de démence après la maladie d’Alzheimer et la troisième cause de mortalité après les cancers et les accidents cardiaques. De quoi faire réfléchir le quidam.
LA TÉLÉMÉDECINE ? UN VÉRITABLE ATOUT
Quand l’hôpital ne dispose pas d’une UNV, son service d’urgence est souvent connecté grâce à la télémédecine à une UNV dont le neurologue de garde peut examiner et interpréter l’IRM ou le scanner et décider des gestes techniques à réaliser.
La télémédecine permettra aussi aux soignants, qui plus est dans des zones géographiques déshéritées médicalement, d’assurer le suivi post-AVC des patients. Pour prévenir les récidives.
L’AVC ischémique
85% des AVC sont dits « ischémiques ». Ils sont liés à un caillot, qui empêche le passage du sang dans une artère cérébrale. Le cerveau n’est alors plus oxygéné et l’accident vasculaire cérébral (AVC) se produit.
Le traitement consiste à désobstruer l’artère cérébrale en pratiquant une thrombolyse. Ce qui consiste à administrer au patient, par injection dans une veine, un traitement qui va fluidifier le sang et dissoudre le caillot. Si la thrombolyse est contre-indiquée, qu’elle échoue ou encore que l’artère bouchée est grosse, un neuroradiologue interventionnel pratiquera une thrombectomie : il introduira pour cela un cathéter par l’artère fémorale et remontera jusqu’au vaisseau obstrué pour y extraire le caillot.
S’ils sont mis en œuvre dans les heures qui suivent les premiers symptômes, ces deux traitements permettent de réduire le risque de handicap de 50%. Mais malheureusement, seuls 15 à 20% des patients atteints d’un AVC ischémique en bénéficient. Le médecin leur prescrira ensuite un traitement antiagrégant pour éviter les récidives de caillot. Les autres patients sont exclus soit parce que le caillot est situé dans une artère trop petite, soit parce que leur risque hémorragique est trop important ou parce qu’ils ont dépassé les délais.
L’AVC hémorragique
Les autres AVC sont dits hémorragiques. Un vaisseau se rompt dans le cerveau et provoque l’hémorragie. Les cellules sanguines compressent les zones voisines du cerveau. Ce type d’AVC est provoqué par une maladie chronique des petits vaisseaux qui les rend poreux et favorise les fuites. Pour traiter l’accident, il s’agit d’abaisser la pression artérielle le plus rapidement possible afin de limiter la croissance de l’hématome.
Dans moins de 5 % des cas, on parle d’hémorragie méningée parce que le saignement est localisé dans les méninges, ces enveloppes qui entourent le cerveau et la moelle épinière. Cette dernière est le plus souvent due à la rupture d’un anévrisme qu’il faut boucher.
UNE AFFECTION LONGUE DURÉ (ALD)
Lorsqu’un AVC laisse des séquelles au patient, il est considéré comme une affection longue durée (ALD). Les soins et les examens sont donc alors pris en charge à 100% par l’Assurance Maladie, dans la limite de ses tarifs de remboursement.
A condition que le médecin traitant ou hospitalier en fasse la demande. Certains des frais, comme le forfait hospitalier, par exemple, peuvent rester à la charge du patient et/ou de sa mutuelle.
POUR GAGNER LA COURSE CONTRE LA MONTRE
Connaître les signes précurseurs et les symptômes et savoir donner l’alerte est déterminant.
LE signe précurseur : l’AIT ou l’Accident ischémique transitoire
Chaque année, 400 000 personnes font un AIT, autrement dit un mini-AVC. Après cet AIT, 10% d’entre elles feront un vrai AVC dans le mois qui suit, dont la moitié dans les 48 heures. 25% des AVC ischémiques sont précédés de cet accident transitoire. Les symptômes de l’AIT sont les mêmes que ceux de l’AVC (voir encadré ci-contre), mais ils ne durent que quelques minutes avant de disparaître ; ils peuvent donc tout à fait passer inaperçus et au patient et à ses proches. Mais s’ils sont identifiés, il faut absolument que le patient soit traité en urgence, si possible dans une unité neuro-vasculaire (UNV), pour qu’il bénéficie d’un traitement pour fluidifier son sang, car son risque de faire un AVC sera alors réduit de 80%.
Les symptômes des AVC ischémique et hémorragique et de l’AIT
L’AVC ischémique, l’AVC hémorragique et l’AIT se manifestent par les mêmes symptômes. L’imagerie médicale -scanner ou IRM- permet de confirmer le diagnostic.
Les signes sont soudains :
Une perte de vision de l’un ou des deux yeux.
Une déformation de la bouche.
Une perte de sensibilité d’une partie du corps.
Une faiblesse musculaire d’un membre.
Une paralysie d’un côté du corps.
Un trouble de la parole : la personne ne trouve plus ses mots, elle ne parvient pas à répéter une phrase.
L’hémorragie méningée (dans le cas d’un AVC hémorragique) provoque des nausées et des vomissements, des maux de têtes très violents et peut faire perdre conscience
VIVEMENT DEMAIN : LA MÉDECINE POURSUIT SES PROGRÈS
Un diagnostic dès l’ambulance
Une simple prise de sang réalisée dans l’ambulance permettra de déterminer si l’AVC est ischémique ou hémorragique et d’orienter le patient vers le service médical le plus adapté. Développé dans le cadre du programme Booster piloté par le Pr Mikael Mazighi, le kit d’analyse est attendu pour janvier 2026.
Un anticorps pour diminuer le risque hémorragique
Utilisées dans le cadre d’un AVC ischémique, thrombolyse et thrombectomie engendrent souvent des saignements. Pour pallier cette complication, cause de handicap souvent sévère, une jeune société française, Acticor Biotech, développe un traitement nouveau qui repose que les propriétés du glenzocimab, un anticorps spécifique. Cette molécule, en se fixant aux plaquettes, stoppe la formation d’un caillot sanguin, sans augmenter le risque hémorragique. Si la seconde phase des essais cliniques confirme son efficacité, il rejoindra l’arsenal thérapeutique d’ici cinq ans.
Si un proche (ou vous-même) présente ces symptômes, que faire ?
CONTACTEZ le 15.
Et réitérez l’appel si besoin. Enoncez le plus clairement possible les symptômes. Et dîtes que vous pensez à un AVC.
Selon ces symptômes, le médecin du Samu déterminera l’hôpital le plus proche en mesure d’offrir la prise en charge adaptée et le moyen de transport adéquat. S’il soupçonne un AVC ischémique, il orientera vers un hôpital disposant d’une UNV ou d’un service d’urgences opérationnel 24 heures sur 24. S’il suspecte une rupture d’anévrisme, il enverra une ambulance du Samu pour rejoindre le service de neuroradiologie interventionnelle ou de neurochirurgie le plus proche. Au besoin, avec un hélicoptère.
N’ATTENDEZ SURTOUT PAS.
Ce serait une perte de temps et donc de chance.
N’ALLEZ PAS VOIR VOTRE GENERALISTE pour avoir un avis.
Ce serait aussi une perte de temps et donc de chance.
N’ALLEZ PAS AUX URGENCES PAR VOS PROPRES MOYENS.
CAP SUR LA PRÉVENTION
Agir pour sa santé est ouvert à tous et à tous les âges. La plupart des AVC sont liés à des facteurs de risque que nous pouvons apprendre à dompter, à réduire et à stopper. Pour prendre soin de soi.
ARRÊTER LE TABAC
Le tabagisme multiplie par trois le risque d’AVC. Mais ce risque redevient équivalent à celui d’un non-fumeur cinq ans après l’arrêt.
PERDRE DU VENTRE
L’obésité abdominale contribue à hauteur de 36% à l’AVC. Elle concerne plus de la moitié des femmes après la ménopause, avec un tour de taille supérieur ou égal à 90 centimètres (100 centimètres chez les hommes).
MANGER SEINEMENT
Privilégier le fait-maison, le frais, le vert, les fruits, la cuisson à la vapeur à la friture, le poisson, éviter les aliments et les plats industriels, souvent trop gras, trop salés et/ ou trop sucrés, mais aussi l’excès d’alcool (pas plus de deux verres par jour et pas tous les jours).
BOUGER DES QUE CELA EST POSSIBLE
Ne pas rester statique assis, debout ou couché plus de deux heures, prendre les escaliers plutôt que l’ascenseur, pratiquer une activité physique 30 minutes par jour (marche, vélo, jardinage…) plusieurs fois par semaine.
SURVEILLER SA TENSION ARTÉRIELLE
L’hypertension artérielle multiplie par deux le risque d’AVC et par cinq avant 55 ans. La faire contrôler au moins une fois par an par un soignant. 17 millions d’adultes sont hypertendus et un sur trois l’ignore (Santé publique France, 2023).
STABILISER SON TAUX DE CHOLESTÉROL
Un bilan lipidique complet (triglycéride, cholestérol total, HLD et LDL) est à renouveler chaque année à partir de 50 ans quand on est en bonne santé. En effet, le mauvais cholestérol se dépose dans les artères du cou et du cerveau et y réduit progressivement la quantité de sang qui y circule. Ce qui peut former un caillot. Une glycémie à jeun peut aussi se montrer utile car l’excès de sucre dans le sang fragilise la paroi des artères cérébrales.
CONSULTER EN CAS DE PALPITATIONS
Des palpitations ou un essoufflement anormal lors d’un effort peuvent être le signe d’une maladie du cœur. Un trouble du rythme cardiaque comme la fibrillation atriale multiplie, par exemple, par quatre le risque d’AVC.
Elevé en banlieue parisienne dans une famille fragile d’origine polonaise, Wojtek, 43 ans, s’est souvent frayé un chemin seul. Dans le monde du travail à découvert, mais aussi au black. Avant de se frotter aux grandes scènes du rap et à d’impressionnants adversaires avec des textes forts et percutants et remporter quatre titres de numéro 1 de rap contender. Celui que l’on appelle dans le milieu le marteau piqueur, toujours en introspection, n’a pas dit son dernier mot. Il peaufine son premier spectacle. Cette fois-ci, face au public.
Comment qualifiez-vous votre enfance ? J’ai eu plusieurs enfances. Une enfance routinière, naïve, pendant laquelle j’étais plutôt dans le déni. Et une grande enfance, vers 13-14 ans, pendant laquelle le voile s’est levé sur mes parents, ma famille. Je suis né en Pologne, j’avais deux ans et neuf mois quand je suis arrivé en France. Je suis un fils d’immigrés avec une enfance populaire dans un quartier populaire, le Louvray, à Pontoise, dans le Val d’Oise. Petit, je partage mon temps entre le football sur le parking, le vélo, la maison de quartier et les dessins animés à la télé. J’ai une maman qui m’aime beaucoup, un papa assez froid, un Polonais des années 1950. Pas le papa le plus empathique. Je suis très bon élève, le meilleur de ma classe. Mes parents se sont rencontrés dans une imprimerie d’où sortaient les journaux de Solidarnosc. A l’époque, mon père était impliqué et a eu des démêlés avec la justice ; il est alors parti pour la France. J’avais deux mois. A vrai dire, cela l’a bien arrangé de quitter ses obligations familiales parce que c’était un coureur. Entre autres. J’ai une sœur un peu plus âgée, mais elle comme moi, nous sommes des enfants accidentels. Je le comprendrai en grandissant. Le mariage de mes parents n’était pas un mariage d’amour. D’ailleurs, ma mère est restée seule deux ans et sept mois avec deux jeunes enfants avant de rejoindre mon père dans le cadre du regroupement familial. Nous avons été hébergés par d’autres Polonais, avant d’obtenir un appartement au Louvray où je ferai toute ma scolarité. J’ai eu la chance de commencer la maternelle juste après notre arrivée et d’apprendre de suite le français.
Que voulez-vous dire par le voile s’est levé vers 13-14 ans ? A 13-14 ans, les antidépresseurs et l’alcool entrent dans ma famille et dévorent mes parents. L’harmonie apparente du foyer laisse place au manque manifeste d’amour ; le couple commence à s’effriter. Ma soeur et moi avions grandi, nous étions plus indépendants et nous ne pouvions plus être leurs garde-fous. Ma mère a sans doute réalisé alors qu’elle était loin de tous et qu’elle n’était pas obligatoirement heureuse. Mon père a fait des formations de dessin sur Autocad et dessinait des lignes de chemins de fer. Ma mère travaillait dans un supermarché et a été ensuite hôtesse d’accueil à l’hôpital. Et puis, ses addictions ont fait qu’elle a perdu son boulot. Ça fait pas loin de vingt ans maintenant qu’elle ne travaille plus.
« Ce n’était vraiment pas un milieu propice à l’épanouissement personnel. »
Que ressentiez-vous dans ce milieu familial insécure ? En fait, chaque jour, en rentrant de l’école, j’espérais juste que ma mère aille bien. J’avais peur de mon père, parce qu’il était un peu comme un policier à la maison, une présence passive. Sa seule responsabilité vis-à-vis de moi résidait dans son obligation de me loger, de me nourrir et de m’envoyer à l’école. Ce n’était vraiment pas un milieu propice à l’épanouissement personnel.
Wojtek au cabaret sauvage.
Rêviez-vous d’une autre vie ? Je jalousais la routine des autres, aussi simple était-elle. Un foyer où il se passait des choses. Je crois que le philosophe Vincent Cespedes dit que l’ambition naît de notre impuissance et de notre culpabilité à aider quelqu’un. Mon père me tombait dessus et ma mère prenait ma défense. Alors, parce que j’étais jeune, j’avais tendance à croire que c’était à cause de moi. Qui plus avec le catéchisme… Les Polonais sont très croyants et, souvent, tu as pêché même quand tu n’as rien fait. Je n’ai compris que plus tard que quand ça ne va pas dans un couple l’enfant peut servir de prétexte. Mais j’ai ainsi été vertueux pendant très longtemps en pensant qu’il y avait une justice invisible. Ce n’était pas pour aller bien, mais simplement pour que cela n’aille pas plus mal.
Est-ce pour cela que vous étiez toujours premier à l’école ? J’ai une bonne mémoire, de bonnes ressources intellectuelles, je comprenais vite, je retenais… C’était naturel, je ne faisais pas vraiment d’efforts. D’où le fait que je développais un syndrome de l’imposteur. Je m’accrochais à ça aussi parce que cela n’aggravait pas mon cas. A l’adolescence, j’ai décroché… Je me suis mis dans la moyenne et je suis devenu moins discret. Parce que quand on est premier de la classe, on devient une entité autre. On est vu comme le fayot, le chouchou… Et on comprend que quand on est le premier, on devient un numéro en fait. Comme si on était coupable d’être premier, d’être pas comme les autres. En cinquième, les profs ont commencé à écrire sur mon carnet : capacités non exploitées. Et en troisième, ils m’ont fait redoubler pour me punir. Parce que j’avais largement de quoi passer en seconde, mais ils étaient tellement déçus par moi. J’avais fait une demande pour aller en bac F12, un bac d’arts plastiques, mais ils ne l’avaient pas appuyée. Ils disaient que je n’avais pas un profil artistique. Parce que j’étais bon en maths, ils voulaient absolument que je fasse une seconde scientifique. Cela ne m’allait pas et j’ai donc redoublé ma troisième.
Quel a été ensuite votre parcours scolaire ? Je suis parti faire un BEP Vente Action marchande en alternance parce que j’avais envie de m’évader et de me faire un peu d’argent. A 17 ans, mon employeur m’a proposé de m’embaucher et j’ai lâché l’école. J’ai travaillé chez un traiteur de luxe à Paris, au Prestige, avenue de la Grande armée. A l’époque, cette entreprise avait 15 boutiques et faisait un chiffre d’affaires impressionnant. Ça a été une renaissance pour moi ! Je suis passé de mon quartier populaire aux beaux quartiers de Paris. Nous étions une soixantaine de personnes, dont des mecs comme moi qui s’habillaient en baskets, survets, des mecs de banlieue, et qui, malgré tout, étaient bons dans ce qu’ils faisaient.
Le cadre exigeant de la restauration vous a sauvé ? L’avantage quand t’es jeune, c’est que t’es deux fois plus félicité quand tu fais bien. J’étais le premier vendeur à 18 ans seulement. C’était grisant. J’étais un peu le jeune prodige, parce que je redevenais le premier de la classe. J’aimais ce que je faisais, donc je m’impliquais. Cela m’a donné de la valeur.
Quand le rap entre-t-il dans votre vie ? Je me fais muter dans une nouvelle boutique, mais au bout d’un an, je dois démissionner parce que je ne supporte pas la nouvelle directrice. Je me fais embaucher par Lenôtre, le concurrent. J’y bosse deux mois, et là, mon ancien directeur vient me débaucher pour travailler dans une nouvelle boutique à Neuilly. C’est là que je rencontre deux cuisiniers avec qui je commence dans le rap. Je faisais déjà un peu de musique, mais je trouvais que les textes des rapeurs ne tenaient pas la route. Alors j’ai commencé à écrire mes premiers textes de rap vers 19 ans. On finissait nos journées le plus tôt possible et on rentrait pour enregistrer des tas de chansons. On a expérimenté ça pendant deux ou trois ans. Les deux cuisiniers, qui travaillaient dans une restauration très normée, renouaient avec leur créativité en faisant du rap avec moi. Ils m’ont vraiment porté, mais eux ont laissé tomber ensuite.
Quand montez-vous sur scène pour la première fois ? Dans un petit concert de rap street à Cergy. Mon rap a un style différent, je pense. J’ai alors des retours positifs de gens plus avancés que moi et cela me pousse à continuer. Je me suis retrouvé seul, je me suis concentré sur les textes et j’ai cherché des mecs qui faisaient de la musique. Une copine m’a amené sur une scène ouverte de rap, mais je n’ai pas tout de suite accroché. Alors j’ai bossé et bossé encore. Ce n’est que vers 25/26 ans sur des scènes slaves, où il y avait des gens de tous les âges, que je me suis rendu compte que mes textes étaient pour des initiés. Cela a recadré mon écriture. J’ai réalisé que plutôt que de parler de la galère au quartier, de parler cru et vulgaire et d’emmerder tout le monde, il fallait parler de l’ennui avec un grand E et que là, ça allait intéresser plus de monde. J’ai élargi ma cible, parce que je voulais de l’attention… Il m’a fallu pas mal de temps pour me remettre en question avant de devenir un poète mémorable (!)
« J’étais vraiment en marge jusqu’à 2011 : que du cash, pas de papiers d’identité, pas de CV… J’étais dans un monde parallèle. »
Vous travailliez en parallèle de la musique ? Oui, jusqu’à 25 ans. Et puis, j’ai basculé dans le monde du travail au black. J’étais vraiment en marge jusqu’à 2011 : que du cash, pas de papiers d’identité, pas de CV… J’étais dans un monde parallèle. Celui qui existe aussi dans le pointillé… Aussi bien pour acheter un permis de conduire que pour avoir un appartement. Mais comme dit souvent un ami, on avait beau être en marge, on était sur la page quand même. Je suis tombé sur les mauvaises personnes, des mecs qui avaient des boîtes, mais qui étaient aussi des magouilleurs. Un de mes patrons a fait quand même de la prison pour fraude fiscale et pas mal d’autres trucs… C’était la main qui me nourrissait, qui me formait, qui m’invitait au resto… Il me faisait rencontrer des directeurs de centres commerciaux, il m’envoyait avec trois ou quatre gars pour superviser des montages de chalets de Noël, il me demandait d’apporter des pots-de-vin à des directeurs régionaux qui ne déclaraient pas les marchés de Noël qu’ils organisaient dans leur centre commercial et s’encaissaient des 40 000 euros en les partageant avec les chefs de la sécurité et d’autres. Le bon élève a découvert qu’en montant dans la société, c’était pas mieux. Un autre voile se levait. Le monde n’est qu’une immense mascarade.
« J’ai vu le rap contender comme un tournoi : des rappeurs qui s’affrontent. »
Le dernier Rap contender auquel Wojtek a participé s’est tenu au Cabaret sauvage, salle de spectacles située dans le Parc de la Villette à Paris.
Comment arrivez-vous au rap contender ? J’ai accompagné un ami, qui était déjà connu, à une compétition de rap contender. Et j’ai tout de suite voulu en être. J’ai aimé le côté puant ; les scènes slaves étaient plus convenues et utopistes. J’ai vu le rap contender comme un tournoi : des rappeurs qui s’affrontent. J’étais déjà un bon rappeur et là encore, je suis sorti du lot très facilement, parce que j’avais tout ce qu’il fallait pour ça. Loin du rap conscience -qui prônait la citoyenneté- et du rap slave utopiste, là je pouvais insulter les gens. J’avais trouvé ma scène. Celle-ci a accueilli mes deux faces : d’un côté ma violence et de l’autre, ma sensibilité. Et en plus, je ne renvoyais pas les codes du rapeur. Je suis arrivé boule à z, cuir noir, avec un look skin head. Et de battle en battle, je suis devenu l’un des plus forts, si ce n’est le plus fort.
Vous avez été quatre fois numéro un de rap contender ? Oui, j’ai pris le titre des rap contenders 7, 9, 11 et 13. Et au 9, j’ai envoyé un vers à mon adversaire où figurait le mot marteau piqueur. A partir de là, on m’a surnommé le Marteau piqueur.
Est-ce que cela vous a rapporté de l’argent ? Au début, je ne demandais même pas d’argent, parce que j’y prenais du plaisir. Cela me donnait de la consistance et de la reconnaissance. J’existais. J’avais des cachets symboliques. C’est un moyen pour se faire connaître pour plein de rappeurs et de sortir un CD. Alors j’ai aussi sorti un CD, mais je n’étais pas dans une approche lucrative. J’étais dans le thérapeutique en fait. Ça a été symbolique pour moi de voir mon CD à la FNAC, d’être arrivé là, malgré mon parcours, mais ce n’est pas quelque chose que j’ai développé. A l’époque, je ne donnais pas de sens à ma vie, je n’aimais pas mon histoire, et tout d’un coup, les gens m’aimaient et me reconnaissaient. C’est tout. Je faisais des millions de vues sur les réseaux et, vu ma vie parallèle, je me suis même dit que j’allais m’attirer des problèmes.
« …sur scène, j’étais devenu un dictateur comme mon père, un mec apathique qui disait des choses qui ne se disent pas… j’ai toujours été passionné par l’ésotérique, la possibilité de transformer le plomb en or. Je voulais transformer ce que j’avais vécu. Sur scène, j’arrivais avec toute ma violence et les gens m’applaudissaient et m’aimaient. »
Qu’est-ce que le rap contender vous a apporté ? En fait, sur scène, j’étais devenu un dictateur comme mon père, un mec apathique qui disait des choses qui ne se disent pas. Et puis, j’ai toujours été passionné par l’ésotérique, la possibilité de transformer le plomb en or. Je voulais transformer ce que j’avais vécu. Sur scène, j’arrivais avec toute ma violence et les gens m’applaudissaient et m’aimaient.
Qu’est-ce qui explique le succès du rap contender ? C’est comme pour la télé réalité : le voyeurisme. Le public voit une personne sur scène être rabaissée et cela l’élève. Il peut se dire : « moi, je suis mieux ». En plus, il peut s’identifier à moi, parce que je n’ai pas la panoplie habituelle du rappeur. Je monte sur scène habillé comme dans la vie de tous les jours : un blond à lunettes avec un jean, un tee-shirt… Voilà l’ethos que je renvoie. Mais au bout de dix ans de succès, je me suis saboté et j’ai arrêté. Peut-être parce que j’avais pas encore trouvé ma mission de vie.
Qu’est-ce qui vous a ramené dans le monde des vivants comme vous dîtes ? La vie de couple. J’ai rencontré ma compagne il y a 12 ans. J’avais 30 ans et je n’avais jamais rencontré l’amour avant. Avant, oui, j’avais eu des potes, des maîtresses, mais pas d’amour. Mon père s’est suicidé et, quand j’allais mal, le suicide était alors la seule option qui me passait par la tête.
Que faites-vous aujourd’hui ? J’oscille entre l’entreprenariat, la vie d’artiste et la vie de famille. Maintenant, je veux perdurer. J’ai ma propre boîte, La belle histoire, pour écrire et transmettre. C’est ce que j’aime le plus faire aujourd’hui, transmettre. Je viens de préparer des lycéens à un concours d’éloquence, par exemple. J’ai l’impression que ça, ça a encore un impact sur eux, par rapport aux études. L’oralité et l’éloquence peuvent vraiment donner une seconde chance. Je peux en témoigner. Alors si je peux transmettre des compétences orales tout en m’acquittant de ma dette vers le bas… Et puis, je vais reprendre mon spectacle Sa mère la grosse plume. J’avais déjà fait une quarantaine de représentations avant le COVID. Cela a été difficile de le relancer, mais je vais le jouer à nouveau bientôt. Maintenant, je suis sur scène avec un DJ pour mêler texte et musique.
Au Trabendo, salle de spectacle située dans le Parc de la Villette à Paris.
Dans un environnement de plus en plus numérique, nous passons souvent des heures par jour devant un écran, qu’il soit celui d’un smartphone, d’une tablette, ou d’un ordinateur. Sans compter celui de la télévision. A tel point que nos yeux montrent de réels signes de fatigue comme de la sécheresse oculaire, des démangeaisons ou encore des maux de tête. Adoptez quelques bonnes habitudes pour améliorer votre confort.
Assurez-vous que l’éclairage de votre espace de travail est bien ajusté pour minimiser l’éblouissement. L’écran doit être placé juste en dessous du niveau des yeux et à environ une longueur de bras de distance. Ajustez la luminosité de l’écran pour qu’elle corresponde à celle de votre environnement peut également aider.
Pensez à décoller vos yeux de l’écran régulièrement.
Regardez ailleurs et au loin en appliquant la règle des 20/20/20 : toutes les 20 minutes, faîtes une pause de 20 secondes en portant votre regard à 20 pieds (6 mètres) et/ou marchez quelques pas. Cette pratique aide à détendre les muscles des yeux.
Dès que vous ressentez une gêne, clignez des yeux. Fermez et ouvrez les yeux doucement pendant 30 secondes. Cela facilite la production de larmes et donc la lubrification des yeux.
Regardez alternativement de près et de loin.
Frottez vos mains l’une contre l’autre pour les réchauffer et appliquez-les doucement sur vos yeux fermés pendant 30 secondes pour atténuer la tension oculaire.
APAISER LE STRESS
Notre quotidien peut se montrer stressant. Pas de panique. Revenez à l’équilibre et retrouvez votre tranquillité d’esprit.
Respirez profondément
Prenez le temps de vous asseoir confortablement, fermez les yeux, et concentrez-vous sur votre respiration. Inspirez lentement par le nez, en gonflant l’abdomen, puis expirez lentement par la bouche. Répétez cet exercice plusieurs fois. Cette méthode de respiration profonde aide à ralentir le rythme cardiaque et à diminuer la tension artérielle. Ce qui procure rapidement une sensation de calme.
Pratiquez la visualisation positive
Fermez les yeux et imaginez-vous dans un lieu qui vous apporte paix et bonheur. Cela peut être une forêt paisible, une plage déserte ou tout autre endroit qui vous fait vous sentir bien. Visualisez tous les détails de ce lieu, les sons, les couleurs, les sensations. Cette évasion mentale peut vous aider à diminuer le sentiment de stress en vous transportant momentanément loin des sources de tension.
Bougez et étirez-vous
Si vous vous sentez tendu, levez-vous et bougez. Faites une courte promenade, étirez-vous ou pratiquez quelques postures de yoga. Le mouvement aide à libérer les endorphines, les hormones du bien-être, qui réduisent le stress et améliorent l’humeur. En intégrant ces techniques à votre routine quotidienne, vous serez mieux équipé pour faire face aux moments de stress.
N’en déplaise aux influenceurs des médias sociaux, c’est monsieur notre corps qui décide où il perd son gras. Mais toute activité physique aide à la brûler de manière globale tout en préservant la masse musculaire. A condition de prendre soin de soi et de faire confiance au temps.
Les publicités pour perdre du poids n’en finissent pas de fleurir sur les médias sociaux. Mais la plupart d’entre elles promettent une perte de gras dans une zone précise du corps -qui s’avère le plus souvent, le ventre- à l’aide d’exercices physiques, de diètes adaptées, de comprimés magiques et de compléments alimentaires révolutionnaires. Et les photos avant/après, prises soi-disant à quelques semaines ou mois d’intervalle, sont impressionnantes. Mais ce n’est pas là la réalité de notre condition humaine. Pourquoi ? Parce que le corps humain est fait de telle sorte qu’il accède à l’ensemble de ses réserves de graisse pour produire l’énergie nécessaire à sa bonne marche.
Triglycérides : des réserves énergétiques Le saviez-vous ? 95% des graisses alimentaires que nous consommons sont des triglycérides, un type de lipides ou de molécules de graisse que notre corps peut utiliser comme sources d’énergie. Mais quand nous mangeons trop par rapport à notre activité physique, ce dernier convertit aussi l’excès de calories en triglycérides. Ils sont alors stockés dans des cellules adipeuses spéciales appelées adipocytes, libérés dans la circulation sanguine et véhiculés vers le tissu adipeux, plus communément appelé graisse corporelle.
La graisse corporelle se trouve partout dans notre corps. Mais elle est principalement localisée sous la peau -graisse du tissu sous-cutané- et autour des organes internes (graisse viscérale). Quand nous faisons de l’exercice de manière prolongée ou que nous entamons un régime ou un jeûne, notre corps va se tourner vers toutes ses parties pour puiser dans leurs réserves et maintenir ainsi son énergie. Il est prouvé scientifiquement que le corps brûle alors les graisses, mais pas de manière ciblée. Ainsi, en Australie, un essai clinique sur douze semaines a montré que la réduction de la graisse abdominale était la même chez les personnes ayant suivi un programme d’abdominaux, en complément d’une modification de leur alimentation, que chez les personnes ayant juste suivi ledit régime sans faire d’abdominaux. Une méta-analyse, portant, elle, sur 13 études et réunissant plus de 1100 participants, a dévoilé que l’entraînement musculaire localisé ne permettait pas de réduire les dépôts de graisse présents dans les parties du corps visées.
La plupart du temps, les études mises en avant par les vendeurs de poudre de perlimpinpin sur le sujet de la perte de graisse dans une zone ciblée ont été effectuées sur un petit nombre de participants ; elles ne montrent pas de résultats cliniquement significatifs.
Notre corps décide La volonté et l’engagement dans le changement ne suffisent pas. C’est avant tout notre corps qui décide et tout dépend alors de :
– notre sexe : femme et homme ne sont pas égaux, là encore. Leur corps stocke différemment les graisses. Et les femmes ont une masse graisseuse plus importante que les hommes. Elles emmagasinent ainsi les graisses plus spécifiquement au niveau des cuisses, des fesses et des hanches. Autrement dit les zones qui risqueraient d’affecter une possible grossesse. Et elles ont tendance à maigrir d’abord du visage, des bras et des mollets.
– nos gènes : les recherches montrent que les gènes peuvent être responsables de 60% de la répartition des réserves de graisses. L’ADN est donc très souvent déterminant.
– notre âge : avec le vieillissement, des changements s’opèrent dans le métabolisme, la masse musculaire et le taux d’hormones. Ce qui peut avoir une incidence sur la zone d’élimination de la graisse. Les hommes d’âge moyen et les femmes ménopausées ont tendance à stocker la graisse viscérale autour de la ceinture abdominale. Une zone particulièrement résistante au changement !
Des produits-miracles sans efficacité Le marché est inondé de potions magiques, de compléments alimentaires et autres comprimés annoncés comme solutions miracles pour perdre la graisse du ventre. Alors qu’une multitude d’études récentes réfutent les sornettes de leurs vendeurs. Deux d’entre elles, menées par l’université de Sydney, ont aussi ausculté les données de plus de 120 essais, contrôlés par placébo, portant sur des suppléments à base de plantes et des compléments alimentaires. Aucun de ces produits n’a permis d’obtenir une réduction cliniquement significative du poids corporel chez les personnes en surpoids ou obèses.
Alors que faire ? Une chose est sûre, une alimentation saine et équilibrée (faites-vous accompagner si besoin par un médecin nutritionniste), un sommeil réparateur et l’exercice physique forment toujours le trio gagnant. Sortir de la sédentarité en pratiquant une activité physique -même s’il s’agit seulement de marcher 30 minutes par jour- contribue à préserver la masse musculaire et à brûler la graisse… Au fil du temps, la silhouette change, la posture évolue, le poids se stabilise. Et vous gagnez en forme !
Avec les années 60, un monde finissait et un autre commençait. Une décennie de vitalité et d’audace qui continue de fasciner jeunes et moins jeunes. Dans la France de l’époque, les yéyés rendaient folles les foules et leurs tubes animaient les bals de province comme les boîtes à la mode. Projecteur sur un courant musical qui détrôna alors la chanson à texte.
Le 22 juin 1963, entre 150 et 200 000 jeunes se retrouvent place de la Nation à Paris pour fêter le premier anniversaire du magazine Salut les copains. Ils ont répondu à l’appel de Daniel Filippachi et Franck Ténot, créateurs et animateurs de l’émission quotidienne du même nom sur Europe 1. Toutes les vedettes d’alors vont se succéder sur scène, de Johnny Halliday à Franck Alamo, en passant par les Chats sauvages, Richard Antony ou encore Sylvie Vartan. Le public déchaîné vit un moment intense et inoubliable. Le lendemain, dans le journal Le Monde, le sociologue Edgar Morin baptise les jeunes artistes les « yéyés ».
L’expression sera utilisée aussi bien en France qu’au Québec. « Yéyés » est à la fois le nom d’un courant musical et un adjectif pour qualifier une chanson ou une musique adaptée d’un succès anglo-saxon d’alors, dont les baby boomers, à savoir les jeunes nés après la Seconde guerre mondiale, sont particulièrement fans. La connotation se voulait à l’origine péjorative et railleuse dans la bouche de leurs parents et des intellectuels ; elle désigne aussi bien les amateurs de tubes yéyés que les jeunes interprètes de ceux-ci.
Mais d’où vient cette interjection ? En fait, elle n’est autre que la transcription française de « yeah », une déformation de « yes » (oui) souvent répété (« yeah ! yeah ! ») dans les chansons de rock et de twist américaines. Les traducteurs ont préféré « yé » à « ouais ».
La vague « yéyés », qui durera jusqu’à la fin des années 60, mettra au placard pour un temps les chanteurs à texte de la « rive gauche ». Les Mouloudji, Brel et Brassens devront souvent attendre son passage pour reprendre du poil de la bête et mettre leur répertoire au goût du jour. A grand renfort d’une nouvelle orchestration teintée « sixties » et bientôt déjà « seventies ».
Plus qu’un genre musical, le rock est un phénomène qui a façonné plusieurs générations depuis son émergence dans les années 1950. Né, entre autres, de la fusion entre le blues, la country et le rhythm and blues, il n’a eu de cesse de se fragmenter en courants musicaux et de laisser ainsi une empreinte indélébile sur la culture populaire internationale.
Les années 1950 marquent l’avènement du rock and roll avec des figures emblématiques comme Elvis Presley, Chuck Berry et Little Richard. Des artistes exceptionnels qui ont bouleversé la scène musicale de leurs performances énergiques et de leurs rythmes très entrainants. Exprimant une nouvelle liberté et le désir de briser les conventions de leur époque, ils ont littéralement capturé l’esprit rebelle de la jeunesse.
L’âge d’or Pendant les années 1960 et 1970, le rock and roll vit son âge d’or. Il prend d’autres couleurs jusqu’à faire naître des sous-courants musicaux. Les Beatles et les Rolling Stones, groupes originaires du Royaume-Uni, dominent les charts mondiaux et influencent profondément la musique et la culture pop. En parallèle, le rock psychédélique de Jimi Hendrix et de Pink Floyd explore de nouvelles dimensions sonores tandis que le hard rock de Led Zeppelin et Deep Purple introduit d’inégalées puissance et intensité.
Le temps de la diversification Les décennies suivantes voient le rock se diversifier en une myriade de sous-genres. Le punk rock des Sex Pistols et des Ramones revendique un retour à l’authenticité. Le grunge de Nirvana et Pearl Jam capture le malaise de la génération X tandis que le rock alternatif élargit les horizons musicaux avec des groupes comme Radiohead et Coldplay.
Toujours en mouvement Aujourd’hui, le rock continue d’évoluer. Il intègre éléments d’électronique, de pop et autres genres musicaux et témoigne ainsi de sa capacité à se réinventer. The Strokes et Arctic Monkeys ou Tame Impala ont su lui apporter une touche contemporaine qui séduit les nouvelles générations. Plus qu’une simple suite d’accords, le rock a été et est toujours le porte-parole de révoltes et le reflet d’aspirations et d’évolutions de la société. Toujours à la recherche de souffles innovants, toujours porteur d’une énergie indomptable, il maintient encore aujourd’hui son statut de pilier culturel.
Surnomné « The king » du rock and roll, Elvis Presley a révolutionné la musique et la culture populaire du XXème siècle. Né en 1935 à Tupelo, dans le Mississipi, il a su captiver le public avec sa voix unique, son charisme scénique et son style provocateur sur scène.
Dès ses premiers enregistrements chez Sun Records en 1954, il fusionne le blues, la country et rhythm and blues et crée un nouveau son électrisant qui jette les bases du rock and roll. Avec ses hits « Heartbreak hotel », « Hound dog » et « Jailhouse rock », le chanteur devient une icône mondiale et le symbole de la jeunesse rebelle de l’Après-guerre.
Mort prématurément en 1977, le « King », essence à lui seul du rock, continue d’influencer les artistes. Eternel.
L’activité physique quotidienne diminue et le temps de sédentarité augmente. Conséquences : la santé physique et mentale de la population mondiale se dégrade. En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) alerte et met en garde (1) : 95% des Français ne font pas assez d’exercice physique et/ou sont trop sédentaires. Comment leur redonner le goût du mouvement pour aller bien ?
Entre le « no sport » de Winston Churchill, secret déclaré de sa longévité, et le précepte de Pierre de Coubertin qui définissait le sport comme « le culte volontaire et habituel de l’exercice musculaire intensif, appuyé par le désir de progrès et pouvant aller jusqu’au risque », un gap. Sans doute pouvons-nous situer au cœur de ce dernier la définition de l’activité physique de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : « Tout mouvement corporel produit par les muscles squelettiques qui requiert une dépense d’énergie. » D’intensité modérée ou soutenue, elle « a des effets bénéfiques scientifiquement prouvés sur la santé. » Elle contribue en effet à prévenir et à améliorer le pronostic des maladies chroniques, à maintenir un bon équilibre du poids, à améliorer la santé mentale, la qualité de vie et le bien-être et à prolonger l’autonomie. Pour l’Anses, l’inactivité physique des adolescents, population particulièrement touchée, correspond à une activité physique « inférieure à soixante minutes, incluant le sport pratiqué en temps scolaire. » (cf. encadré)
Bouger, ça s’apprend !
La sédentarité, quant à elle, se caractérise par le temps éveillé journalier passé assis (dans les transports, devant un écran, au travail…) ou allongé. Les risques pour la santé apparaissent dès trois heures par jour dans ces positions, avec un vrai danger une fois le cap des six/sept heures dépassé. Il est en effet prouvé aujourd’hui que la sédentarité a un impact négatif sur le cœur et le cerveau, fait monter la pression artérielle et la glycémie. Si elle est conjuguée avec un faible niveau d’activité physique, elle est l’un des principaux facteurs de risque pour la survenue et l’aggravation des pathologies chroniques, première cause de mortalité dans le monde.
Un mode de vie actif, et ceci dès le plus jeune âge, est la condition sine qua none pour rester en bonne santé tout au long de sa vie. Pour les 6-17 ans, l’Ansespréconise de diminuer les occupations sédentaires et plus particulièrement le temps d’écran (smartphones, tablettes, télévision…). Pour les adultes, elle recommande d’augmenter la quantité d’activité physique journalière et de limiter les périodes de sédentarité prolongées.
En cas d’activité, notamment professionnelle, qui oblige à rester assis, elle invite à se lever toutes les deux heures, pendant quelques minutes, pour marcher, s’étirer, faire quelques mouvements… Il est bienvenu d’y ajouter l’équivalent d’au moins trente minutes d’activité physique modérée -qui essouffle un peu- par jour, au moins cinq fois par semaine. Et les occasions de bouger dans notre quotidien ne manquent pas : monter et descendre les escaliers plutôt que de prendre l’ascenseur, marcher plutôt que de prendre la voiture ou les transports en commun quand c’est possible… Il s’agit de (ré) intégrer le mouvement dans notre quotidien.
Pour les personnes avançant en âge, l’activité physique permet de diminuer les risques cardiovasculaires. Mais aussi d’améliorer la qualité de vie et la capacité fonctionnelle et, en favorisant ainsi le maintien de l’autonomie, retarde leur entrée en dépendance. Elle prévient la perte de masse musculaire, améliore donc l’équilibre et diminue le risque de chute.
Le sport pour allié
Comme des millions de personnes dans le monde, 60% des Européens, des Américains et des Australiens font du sport. Les études montrent aujourd’hui que la pratique de certains sports parmi les plus populaires -la marche et le vélo- réduit significativement le risque de décès prématuré. Mais tous les sports n’ont pas le même impact sur notre santé. Leurs bénéfices ne sont pas encore démontrés clairement dans les études internationales, mais une chose est sûre, pratiquer un sport quel qu’il soit fait entrer dans un mouvement individuel et/ou collectif positif tant pour le physique que pour le mental.
Pour réduire le stress et la déprime, le sport est un allié de taille. Selon l’Inserm, une personne sur cinq a souffert ou souffrira d’une dépression dans sa vie. Et une sur cinq est affectée chaque année par une maladie mentale (troubles bipolaires, schizophrénie…). « Environ 6% des sportifs de haut niveau sont anxieux ou ont des problèmes de santé mentale, » précise le Dr Marc Rozenblat, médecin du sport. « Ce pourcentage est autour de 15% chez la population mondiale. Le sport permet de prévenir la survenue ou l’aggravation de maladies mentales. »
Plus la pratique d’un sport est intense, plus l’organisme produit des hormones. De l’endorphine (anti-douleur et euphorie), de la dopamine (plaisir et vigilance) ainsi que de l’adrénaline et de la noradrénaline (efforts et puissance). Les médecins recommandent aux personnes atteintes de dépression de se lancer dans un sport collectif (football, basket, volley…), car ils permettent de socialiser et de tisser des liens avec ses coéquipiers. Mais pour les individus les plus stressés, un sport individuel (course à pied, vélo…) leur permettra de ne pas se soucier du regard des autres qui les fait souvent souffrir.
Améliorer la santé des Français est aujourd’hui un enjeu de santé publique. Il s’agit de les aider à adopter de nouveaux comportements et de leur permettre de (re)trouver le goût et le plaisir de bouger dans un environnement propice à la pratique d’une activité physique agréable, facile et sécurisée.
Une loi publiée le 2 mars 2022 a mis l’accent sur le sport-santé, soit des activités physiques adaptées et prescrites par les médecins aux personnes atteintes d’affections, notamment chroniques, ou ayant des facteurs de risques (surpoids, obésité…), ainsi que sur l’instauration d’une pratique obligatoire d’activité physique quotidienne à l’école primaire et sur l’accès aux équipements sportifs scolaires pour les associations. En 2021, le gouvernement a aussi instauré une aide financière pour encourager les jeunes à se lancer dans une pratique sportive : le Pass’Sport. Les entreprises sont, elles, invitées à soutenir le bien-être de leurs salariés. Mais le chemin s’annonce long pour faire bouger la situation.
Et si le changement commençait comme toujours par un pas, un simple pas, le vôtre ?
(1) Étude Inca3 de l’Anses (novembre 2020), la troisième sur les consommations et les habitudes alimentaires de la population française.
« Je n’ai jamais été aussi confiante »
Cette « retraitée » hors normes détient le record du monde du 80 mètres haies dans la catégorie des 70-74 ans, depuis juillet 2022. Âgée de soixante-douze ans, Eliane Piret collectionne les médailles sur les pistes nationales et internationales.
Comment êtes-vous venue à l’athlétisme ?
Eliane PIRET : Á l’école primaire. Nous pratiquions le sport dans la cour. C’était ma matière préférée, un véritable jeu, pas du tout une contrainte : sauter dans le sable, lancer le poids, faire des tours en courant. Ce qui me plaît depuis toujours dans l’athlétisme, c’est la diversité des activités. Ma préférence ? Les haies. J’ai pratiqué en club à Calais jusqu’à l’âge de dix-sept ans. J’ai même été qualifiée aux championnats de France en cadettes. J’aurais aimé être professeure de sport, mais mes parents ont choisi pour moi. J’ai fait un CAP de sténodactylo comptable. Á dix-huit ans, j’ai commencé à travailler et j’ai arrêté de m’entraîner.
Et vous avez repris le sport quand vous vous êtes séparée du père de vos trois enfants …
E.P. : J’ai vécu une période difficile. J’étais seule pour les élever. J’ai alors dû reprendre mon métier de secrétaire. Mais je les conduisais régulièrement au stade à Calais. Au fil du temps, j’ai eu envie d’être utile à l’association sportive SO Calais. J’ai encadré les poussins. Je me suis formée pour être juge, et j’ai même été présidente. Tout en me préparant aux compétitions, en travaillant la musculation, la course et notamment les haies.
Votre histoire avec l’athlétisme n’est pas un long fleuve tranquille…
E.P. : Oh non ! C’est un chemin semé d’embûches. J’ai eu encore un petit arrêt vers cinquante ans, à la ménopause. Mon mental n’était pas au top. Et, de fait, j’avais pas mal de petits bobos. De plus, je n’avais plus alors l’encadrement qu’il me fallait. Pour pouvoir pratiquer mon sport, j’ai besoin d’avoir quelqu’un qui me dit ce que je dois faire. Je me sentais un peu hors catégorie.
En 2002, vous rencontrez celui qui va devenir votre second mari…
E.P. : Pierre, oui, qui s’est investi, lui, toute sa vie dans la marche athlétique. Je commence alors à m’entrainer dans ce sport. Alors que j’étais adepte du sprint, je passe aux longues distances. J’ai pratiqué pendant une dizaine d’années. En 2011, j’ai même été finaliste aux championnats d’Europe vétérans sur cinq kilomètres. Mais j’ai dû arrêter après un problème de tendon à un genou. Je suis alors passée à la marche nordique en bord de mer. Et puis, un jour de 2017, le mauvais temps m’a obligé à m’entraîner en salle. J’ai alors découvert la technique de l’entraîneur de sprint Mrakodo Makifou, dit « Maki » : des exercices de gainage et de souplesse, en musique. Très intéressant d’associer rythme et gestes de l’athlétisme… et, cet homme dégageait de l’énergie et de la bonne humeur. Á soixante-sept ans, j’ai eu envie d’essayer. Maki a accepté de s’occuper de moi, à condition que je perde dix kilos ! J’ai adopté un nouveau régime alimentaire auquel je me tiens depuis : j’évite sel et sucre; je privilégie poulet, poisson, légumes et pain complet. Je prépare ce que je mange et cela participe à mon sport.
Eliane Piret sautant les haies à l’âge de 14 ans.
Qu’est-ce qui vous fait franchir les haies aujourd’hui ?
E.P. : Sans hésiter, le plaisir de me voir progresser. Depuis cette période où j’ai repris mon sport, l’entraînement et la compétition, je me demande si je vais encore être capable, chaque année. Je doute, mais j’y vais. La pratique de la visualisation à laquelle Maki m’a initiée m’aide beaucoup. Après une course, je revois dans ma tête tous les gestes que j’ai accomplis : ce qui a été, ce qui n’a pas été, ce qui m’a donné du plaisir ou pas. Je n’ai jamais été aussi confiante. Au point de me remettre en question une nouvelle fois, en 2023, en prenant un nouvel entraîneur. Alain Bodayan gère ma préparation technique et mon mari, lui, continue de programmer mes entraînements. En principe, je fais huit ou neuf compétitions par an. Alors, il faut entretenir la machine ! Je m’entraîne trois ou quatre fois par semaine.
Eliane Piret et son record du monde.
Quel est votre dernier record ?
E.P. : En juillet dernier, j’ai pulvérisé le record du monde du 80 mètres haies à Tampere, en Finlande, avec 15’70. Pour moi, tout était alors accompli. Mais, j’ai appris que mon record ne serait pas homologué car l’organisateur n’avait pas installé des haies réglementaires. J’ai eu du mal à m’en remettre…
Dans votre préparation mentale, la peinture semble jouer un rôle important. Que vous apporte-t-elle ?
E.P. : La peinture demande une préparation, de la concentration et de la précision. Comme le sport que je pratique. Pendant que je peins, je peux penser à ma course. Et inversement. Les deux préparations se rejoignent inconsciemment. Plus la compétition approche, plus je me prépare aussi à peindre en installant mes toiles dans la véranda, qui est à la fois mon atelier et ma petite salle de sport.
… et à 72 ans !
Vous êtes aussi présidente du club des ainés d’Audinghen (Pas-de-Calais), votre commune de résidence…
E.P. : Oui, depuis cinq ans. C’est un club d’amis avec qui je partage mes passions. Nous parlons et nous marchons, chacun à son rythme. Nous nous stimulons mutuellement pour pousser les limites que nous avons dans la tête. Tout est là : avoir un but et retrouver de la tonicité, comme celle que j’ai retrouvée avec la compétition.
Marche avec le club des ainés d’Audinghen dans le Pas-de-Calais.
Recommandations édictées par le club des cardiologues du sport à l’attention des sportifs.
1. Je signale à mon médecin toute douleur dans la poitrine ou tout essoufflement anormal survenant à l’effort*.
2. Je signale à mon médecin toute palpitation cardiaque survenant à l’effort*.
3. Je signale à mon médecin tout malaise survenant à l’effort* ou juste après l’effort*.
4. Je respecte toujours un échauffement et une récupération de dix minutes lors de mes activités sportives.
5. Je bois trois ou quatre gorgées d’eau toutes les trente minutes d’exercice, à l’entraînement comme en compétition.
6. J’évite les activités intenses par des températures extérieures inférieures à 5°C ou supérieures à 30°C, et lors des pics de pollution.
7. Je ne fume pas, en tout cas jamais dans les deux heures qui précèdent ou suivent ma pratique sportive.
8. Je ne consomme jamais de substance dopante et j’évite l’automédication en général.
9. Je ne fais pas de sport intense si j’ai de la fièvre, ni dans les huit jours qui suivent un épisode grippal (fièvre et courbatures).
10. Je pratique un bilan médical avant de reprendre une activité sportive intense (plus de 35 ans pour les hommes et plus de 45 ans pour les femmes).
* Quel que soit mon âge, mes niveaux d’entraînement et de performance ou les résultats d’un précédent bilan cardiologique.
Pour en savoir plus : clubcardiosport.com Fedecardio.org(série de 5 podcasts Un cœur qui va, la vie qui bat, coproduit par la FFC et Radio France.)
La ménopause concerne 12 millions de femmes en France. Pendant des siècles, pour celles qui l’atteignaient, cette étape naturelle de la vie était synonyme de péremption et de mise au rebut. Reléguées qu’elles étaient au mieux à leur statut de grand-mères. Mais aujourd’hui, malgré les bouleversements physiques et psychologiques traversés, les femmes sont de plus en plus nombreuses à se sentir libérées et à voir l’opportunité de se (re)découvrir. Pour vivre pleinement une deuxième vie.
Dans la culture japonaise, la ménopause est décrite poétiquement comme le second printemps des femmes. Une métaphore intéressante, car n’est-ce pas au printemps que l’on fait le grand ménage pour se débarrasser de ce qui ne convient plus et entrer dans une période nouvelle ? N’en déplaise aux prédicateurs de « symptômes » qu’elle montrerait avant d’arriver et de s’épanouir, cette « saison » n’est pas une maladie, mais une étape naturelle de la vie qui concerne toutes les femmes – généralement aux alentours de 50 ans – et signifie avant tout que leurs règles s’arrêtent alors définitivement. Sur le plan clinique, la ménopause est en effet habituellement confirmée après 12 mois consécutifs d’arrêt des règles, intervenant en moyenne vers 51 ans. Ce n’est d’ailleurs qu’après cette période que le médecin pourra pratiquer un vrai bilan hormonal de sa patiente et, si besoin, lui prescrire un traitement (TMH) pour soulager ses désagréments.
Un corps en mutation
Ce qui n’empêche pas ladite saison de faire chuter les hormones et donc de bouleverser le corps, qui ne répond plus comme avant. Car qui dit ménopause dit avant tout transformation physiologique. Mais toutes les femmes ne sont pas égales. Comme elles ont pu déjà le constater lors de leur puberté ou de leur maternité.
Certes, pour la majorité d’entre elles, il y a les fameuses bouffées de chaleur et les sautes d’humeur, mais pour d’autres, il y a aussi la dépression, les troubles du sommeil, la fatigue, les acouphènes, la prise de poids, la sécheresse vaginale, la baisse de libido… On compte en tout une soixantaine de signes (lire l’encadré page 6) qui se manifestent déjà bien avant la ménopause en elle-même, pendant la période dite de périménopause. Souvent aux alentours de 45 ans.
D’où l’importance pour les femmes d’en parler, de s’informer auprès de leur médecin – gynécologue de préférence – et de se préparer le plus tôt possible pour un « printemps » qui peut s’annoncer à la fois froid et pluvieux, tout comme chaud et ensoleillé. A tel point que la concernée se sentira souvent comme une chrysalide.
Une question de santé publique
Qu’elle soit amenée à prendre un traitement hormonal ou pas, il est important que la femme se montre plus à l’écoute d’elle-même et de son corps pour s’enquérir des signes que ce dernier peut montrer et de l’hygiène de vie qu’elle se doit d’adopter -si elle ne l’a pas déjà fait- pour le maintenir dans l’équilibre et la santé (arrêter de fumer, reprendre une activité physique, avoir une alimentation équilibrée). Car, il s’agit d’avoir surtout de bonnes habitudes de vie pour maintenir son équilibre mental, physique et énergétique. Et ceci au moins dès 40 ans (si cela n’est pas le cas déjà auparavant). D’ailleurs, beaucoup de médecins et d’associations se battent aujourd’hui pour qu’une consultation obligatoire soit mise en place et remboursée par l’Assurance Maladie à partir de 40 ans. Il y a là enjeu de santé publique. Car, même si la ménopause n’est pas une maladie, la carence oestrogénique – qui caractérise l’arrêt de l’activité des ovaires – peut chez les femmes les plus à risque favoriser l’émergence ou l’aggravation du risque cardio-vasculaire et d’ostéoporose. Et les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité chez les femmes de plus de 50 ans.
Une femme libérée
Mais la ménopause ne condamne pas à la prise de poids et à la déprime. N’en déplaise aux adeptes de clichés persistants. D’autant plus qu’elle montre, il faut en convenir, aussi beaucoup de points positifs. Finies les règles douloureuses pour certaines, finies les règles abondantes débordantes pour d’autres, finies les règles tout court, finies aussi les périodes prémenstruelles délicates accompagnées de maux de ventre, de migraines carabinées, d’états nauséeux et de moral dans les chaussettes. Quand on ne veut plus d’enfant, la ménopause est aussi synonyme d’arrêt de la contraception (pilule, stérilet ou technique d’observation de son cycle avec la méthode des températures), souvent vécue comme une contrainte.
Et puis, pour beaucoup de femmes, la ménopause rime aussi avec la fin des contingences de la vie de famille au quotidien et notamment celle liées aux enfants. Car ces derniers, devenus grands, sont sur le point de quitter la maison pour faire des études ou commencer leur vie professionnelle ou sont déjà partis.
Avec l’allongement de la vie, une femme d’aujourd’hui va passer quasiment autant de temps en période reproductive qu’en période ménopausée. Aussi est-il important pour elle qu’elle ose en parler de manière positive et sans honte, pour dédramatiser ce qu’elle traverse et le transformer. En Afrique, la femme ménopausée est une femme puissante. Tel le phénix, y dit-on, elle renaît alors de ses cendres. Comme au Japon, on y parle là-bas aussi de nouveau départ. A bonnes entendeurs.
Qu’est-ce qui a changé chez les femmes dans leur approche de la ménopause ?
Christelle Besnard-Charvet : Elles n’ont plus envie de subir des symptômes comme les bouffées de chaleur, mais elles refusent de prendre le traitement hormonal que je leur conseille. Ce que je trouve paradoxal. Elles voudraient du naturel, de l’homéopathie, mais on ne peut pas ne plus avoir de bouffées de chaleur en une semaine sans prendre d’hormones. Ce n’est pas possible. J’ai connu une époque où les femmes ne se plaignaient de rien et où on leur imposait systématiquement un traitement hormonal de la ménopause pour prévenir l’ostéoporose. Jusqu’à la publication de l’étude de la WHI (Women Health Initiative) en 2005 qui montrait que ce dernier pouvait augmenter le risque de cancer du sein et de maladies cardio-vasculaires.
Est-on dans une période de transition sociétale sur le sujet de la ménopause ?
C.B-C : Oui, ce qui va émerger de ça c’est la prévention, parce qu’on sait qu’on vit mieux la ménopause quand on l’a préparée en limitant les facteurs de risque d’une ménopause pathologique. Pour moi, il y a deux types de ménopause : une ménopause physiologique avec des femmes à bas risque qui n’ont pas d’intoxication tabagique et une hygiène de vie correcte – et peut être une prédisposition génétique positive – et 10% de femmes qui ont une ménopause pathologique pour qui l’absence d’hormones va provoquer des symptômes majeurs. Or, on mélange ces deux types. Et pour le premier type, la prévention est fondamentale. La patiente doit devenir actrice de sa santé. Adopter une bonne hygiène de vie, et ceci dans les dix ans qui précèdent la ménopause. Le fait de ne pas fumer diminue l’âge de la ménopause de trois ans. Fumer majore les symptômes comme les bouffées de chaleur.
Faut-il aussi mieux accompagner les médecins ?
C.B-C : Oui, à la prise en charge globale du patient en général, à une médecine prédictive. Il faudrait que nous puissions lui faire une consultation à 20 ans qui permettrait de le conseiller, en fonction de ses antécédents personnels et familiaux, par exemple. On parle beaucoup de l’étude des gènes, mais comment vit-on avec une épée de Damoclès qui vous dit que vous allez faire une maladie dégénérative ? C’est horrible. Ce n’est pas de cette médecine prédictive qu’il s’agit.
Cette médecine préventive existe notamment pour des femmes dont le terrain familial les met en risque de développer un cancer du sein ?
C.B-C : Oui, mais la solution pour ces femmes n’est pas bonne. On leur dit : on va vous enlever les deux seins et les deux ovaires et vous ne ferez pas de cancer. Mais elles peuvent faire un cancer sur leurs cicatrices. Nous avons toujours des solutions chirurgicales et médicamenteuses, alors que l’hygiène de vie est primordiale dans tous les cancers. 40% d’entre eux sont évitables ainsi. Ce serait donc une médecine plus proche de la médecine chinoise que de la médecine occidentale ? Je ne souhaite pas qu’on en arrive à ça en France, parce que les médecins ne gagneraient pas grand-chose. Mais les gens ne sont pas idiots. Si on apprenait aux enfants, aux petites filles et aux petits garçons, comment ils sont faits. S’ils comprenaient tôt comment fonctionnent leurs poumons, par exemple, ils ne fumeraient pas. Pour la ménopause, c’est la même chose. Je vois des femmes de 50 ans hypercérébrées, cultivées, qui ne savent pas comment elles sont faites et ce qu’est la ménopause. Si à 20 ans, on leur avait dit ce qui les attendait tout au long de leur vie de femme, elles auraient entendu que cela se prépare. Tout se joue pendant la périménopause. Environ dix ans avant la ménopause.
Que se passe-t-il alors ?
C.B-C : Pour commencer, personne n’avait prévu que nous vivrions aussi longtemps, et aussi longtemps après la ménopause. Avant, les femmes mouraient avant et à l’âge de la ménopause. Nous avons des hormones dans tous nos organes et, à cette étape-là, il faut que ces derniers apprennent à fonctionner sans hormones. On passe du super au gasoil. Dans la périménopause, l’organisme va s’habituer progressivement à fonctionner avec un dérèglement hormonal et les organes vont faire avec. On va avoir, par exemple, une diminution du métabolisme de base, à savoir que pour que le cœur batte, par exemple, l’organisme va consommer moins de calories. Si on ne change rien à sa vie, on va donc, prendre du poids. Il va donc falloir obligatoirement manger mieux et bouger plus ! A partir de 40 ans, il faut avoir un mode de vie antiinflammatoire, ancré sur le trépied alimentation anti-inflammatoire – autrement dit un régime méditerranéen – activité physique régulière et gestion du stress. Il est essentiel de faire des efforts pour réduire la sédentarité, encouragée par la période COVID. Ce mode de vie va diminuer aussi les risques cardio-vasculaires et de cancer. Le mieux vieillir commence très tôt, bien avant 50 ans. Aux femmes qui me disent qu’elles ne veulent pas vieillir, je réponds que ce n’est pas possible, mais qu’il est possible de mieux vieillir. La ménopause touche toutes les femmes alors que l’andropause ne concerne que 20% des hommes.
Mais est-ce une fatalité d’avoir des bouffées de chaleur ?
C.B-C : Les bouffées de chaleur concernent quasiment toutes les femmes, mais leur ressenti est différent. Tout dépend aussi de ce qu’elles vivent dans leur vie quand la ménopause arrive. Les bouffées de chaleur, c’est un radiateur mal réglé. Toutes les émotions vont déclencher une montée en chaleur. Plus on a une vie zen, mieux c’est.
Est-ce que cela dépend de la façon dont on appréhende les différentes étapes de sa vie de femme ?
C.B-C : Oui, mais il y a aussi des facteurs génétiques et hormonaux. Pour certaines femmes, les variations hormonales sont très difficiles à vivre. Pour d’autres, beaucoup moins, voire pas du tout. Dans toutes les pathologies, il y a un peu de génétique et beaucoup d’environnemental. Nous vivons dans une société qui crée des facteurs de risque : le tabac, la malbouffe, la sédentarité… C’est pour cela que la ménopause est mal vécue.
Le traitement hormonal est-il une bonne solution pour les femmes avec de forts symptômes ?
C.B-C : Oui. Il vaut mieux prendre un traitement hormonal que des antidépresseurs parce qu’on a des troubles de l’humeur et de la tristesse. D’autant plus que le traitement prévient l’ostéoporose. Je ne le prescris pas pour cela, mais c’est un de ses effets bénéfiques ; je le prescris aux femmes qui ont des symptômes importants qui altèrent leur qualité de vie. Parce qu’il amène des hormones dans tout le corps et que tout va mieux fonctionner. Mais comme l’organisme a été prévu pour vivre sans hormones après 50 ans, cela peut créer un risque de cancer du sein, qui est alors augmenté de 1,2%. Parce que la glande mammaire n’a pas été prévue pour aussi longtemps. Mais il n’y a pas de surrisque de cancer, car, en France, le traitement est faiblement dosé. Avant de le prescrire, je laisse un an après le début de la ménopause pour voir ce qui se passe chez la patiente et dans son hygiène de vie. Cela concerne maintenant 10% des femmes. J’espère qu’on va réhabiliter le traitement hormonal pour les femmes qui traversent des caps difficiles, à certaines périodes de leur ménopause. Et ce serait bien qu’elles puissent y réfléchir pendant la périménopause.
La ménopause peut-elle être le début d’une nouvelle vie ?
C.B-C : Oui. La ménopause n’est pas une fin, mais bien plutôt un début. C’est quand même sympa de ne pas avoir ses règles et de ne plus prendre de contraception. D’ailleurs, il faudrait que les marques de sous-vêtements et d’habillement fassent des efforts pour accompagner les femmes ménopausées. Il est temps de leur proposer des soutien-gorge adaptés à leurs seins qui s’arrondissent (la glande mammaire est remplacée par de la graisse) et des vêtements avec de petits élastiques qui s’ajustent aux évolutions de leur silhouette. Parce que la femme ménopausée prend un peu de taille, même quand elle ne prend pas de poids ; sa masse graisseuse est répartie différemment. N’en déplaise à ceux qui continuent de considérer que les femmes doivent avoir la même silhouette tout au long de leur vie.
Anne Nguyen exerce en cabinet à Paris et à distance.
Qu’est-ce qui vous a menée à devenir praticienne en soins énergétiques et aryuvédiques ?
Anne NGUYEN : La compassion pour les autres m’amène tout naturellement sur mon chemin spirituel à servir autrui à travers les soins ayurvédiques et énergétiques. Lors d’une méditation matinale, j’ai été appelée à exercer mon don de guérisseuse. Depuis 2016, je suis des formations continues sur plusieurs disciplines avec des médecins ayurvédiques : le Dr Vasant Lad aux États-Unis et en Inde et le Dr Hari Pallathery en Inde. Je suis aussi formée par des thérapeutes et des chercheurs de renommée internationale au sein de Dinshah Ghadiadi Society aux Etats-Unis et avec, entre autres, Marcos Guerrero.
En quoi consiste votre pratique et en quoi fait-elle la différence ?
A.N : Ma pratique consiste à équilibrer les troubles de la santé : l’insomnie, le burn-out, le mal de dos, la migraine, le torticolis, la sciatique, les problèmes de menstruation, mais aussi la dépression, les mémoires négatives et karmiques, les traumatismes, les attaques énergétiques, etc. Je traite les dysfonctionnements en partant de leur origine, souvent liée aux traumatismes initiaux, ainsi qu’aux émotions psychiques. Je transmets aussi les outils et les techniques nécessaires pour que la personne puisse se rééquilibrer elle-même, de manière autonome, et qu’elle puisse ainsi désamorcer des conflits interactionnels. Les soins ayurvédiques et énergétiques s’adressent à tous, de tous âges et même aux animaux.
Pourquoi vient-on vous voir ?
A.N : On vient me voir pour aller mieux et physiquement et moralement. Je propose alors un premier bilan de trois heures avec des soins énergétiques et des thérapies manuelles associées à des conseils personnalisés sur l’hygiène de vie selon les principes ayurvédiques et nutritionnels. Ce qui permet de favoriser le processus d’autorégulation, d’auto-régénération vers un meilleur équilibre physique et psycho-émotionnel de la personne. L’ayurveda que je pratique, la médecine holistique de l’Inde ancestrale, tient compte des trois corps qui constituent l’être humain : le corps physique, le corps mental et le corps spirituel. L’équilibre de ces trois corps est essentiel pour amorcer une harmonie de santé.
Où et comment travaillez-vous ?
A.N : Dans le respect et la confidentialité, je travaille en cabinet, à domicile et à distance. Les soins énergétiques sont basés sur le concept de l’énergie de force de vie subtile qui imprègne tous les êtres vivants, aussi fonctionnent-ils aussi bien en présentiel qu’à distance. Je cultive au quotidien l’art de vivre d’une manière spirituelle en servant autrui avec intention, amour et dévotion.
Combien de séances sont-elles nécessaires pour aller mieux ?
A.N : Il est souvent profitable d’envisager deux à trois séances groupées au départ pour parvenir à un bilan approprié. Une séance supplémentaire peut se montrer nécessaire si les dysfonctionnements de la personne sont importants.
Né en Jamaïque dans les années 1960, le reggae porte les luttes de tout un peuple. Il s’exporte très vite avec Bob Marley. Jusqu’à devenir une voix universelle de l’espoir.
Côté musique, le reggae prend ses racines dans le ska et le rocksteady. Si le ska est un style musical rapide et énergique, influencé par le jazz, le rhythm and blues et la musique afro-caribéenne, le rocksteady, lui, se distingue par plus de lenteur et du groove, avec des accents marqués sur la basse et la batterie. Dans les années 1960, le reggae émerge avec l’évolution du rocksteady. Il est popularisé par des musiciens comme Bob Marley, Peter Tosh, Jimmy Cliff et Toots and the Maytals, qui ont été influencés par les rythmes traditionnels jamaïcains, la soul américaine et le mouvement rastafari. Au fil du temps, il évoluera pour inclure des sous-genres tels que le dub, le dancehall et le reggae fusion.
Côté paroles, le reggae est façonné par les conditions socio-économiques de la Jamaïque. La pauvreté, le chômage et la violence politique de l’île lui font porter le combat des Jamaïcains pour plus de justice, d’amour et de résistance à l’oppression. Il devient très vite un emblème de la culture jamaïcaine.
A la conquête du monde
Dans les années 1970, le reggae connaît un essor fulgurant – grâce à l’immense succès du chanteur Bob Marley et celui d’autres artistes comme Jimmy Cliff ou Peter Tosh – et s’exporte un peu partout dans le monde.
En 1973, Bob Marley & The Wailers signent un contrat international avec le label Island Record, fondé par le producteur américain Chris Blackwell. Ils deviennent ainsi les premiers ambassadeurs du nouveau genre musical aux Etats-Unis et à travers le monde. En Angleterre, il séduit le mouvement punk. Le groupe The Clash, par exemple, incorpore des éléments de reggae dans sa musique. Dans les années 1980 se développe le reggae britannique avec des groupes comme UB40 ou Steel pulse qui connaissent un succès international. En Afrique, il a un impact significatif et inspire de nombreux artistes comme Alpha Blondy ou Lucky Dube. Mais il trouve aussi un public fidèle au Brésil ou en Argentine. Aujourd’hui, le reggae continue d’évoluer dans le monde entier.
Les régions françaises regorgent de paysages somptueux, de monuments historiques et de curiosités culturelles et touristiques. Mais aussi de moult lieux de retraites spirituelles. Et si loin de notre folle époque, loin du quotidien et des réseaux sociaux, se trouvait là occasion de se poser, de se nourrir et de se retrouver. Au calme. Le temps d’un week-end, de quelques jours… Ou plus. Fenêtre ouverte sur quelques étapes de sérénité.
L’Abbaye de Lérins (Ile Saint-Honorat, Cannes, Alpes-Maritimes)
Situé en baie de Cannes, ce lieu d’exception est accessible par voie maritime. Véritable oasis de calme et de verdure, il est habité par 21 moines cisterciens qui cultivent leur vignoble et proposent hôtellerie et restauration aux visiteurs. Mais aussi des séjours pour les jeunes qui désirent rejoindre le temps d’un été leur équipe de bénévoles, ou encore des retraites « Désert » de quatre jours, dans le silence, pour se réapproprier le temps et faire le point.
Le pèlerinage de Notre-Dame de Dusenbach, dans un vallon situé entre Ribeauvillé et Sainte-Marie-aux-Mines, remonte à 1204. Le sanctuaire attire pèlerins, touristes et randonneurs. Mais, loin de la foule, les frères capucins proposent restauration et hôtellerie. Un lieu propice à la méditation.
Renseignements : 03 89 73 64 12
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L’Abbaye Notre-Dame (Jouarre, Seine-et-Marne)
Crypte mérovingienne, tour romane, église abbatiale, Jouarre respire quatorze siècles de vie monastique. La communauté de moniales bénédictines propose des séjours de quelques jours ou quelques semaines, rythmés au choix par la prière, le jardinage et/ou les balades. Le silence est de rigueur dans leur maison. De quoi se ressourcer à quelques kilomètres de Paris.
L’Abbaye de Rhuys (Saint-Gildas-de-Rhuys, Morbihan)
Cette ancienne abbaye du VIème siècle est devenue un centre culturel et spirituel, où les sœurs de la Charité de Saint-Louis proposent des séjours. L’église est l’un des plus beaux sanctuaires de l’art roman en Bretagne. A 200 mètres de la côte sauvage, la cure de sérénité est assurée. Entre balades en bord de mer et programme spirituel à la carte.
Chantal Allain enseigne le pilates à Joinville-le-Pont, dans le Val-de-Marne.
Ceinture noire et professeur de karaté, athlète accomplie dans plusieurs disciplines sportives, ancienne de la BAC (1), Chantal Allain, 70 ans, a découvert le pilates et ses bienfaits à l’âge de 65 ans. Aujourd’hui, elle l’enseigne.
Quel a été votre parcours de sportive ?
Le sport, c’est toute ma vie. J’ai commencé par la course à pied. J’ai fait des marathons, mais je n’y trouvais pas vraiment de plaisir. Je me suis donc mise à la marche athlétique jusqu’à aller aux championnats de France enceinte, mais c’était une grosse erreur. Cette discipline oblige à se déhancher, à prendre une posture exigeante pour le corps et le déglingue. J’ai fait aussi beaucoup de musculation et je suis allée jusqu’aux championnats de France de déhanché-couché. Tout comme pour le karaté que je pratiquais depuis longtemps. Sport qui m’a aussi aidée à faire mes preuves quand je suis entrée dans la police et à intégrer la BAC (1). A la BAC, je n’ai ensuite travaillé que la nuit et ai eu pas mal d’accidents lors d’interventions. Ce n’est pas un hasard si je suis aujourd’hui atteinte, entre autres, de polyarthrite et de deux hernies discales.
Comment avez-vous découvert le pilates ?
Il y a cinq ans, j’ai fait un cours de pilates dans une salle de sport pour voir… presqu’en blaguant. Pour moi, le pilates, c’était ennuyeux et pour les mamies. Après ce cours, mes douleurs, particulièrement celles dans le dos, s’étaient vraiment atténuées. Je me suis dit que c’était ce qu’il me fallait. Et j’ai décidé de passer mon diplôme de professeur. Ce qui demande un vrai engagement pendant huit mois à raison de trois cours de pilates par jour. Aujourd’hui, je ne souffre plus du dos.
Quelle différence faites-vous entre le pilates et le yoga ?
Pour le yoga, il faut être très souple et avoir un mental qui permet de s’évader en restant dix minutes dans la même position. Ce n’est pas ce que recherchent la plupart des gens ; ils veulent avant tout s’évader et oublier leur journée, leur travail, leur patron ! Un pilates tonique peut répondre à cette attente. S’il est trop tranquille, leur esprit va partir ailleurs et ce n’est pas le but.
En quoi consiste votre pilates tonique ?
C’est le pilates qu’on m’a enseigné et que j’ai arrangé à ma sauce. Je n’improvise pas ; je prépare mon cours en expérimentant chacune de ses étapes. Je suis un fil que j’ai écrit sur papier et que je consulte pendant le cours, une chronologie des mouvements, comme en karaté. Si je ne sens pas tel muscle qui est censé travailler dans tel mouvement, je change de mouvement. Pendant le cours, j’observe les participants et après, je prends des notes. Cela me permet de revenir au cours suivant sur ce qui n’est pas passé chez certains. Pour moi, il est essentiel de proposer des cours variés pour ne pas qu’ils soient ennuyeux.
Cette discipline s’adresse-t-elle à tout le monde ?
Oui, aux femmes et aux hommes, quel que soit leur âge. Je constate que les femmes sont en majorité à mon cours. Tout simplement parce que le mot pilates rebute souvent les hommes, mais ceux qui viennent restent. Preuve qu’ils y trouvent aussi du positif.
Qu’est-ce que l’on vient chercher dans votre cours ?
Beaucoup viennent pour calmer une douleur dont ils n’arrivent pas à venir à bout. Seulement le pilates apaise, mais ne soigne pas. Par contre, il soigne sans doute la tête.
Qu’est-ce que le pilates apporte au corps ?
Il apprend à mieux comprendre son corps et ses limites. C’est pour cela que je fais mes cours avant de les donner. Je sais où sont mes limites, qui sont certainement plus loin que pour la plupart des participants. Il permet de donner au corps du maintien, une posture. On apprend à respirer, à rentrer son nombril pour se gainer et on va chercher les muscles profonds. On se redresse, on remet ses épaules en place pour ne plus avancer vouté et on quitte peu à peu aussi toutes ces mauvaises positions-croiser ses jambes assis, par exemple- qui nous mettent en tension. Le pilates interroge le regard que nous portons sur notre corps.
… et au mental ?
Pendant un cours de pilates tonique, on ne pense pas. Cela repose. Avec le temps, cela peut aussi permettre de relativiser beaucoup de choses, de mieux gérer ses émotions et de ne plus se faire souffrir dans des situations que l’on ne peut changer. On apprend à mettre de la distance.
Au bout de combien de temps, le pilates fait-il ses effets ?
Si on est assidu aux cours, au bout de six mois, à raison de deux cours par semaine. Trois heures par semaine sont idéales ; cela permet d’ajouter un peu plus de cardio. A condition bien sûr de veiller aussi à son alimentation, entendez ne pas manger n’importe quoi et trop vite. Être en surpoids peut empêcher de prendre du plaisir pendant les cours.
Est-ce une pratique chère ?
Elle peut être chère, qui plus est à Paris. Mais dans un cadre associatif, c’est très abordable. Avec un forfait annuel, le cours revient à trois euros dans mon association.
Si les êtres humains gardent leurs habitudes alimentaires actuelles et croissent, comme les prévisions démographiques le laissent présager, leur avenir et celui de la Terre s’en trouveront en péril, selon différents experts (1). Mais il est encore temps d’agir pour une assiette plus durable et plus équitable.
Pour faire converger les enjeux de santé et d’environnement, le consensus scientifique actuel est notamment d’aller vers une alimentation durable. Soit une alimentation qui permet de nourrir correctement tous les êtres humains, sûre et nutritionnellement adéquate, respectueuse de l’environnement, acceptable culturellement, équitable et accessible économiquement, selon la FAO (2), précise Nicole Darmon, directrice de recherche à l’INRAE (3) et experte en nutrition. C’est dire si la barre est haute.
Inquiétudes pour la sécurité alimentaire
D’après l’ONU, d’ici 2050, la Terre devra nourrir près de 10 milliards de personnes, ce qui équivaut à deux milliards de plus qu’aujourd’hui. La production agricole pourrait donc encore s’intensifier et impacter davantage l’environnement et le climat en plein changement. Cultures et élevages favorisent déjà, en effet, la surconsommation d’eau pour l’irrigation, la pollution des sols et des eaux, la déforestation, la dégradation des écosystèmes, mais aussi les rejets de gaz à effets de serre. Dans un rapport publié en 2019, le GIEC (4) souligne que la production alimentaire est responsable, à elle seule, d’environ 21 à 37% des émissions totales de ces gaz. « Il faudrait les diviser par quatre, pose l’épidémiologiste Emmanuelle Kesse-Guyot, directrice de recherche à l’Inrae. Sans quoi, l’être humain ne pourrait plus que s’alimenter et encore. Plus question pour lui, de se chauffer ou de se déplacer. » La sécurité alimentaire, à savoir la capacité à nourrir tout le monde suffisamment et correctement, serait alors remise en question.
« Nous pouvons changer le contenu de nos assiettes afin de nous garantir une bonne santé et de limiter les impacts négatifs sur notre environnement. »
Inadaptés à une alimentation pléthorique
Autre problème : facteur déterminant pour la santé des populations, l’alimentation est à l’origine d’une véritable pandémie d’obésité et de malnutrition, principalement dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Selon l’ONU, près de 50% de la population mondiale est mal nourrie ; deux milliards de personnes surconsomment des aliments riches en sucre et en graisse et deux milliards sont sous-alimentés.
« En 2000, nous avons pris conscience de la nécessité de mieux nous alimenter et de préserver l’environnement et sommes entrés dans notre cinquième transition alimentaire (5), explique David Val-Laillet, directeur de recherche en neurosciences comportementales et nutrition à l’Inrae. Et de poursuivre : « Nous sommes inadaptés à l’alimentation pléthorique. Notre plaisir prévaut au-delà de nos besoins. » Et tout commence très jeune. « Essentielle pendant la période périnatale de 1000 jours (de la conception à l’âge de deux ans), l’alimentation peut programmer une personne de façon délétère et à vie. Nous voyons d’ailleurs, aujourd’hui, tous les effets de la consommation de produits industriels. Nos études prouvent que l’environnement alimentaire crée l’obésité et l’entretient. Et cela est sans compter les effets de la sédentarité, due aux écrans, sur le poids et la santé. »
« Manger « durable » en 2050 impose des choix individuels et politiques… dès aujourd’hui. »
Moins de malbouffe et de viande : une nécessité
Reste que la manière dont nous produisons pour nous nourrir et dont nous nous alimentons sont des facteurs modifiables. Nous pouvons changer le contenu de nos assiettes afin de nous garantir une bonne santé et de limiter les impacts négatifs sur notre environnement. A quoi pourraient-elles ressembler en 2050 ? Tous les spécialistes de la nutrition en conviennent : elles ne seront pas faites de gélules. Car manger est aussi affaire de culture, de pratiques sociales et de plaisir. Pour évoluer vers une alimentation durable, il s’agirait avant tout d’imaginer des assiettes où n’apparaîtraient plus de produits gras, sucrés, salés et des aliments ultra-transformés issus de l’industrie agroalimentaire (plats préparés, sodas, barres chocolatées…), qui contiennent des additifs pour améliorer leur saveur, leur texture et/ou leur apparence (mais aussi encore souvent de l’huile de palme, symbole d’une planète menacée) et participent à la montée des diabètes, cancers et autres maladies cardio-vasculaires.
« Nous restons des omnivores, rappelle Nicole Darmon. Nous avons vraiment besoin de manger de tout. Mais surtout beaucoup de fruits et de légumes, et moins de produits sucrés et de viande rouge. » Selon une étude du Crédoc en 2018, la consommation de viande a baissé de 12% en dix ans. Une évolution qui s’explique par les discours environnementaux et de santé. La production de viande rouge s’avère, en effet, l’une des activités agricoles les plus polluantes : d’après la FAO, l’élevage émet 14,5% des gaz à effets de serre liés aux activités humaines, dont plus de 60% sont dus à la production de bœuf. Nicole Darmon ajoute qu’« il nous faut aussi plus de féculents, de légumineuses et de produits céréaliers complets. » Car ces aliments permettent un apport satisfaisant en fibres qui favorisent le transit intestinal, aident au contrôle des taux de sucre et de cholestérol sanguins et donc à la prévention de l’obésité et du diabète.
100% bio ?
La chercheuse souligne : «Le manque d’information sur l’alimentation durable a permis à d’autres tendances de s’installer sur le marché, comme le bio ou le local. Toutefois, nous ne sommes pas obligés de manger cher, bio ou local, pour manger équilibré.» Pour manger équilibré, oui, mais pour protéger la planète ?
Pour notre santé et celle de la Terre, l’agriculture bio apparaît comme une piste très positive : elle ne fait pas appel aux pesticides et ses produits commencent à montrer leurs bénéfices pour la santé. Le hic est qu’elle produit entre 8 et 25% moins que l’agriculture conventionnelle. Pour manger 100% bio, il faudrait augmenter sa part dans les terres cultivées… et donc accroître la déforestation. Dès lors, opter pour une assiette 100% végétale supposera, pour préserver l’environnement, consommer davantage de fruits et de légumes de saison, qui ne sont pas cultivés en serres, et d’aliments de producteurs locaux, qui ne sont pas transportés sur une longue distance. Manger «durable» en 2050 impose ainsi des choix individuels et politiques…dès aujourd’hui. «S’il y a réduction des importations, conclut Emmanuelle Kesse-Guyot, il faut décider de ce que l’on plante et pour qui. Les animaux ou les hommes ?»
(1) Rapport d’un collectif de 37 experts de 16 pays, coréalisé par la revue médicale The Lancet et l’ONG Fondation EAT, 2019.
(2) Food and Agriculture Organisation of the United Nations (en français : Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).
(3) Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, issu de la fusion de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et de l’Institut national de recherche en sciences et technologie pour l’environnement et l’agriculture (Irstea).
(4) Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.
(5) L’espèce hnnu quatre transitions alimentaires : une, il y a plus de 500 000 ans, avec la maîtrise du feu ; une, il y a 12 000 ans, avec le développement de l’agriculture et de l’élevage ; une autre, vers 3500 avant notre ère, avec l’apparition des cités-Etats et de la division du travail ; et, une quatrième, au XXème siècle, avec la révolution industrielle.
François Mariotti, professeur de Nutrition
« La végétalisation est une lame de fond »
Professeur de nutrition à AgroParisTech, François Mariotti explique le nécessaire passage au vert de nos assiettes pour préserver santé des populations et environnement… mais un vert à fort apport en sources protéiques naturelles.
Devenir tous végétariens, est-ce une solution ? François Mariotti : Le végétarisme est une position radicale qui se respecte. Il est basé sur le principe d’un régime qui exclut certains aliments telle la viande. Il sera très difficile d’aller jusqu’à un végétarisme général car nous vivons aussi selon des critères sociaux-culturels. Pourtant, réduire notre consommation de viande est une révolution qu’il nous faut mener dans un objectif de durabilité.
Quelle est la tendance actuelle en France ? F.M : Il ne semble pas qu’il y ait bien plus de végétariens qu’il y a dix ans et en tout cas il y en a quatre fois moins que dans les pays anglosaxons. En revanche, la consommation de produits «végétariens» augmente. Preuve que les Français sont plus éveillés à leur santé et au bien-être et tendent à réduire leur consommation de viande. Pour la remplacer, ils ont maintenant recours à une offre facile d’accès au supermarché à base de soja, par exemple. Le régime flexitarien est le plus courant : la personne ne consomme de la viande qu’une fois par semaine en moyenne à certaines occasions, comme au restaurant. La végétalisation est une lame de fond. Elle va croître encore, portée par les jeunes générations.
« Réduire notre consommation de viande est une révolution qu’il nous faut mener dans un objectif de durabilité. »
Si être végétarien ou végane apparaît a priori moins nocif pour la planète, est-ce bon pour notre santé ? F.M: L’adulte qui ne mange pas de viande et de poisson peut manquer de zinc et/ou de fer -des carences qui peuvent se corriger rapidement- mais les végétariens ont aussi moins de risques de cancer et de maladie cardiovasculaire sur le long terme. En revanche, le végétalien ou végane ne mange rien en provenance de l’animal. Il a donc des apports généralement insuffisants en d’autres nutriments comme la vitamine B12, le calcium et l’iode. Il a impérativement besoin d’une supplémentation en vitamine B12 pour éviter une maladie carentielle.
Quelle solution alimentaire préconisez-vous ? F.M : La tendance est à diminuer la consommation de viande de ruminants, ce qui ajoute les avantages santé aux avantages environnementaux, et donc d’aller vers la végétalisation de notre alimentation, mais en veillant à l’apport en sources protéiques, et plus particulièrement en sources protéiques riches en protéines pour les personnes fragiles âgées de plus de 65 ans. Manger plus de produits céréaliers complets, plus de légumineuses, plus de fruits à coques et de graines, qui nous apportent des protéines alternatives, végétales naturelles, avec un ensemble de nutriments favorables à la santé. Il s’agit aussi de prendre le temps de choisir nos produits, de regarder la liste des ingrédients qui les composent et de cuisiner ce que nous mangeons. Car, si on achète une galette végétale pour remplacer une portion de steak, encore faut-il qu’elle ne soit pas plus riche en lipides, en sel et en sucres et moins riche en nutriments intéressants. Même chose pour certains desserts lactés au soja, souvent plus sucrés qu’un simple yaourt nature.
Repères clés* d’une alimentation équilibrée
Fruits et légumes Au moins cinq portions de 80 à 100g par jour, quel que soit le mode de préparation (crus, cuits, frais, surgelés ou en conserve). Limiter la consommation sous forme de jus de fruits et de fruits secs.
Fruits à coque sans sel ajouté (amandes, noix, noisettes, pistaches…) Une petite poignée par jour pour les personnes ne présentant pas d’allergie à ces aliments.
Légumineuses (lentilles, fèves, pois chiches, haricots secs…) Au moins deux fois par semaine. Elles représentent d’excellentes sources de fibres et de protéines, pouvant aider à limiter les apports de viande.
Produits céréaliers Tous les jours, en privilégiant les produits complets et peu raffinés (riz, pâtes ou pain complets…)
Produits laitiers Deux portions par jour. Une portion correspond à 150 ml de lait, 125 g de yahourt ou 30 g de fromage.
Viande Privilégier la volaille et limiter la consommation de viande rouge (bœuf, porc, veau, mouton, chèvre, cheval, sanglier, biche) à 500 g par semaine.
Poissons et fruits de mer Deux portions par semaine, dont une de poisson gras (sardine, maquereau, thon, saumon).Varier les espèces et lieux d’approvisionnement pour limiter l’exposition aux contaminants.
Charcuterie Limiter la consommation à 150g par semaine maximum.
Matières grasses ajoutées A limiter. Privilégier les matières grasses végétales, et notamment l’huile de colza, de noix et d’olive..
Produits sucrés A limiter. En particulier les produits à la fois sucrés et gras, comme de nombreuses « céréales de petit-déjeuner » ou desserts (pâtisseries, desserts lactés, crèmes glacées).
Boisson Favoriser l’eau et limiter les boissons sucrées ou édulcorées, ainsi que l’alcool. Le thé, le café et les infusions peuvent contribuer à l’apport en eau s’ils ne sont pas sucrés.
Sel A réduire. Attention au sel « caché » dans le pain, les plats préparés, les charcuteries, les biscuits apéritifs… Concernant le sel « ajouté », mieux vaut privilégier le sel iodé.
Activité physique Au moins 30 minutes par jour, cinq jours par semaine. Il est recommandé de pratiquer différents types d’activité physique pour développer l’endurance, le renforcement musculaire, la souplesse et l’équilibre.
Les jeunes sont accros aux vidéos de leurs influenceurs et youtubeurs préférés et veulent leur ressembler en tout. A tel point qu’ils se tournent aujourd’hui de plus en plus vers la médecine et la chirurgie esthétique. Pour changer leur image. Pour être beau sur un selfie. Pour ne pas vieillir, avant même d’avoir pris une ride. Au risque de se perdre.
Selon une étude de l’IMCAS (1), depuis 2019, les jeunes âgés de 18 à 34 ans font plus de chirurgie esthétique que les 50-60 ans. Si les filles restent majoritaires, les garçons y ont aussi de plus en plus recours. « Oui, cette tranche d’âge consomme plus de chirurgie esthétique, » constate le Dr Thierry Ktorza, chirurgien esthétique à Paris. Mais ce professionnel expérimenté ose la nuance : « Les jeunes femmes font aussi appel à la médecine esthétique, qui elle, est privilégiée par leurs aînées. Elles consomment plus qu’avant, parce l’offre de soins est plus vaste et parce qu’elles sont influencées par les réseaux sociaux. »
Les réseaux pour miroir
Youtube, Snapchat, Instagram et Tik Tok sont les réseaux les plus populaires chez les 16-24 ans et demeurent leurs principales sources d’information. Ils s’y comparent à leurs pairs, mais aussi aux influenceurs et aux stars, chanteurs ou acteurs. « Insta » -comprenez Instagram- permet en effet de partager photos et vidéos et de laisser des commentaires, mais il entretient surtout le culte de la personnalité, car il y est possible d’embellir et de sublimer ses photos, à grands renforts de filtres. Ce que fait aussi le réseau Tik Tok, qui a sorti au printemps dernier l’outil « bold glamour » (2). Un filtre impressionnant, même pour les plus grands opposants à la dictature de l’apparence. C’est aussi sur Instagram qu’est née la « fitspiration », une tendance qui rassemble des milliers de personnes, souvent amateurs, qui se mettent en scène en prônant un mode de vie sain dans un corps mince et musclé, combinant sport et alimentation équilibrée. Aux côtés des stars, des youtubeuses, inconnues au départ, affichent leur plastique et vantent leur expérience, souvent de perte de poids, de produits et de vêtements pour glaner des « like » et des abonnés qui leur permettront d’être approchées par des marques et donc de faire des profits.
Du dermatologue au diététicien en passant par le chirurgien esthétique, les professionnels témoignent de l’influence des youtubeurs et des instagrameurs sur les goûts des jeunes d’aujourd’hui. Oui, ces derniers traitent maintenant leur acné rosacée sans broncher pour avoir une belle peau à l’écran mais, en plus, ils chassent de plus en plus tôt une potentielle ride du lion qui apparaîtrait quand ils froncent les sourcils. Un phénomène qui concerne là aussi filles et garçons, même si ceux-ci investissent, surtout, et de plus en plus tôt, dans la greffe de cheveux. Tous veulent être parfaits et, pour y arriver, passer par la chirurgie et la médecine esthétiques est devenu banal. Comme pour leurs modèles dont on sait que l’image est filtrée et qu’ils ont eu souvent recours à ces soins, puisque certains s’en vantent en ligne à l’envi. « Dès que les premières rides apparaissent sur le front, les jeunes femmes sont demandeuses, » confirme le Dr Ktorza. « Je fais couramment des injections de botox à des personnes très jeunes, en adaptant bien sûr les doses. »
Le gommage de la différence
Si le corps mince, version brindille, était prisé depuis les années 1960, l’influenceuse américaine Kim Kardashian -qui n’a jamais caché son recours à la chirurgie- a développé de nouvelles normes avec un visage et un corps très codifiés. Son physique est dit « en sablier » : une poitrine et un fessier volumineux, mais une taille fine, avec un petit nez, des lèvres pulpeuses… Le problème est qu’il n’est atteignable qu’en passant par le bistouri.
Et, effet secondaire, dans les cabinets, ses fans prisent aujourd’hui le repulpage de la bouche et, de plus en plus, le lifting de la lèvre supérieure. Cette technique permet à celles qui ont des lèvres fines, un peu pincées, de gagner en « lèvre rouge », vulgarisée sur les réseaux. Elles réclament la rhinoplastie pour affiner le nez ou gommer une bosse, tout comme les prothèses mammaires pour augmenter leur poitrine. Quant à l’augmentation des fesses par lipofilling (injection de graisse récupérée sur la personne), elle arrive en tête de leur désiderata.
« La proposition de loi, qui vise à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, a été adoptée le 1er juin 2023 en un temps record et à l’unanimité par le Parlement. Entre autres, elle interdit aux influenceurs la promotion d’« actes de chirurgie esthétique ». Depuis 2017, beaucoup d’entre eux, notamment ceux issus de la téléréalité, faisaient/font régulièrement de la publicité pour des chirurgiens, des cliniques, voire même des injecteurs illégaux, non-médecins, de botox et d’acide hyaluronique (vendus en pharmacie ou en ligne). »
Comme l’explique le psychologue et psychanalyste Michaël Stora (lire son entretien page 8), « l’adolescence est une période de grande fragilité, surtout concernant l’image de soi ; celle-ci se construit dans le regard de ses pairs, et non plus de ses parents. Les réseaux sociaux facilitent et amplifient le phénomène de la quête de popularité. » Selon lui, l’essor d’Instagram gomme la richesse propre à la différence. Et les réseaux ne font que prôner le « aller bien et être performant » de la culture américaine, où tout doit être « amazing » (3). A tel point que les jeunes filles/femmes sont épuisées à force de vouloir être à l’image de leurs modèles (4). « Elles portent souvent beaucoup de mal-être et me demandent ce qu’elles pourraient faire pour avoir l’air moins fatiguées, » souligne le Dr Ktorza. Tout comme les influenceuses sont épuisées de devoir toujours être au top. On ne compte plus le nombre d’entre elles qui décèdent aux quatre coins du monde. « La réalité de certaines de mes patientes est bien loin de ce qu’elles font croire en postant des photos ou des vidéos sur les réseaux. Elles logeraient dans les plus grands hôtels, passeraient leur temps au soleil, au bord de la piscine, avec leur fiancé, lui aussi très beau, feraient la fête en continu et rouleraient en grosse cylindrée décapotable… Mais ce n’est pas vrai. »
« Dans une tribune publiée le 29 mars 2023 dans Le Parisien, 200 chirurgiens esthétiques demandent aux autorités d’interdire la vente libre d’acide hyaluronique. L’utilisation de ce produit, disponible sans ordonnance, par des injecteurs illégaux, non-médecins, provoque régulièrement des complications « gravissimes » (gangrènes, septicémies…), souvent irréversibles. Les victimes sont parfois défigurées et brisées psychologiquement. »
Les dangers du tourisme médical
Le phénomène interroge encore et encore. Et la question se repose : pourquoi ces jeunes ont-ils tant besoin de se « remodeler » ? Le Dr Ktorza se prononce : « Notre société est malade et amplifie leur complexe. Les jeunes vivent dans un monde de plus en plus angoissant et les réseaux leur montrent des choses merveilleuses. Ils se retrouvent coincés entre leurs angoisses et un monde irréel. La chirurgie esthétique est peut-être un moyen pour eux de s’en sortir quand même, de trouver une place. »
Ce médecin insiste sur l’importance de l’aspect psychologique de son métier -il invite, entre autres, toutes ses patientes mineures à voir un psy au préalable-, et sonne l’alarme sur le danger de nouvelles pratiques de la chirurgie esthétique : «Les réseaux font consommer de façon internationale. De plus en plus de patientes partent à l’étranger, plus particulièrement en Turquie. Le package chirurgie, hôtel et limousine est vendu très agressivement sur les réseaux. Une fois arrivées là-bas, elles sont opérées souvent de la tête aux pieds, sans même avoir été auscultées ; elles peuvent se faire faire d’un seul coup rhinoplastie, repulpage des lèvres et liposuccion. En dépit de toute déontologie et de toute considération sécuritaire. Certes, elles paient les interventions environ 30% moins cher qu’en France, mais la prise en charge est vraiment loin d’être la même. Qui plus est en soins post-opératoires. Résultat, elles déclarent des complications -qui n’apparaissent qu’au bout d’une semaine ou deux après l’intervention- une fois revenues en France et se font prendre en charge en urgence à l’hôpital. »
« Seul un médecin a le droit de réaliser des injections d’acide hyaluronique ou de botox. »
(1) IMCAS (International Master Course on Aging Science) est un congrès international centré sur les avancées médicales en dermatologie et chirurgie plastique.
(2) Le « bold glamour », le « glamour osé », propose à son utilisateur sa version « embellie ».
(3) En français : surprenant.
(4) En 2019, la chercheuse Jennifer S. Mills a montré que les jeunes de 18 à 27 ans montraient un sentiment de déprime, de l’anxiété et une image de soi négative quand elles publiaient un selfie sans avoir pu retoucher leur photo.
Michaël Stora, psychologue et psychanalyste
« Correspondre à l’image d’un soi amélioré, idéalisé »
Les jeunes femmes de 18 à 34 ans font plus de chirurgie esthétique que les 50-60 ans. Ce phénomène peut-il s’expliquer par leur fréquentation des réseaux sociaux ?
Michaël Stora : Un lien de cause à effet peut en effet être fait entre les deux. Qui plus est si on s’intéresse à Instagram et à ses filtres. La vague a commencé aux Etats-Unis il y a environ trois ans. Les jeunes femmes allaient voir leur médecin ou un chirurgien esthétique en disant : voilà, j’aimerais ressembler à moi filtrée. Les premiers cas de dysmorphophobie (1) étaient nés.
Comment en est-on arrivés là ?
M.S : Certains réseaux sociaux, et plus précisément Instagram, ont une incidence sur la construction de l’image de soi des adolescents. Celle-là même qui se faisait avant dans les cours d’école, dans les soirées, dans la rue… se nourrit aussi aujourd’hui sur les réseaux sociaux qui renvoient l’idée qu’il est possible de correspondre à l’image d’un soi amélioré, idéalisé. Une philosophie sans doute tirée du modèle de la culture nord californienne dans laquelle on est beau, on consomme, on est heureux.
Via les réseaux, l’adolescente se retrouve confrontée à des influenceuses, souvent à peine plus âgées qu’elle, qui jouent l’illusion de la proximité. Un autre miroir que celui devant lequel elle passe déjà beaucoup de temps à se regarder. Le narcissisme est très présent. La jeune fille/femme peut donc avoir envie de se (re)modeler pour atteindre un moi idéal.
Que permettent les filtres aujourd’hui?
M.S : Un des filtres à succès propose un visage très poupin, de grands yeux et une bouche pulpeuse. Quand on met ce filtre à 25 ans, on ressemble à une petite fille de cinq ou six ans hypersexualisée. C’est comme si cela venait révéler qu’il faut qu’il y ait une régression à un jeune âge pour que la jeune femme se sente éternellement belle. Comme dans les yeux de sa mère quand elle était petite. Par peur de vieillir ? De devenir adulte dans un monde anxiogène?
Et puis, la jeune femme va poster son image idéale sur les réseaux, une image qui ressemble à celle de beaucoup d’autres. Comme une clone. Comme si sans cela, elle n’existait pas. Une dérive inquiétante que je dénonce dans mon dernier ouvrage (2).
Quel impact a cette image sur notre vie psychique ?
M.S : Je me demande si elle n’évacue pas notre capacité à penser… D’autant plus qu’en parallèle, les parents n’ont jamais autant pris de photos de leurs enfants, qui plus est pour les poster sur les réseaux sociaux. Ils les exposent aux yeux de tous et les réduisent ainsi à une image qui restera éternellement. En fait, leurs « beaux » enfants deviennent leurs prolongations phalliques ; ils s’en servent pour se représenter. Les photos d’enfants sont les plus nombreuses avec celles des chatons. Ce désir du beau et du mignon est comme un antidépresseur, un moyen de se sentir rassurés, moins seuls et plus beaux.
Une façon pour le parent de se faire valoir ?
M.S : Oui, l’enfant est présenté comme un trophée. La perversion de Facebook et d’autres réseaux a activé la comparaison de soi à l’autre avec des phénomènes d’envie voire de jalousie qui peuvent mener à la violence. Sans compter que l’enfant que l’on filme peut aussi rapporter de l’argent à ses parents. Une forme encore de la perversion.
(1) La dysmorphophobie est liée au narcissisme. On peut se sentir persécuté par son double. Une sorte de paranoïa interne s’installe et le corps devient alors un corps étranger.
(2) Réseaux (a)sociaux : découvrez le côté obscur des algorithmes, Larousse, 2021.
L’addiction au sport est reconnue comme maladie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 2011. Et pourtant, ce besoin de pratiquer une activité physique avec excès reste encore peu connu. De 10 à 15% des sportifs pratiquant intensément leur(s) discipline(s) seraient touchés.
En 2018, le champion du monde de football Bixente Lizarazu déclarait être atteint de bigorexie et le grand public découvrait alors l’existence et la signification de ce mot, composé de big (gros en anglais) et orexis (appétit en grec). La dépendance au sport prend aussi les dénominations de dépendance à l’effort ou dépendance à l’activité physique. Elle entre dans la famille des « addictions sans substance. » Mais elle reste parfois controversée par les entraîneurs -elle est très fréquente chez les sportifs de haut niveau- quant à sa réalité ou quant à son aspect pathologique, car certains la définissent encore comme une addiction positive comparée aux addictions négatives (alcool, drogues…). Une chose est sûre, elle appartient au groupe des addictions comportementales, comme l’addiction aux jeux vidéos ou au travail.
Extase et performances
Aujourd’hui, le Centre d’études et de recherche en psychopathologie de Toulouse la définit comme « un besoin irrépressible et compulsif de pratiquer régulièrement et intensivement une ou plusieurs activités sportives en vue d’obtenir des gratifications immédiates et ce malgré des conséquences négatives à long terme sur la santé physique, psychologique et sociale. » Le Dr Dan Véléa, psychiatre-addictologue à Paris, souligne qu’elle est : « une recherche de sensations de plaisir, de désinhibition à travers la pratique sportive, qui aboutit à l’installation d’un besoin impérieux et en constante augmentation, avec en cas d’arrêts forcés de la pratique (blessures, problème d’emploi du temps), la manifestation de signes de sevrage physiques et psychologiques plus ou moins intenses. »
Dans les années 1980, le psychiatre américain William Glasser a créé et développé le concept d’addiction positive (1) après avoir observé sur une longue durée des athlètes de haut niveau pratiquant régulièrement un exercice physique, mais aussi des coureurs occasionnels. Selon lui, la poursuite d’une activité physique (initialement la course à pied) devient addiction par dépassement d’un effet seuil d’ennui, de fatigue, de lassitude. Parmi les facteurs qui renforcent le côté addictogène de la pratique sportive, on rencontre la libération d’endorphines. Celles-ci sont souvent mises en avant pour tenir le rôle chimique de la dépendance. Opiacées endogènes produites par le cerveau lors d’un exercice musculaire, elles auraient des effets entraînant l’ « extase du sportif » avec une limitation de la douleur, une action anxiolytique et euphorisante. D’autant plus quand le sport est pratiqué intensément et à haute dose. Les marathoniens et les coureurs de fond témoignent souvent de cet état de grâce.
Certaines personnes, plus sensibles que d’autres à ces effets agréables et stimulants, n’auraient de cesse que de rechercher des situations pour stimuler leurs neurones dopanergiques, situés dans une zone spécifique du cerveau associée à des effets agréables et stimulants.
Travailler le corps pour apaiser l’âme
Le facteur de l’augmentation de l’estime de soi participe lui aussi à l’addiction. L’addicté prend conscience de ses capacités physiques et d’endurance et constate les modifications de son corps. Il peut ainsi soulager son stress, son anxiété et/ou une douleur d’ordre psychologique liée à un événement, présent ou passé.
Un des signes de la bigorexie est que la personne en souffrance développe une véritable obsession pour son physique, son poids, ses performances. Et sa vie quotidienne subit alors moult changements. Tout finit par tourner autour de sa pratique sportive : son mode de vie, ses relations sociales, ses loisirs, son alimentation, ses vêtements… Il fréquente des sportifs et va à des manifestations sportives (compétitions, salons, etc.) Le développement du concept d’addiction à l’exercice se situe aussi dans un contexte culturel de l’image corporelle et du culte de la performance. Les Anglo-Saxons décrivent même un complexe d’Adonis (2) ; le sport intensif est alors un moyen d’atteindre un corps parfait pour augmenter son estime de soi. Et pour cela, l’addicté peut prendre des risques inconsidérés et repousser toujours plus ses limites. Il peut ainsi subir des blessures graves (fractures de fatigue, lésions musculaires…) qu’il n’hésitera pas à nier pour continuer à pratiquer son sport ; il fera avec. Il faut savoir que lorsque la personne est privée d’activité physique, elle présente des symptômes de sevrage comme la tristesse, l’irritabilité, mais aussi la culpabilité… Qu’elle ne veut pas vivre ou revivre. Le bigorexique dit ne pas pouvoir arrêter le sport, ritualise son entraînement et répète de façon obsessionnelle ses gestes.
« Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre. »
Pierre de Coubertin, fondateur des Jeux Olympiques modernes.
Le Dr Véléa décrit une maladie multifactorielle puisque les individus touchés présentent souvent « des troubles narcissiques, une mauvaise estime de soi, un besoin permanent de dépassement et de challenges. Pour certains, comme toute autre addiction, la bigorexie représente une forme d’autothérapie face au mal de vivre ressenti… »
Cette addiction, une fois diagnostiquée par un médecin, se soigne comme toutes les autres addictions comportementales en suivant une thérapie avec un psychiatre-addictologue ou un thérapeute qu’il soit spécialiste des thérapies cognitives et comportementales ou non. En sachant que les sportifs à la recherche de la performance ou d’un physique idéal seraient plus à risque de développer une bigorexie, tout comme ceux qui ont besoin de combler des vides affectifs ou de lutter contre un niveau de stress important, il est aussi intéressant de souligner qu’un travail analytique, un coaching pour rééquilibrer le projet de vie personnelle et professionnelle et/ou des séances de relaxation peuvent aider les patients à s’en sortir.
(1) Positive addiction, Harper Collins, 1985.
(2) Le complexe d’Adonis, Harrison Pope, 2000.
Servane Heudiard pratique principalement le vélo et l’aviron, des sports d’extérieur. Pour le cardio et l’euphorie.
« Une passion absolue et dévorante »
Servane Heudiard, 50 ans, traductrice, est dépendante au sport qu’elle pratique cinq heures par jour, sept jours sur sept. Elle a écrit un livre (1) pour témoigner et aider ainsi ceux qui ne sauraient pas encore qu’ils sont atteints de sa pathologie.
Que diriez-vous de votre relation au sport ?
Servane Heudiard : C’est une addiction. Oui, c’est le mot exact. Le sport m’apporte du plaisir, mais j’y suis dépendante. Il est un anxiolytique pour moi, un moyen de me concentrer pour le boulot, qui me permet de m’évader et de régénérer mes neurones, mais aussi de socialiser. Je travaille chez moi et, sinon, je ne vois personne.
Avez-vous toujours eu cette relation au sport ?
S.H. : Oui, mais moins marquée qu’aujourd’hui. Le sport a toujours été dans ma vie. Mes parents étaient très sportifs et j’ai été habituée à les suivre dès toute petite pour faire du vélo, pour marcher, pour faire du ski ; j’ai aussi fait de l’équitation. Je n’ai jamais passé un mercredi devant la télé. Le sport a été aussi une échappatoire au regard des autres.
Pourquoi aviez-vous besoin de fuir le regard des autres ?
S.H. : Mon père était prof et ma mère institutrice. Quand j’étais enfant, ils ont décidé de quitter la Normandie pour s’installer dans un petit village dans les Vosges où je ne connaissais personne. Dès le départ, je n’ai pas su si les gens venaient vers moi pour moi ou parce que j’étais la fille des enseignants et qu’ils voulaient se faire bien voir. Le seul endroit où je me sentais bien, c’était au club d’équitation parce que j’y fréquentais des filles qui n’étaient pas de mon village.
Et aujourd’hui ?
S.H. : Le sport, c’est le seul domaine dans lequel je n’ai pas peur du regard des autres. J’ai quand même un certain niveau maintenant. Je peux donc être égale à certains et même supérieure à d’autres. C’est ce que je vais chercher dans le sport.
Quand avez-vous su que vous étiez dépendante au sport ?
S.H. : J’ai découvert que j’étais dépendante au sport en entrant dans la vie active. J’en ai entendu parler à la radio. Pour moi, la dépendance jusque-là ne pouvait être liée qu’à l’alcool, la drogue ou la cigarette. Cela m’a fait du bien d’entendre que la dépendance au sport existait. Cela m’a aidée. Aujourd’hui encore, hormis Lizarazu, peu de sportifs de haut niveau en parlent…
Quelle est la réalité de votre dépendance au sport ?
S.H. : C’est simple, cela veut dire que je ne peux pas passer une journée sans faire de sport. Si j’en suis privée, j’ai tous les symptômes d’une « addict » privée de son alcool ou de sa cigarette. Je peux montrer de l’agressivité et je ressens un vrai mal-être.
Si j’en suis privée longtemps, comme quand j’ai été accidentée, cela devient un malaise total. Je ne veux plus voir personne, je ne supporte plus rien. Mon état nerveux est sans doute proche de celui des personnes qui font une cure de sevrage. C’est vraiment les mêmes mots. Quand je rentre de deux heures de sport, je me dis : ça y est, j’ai eu ma dose, je peux rentrer.
Je suis aussi dépendante au grand air. Quand je fais deux heures de rameur ou de vélo chez moi, cela ne me suffit pas. Oui, je suis crevée physiquement, mais je ne suis pas détendue parce qu’il me manque alors l’euphorie.
Idem à l’inverse, si je fais deux ou trois heures de marche en extérieur, je ne me dépense pas assez ; il me manque le cardio. En fait, il me faut le défoulement et l’extérieur.
Qu’est-ce que ce « régime » vous oblige à faire ou à ne pas faire ?
S.H. : J’ai très tôt décidé de travailler exclusivement en free lance ; avoir un emploi salarié voudrait dire aller sur site au moins de temps en temps, prendre les transports en commun. Pas possible. Je suis aussi un peu claustrophobe et agoraphobe. Je ne vais pas au resto ou au ciné, ça ne m’intéresse pas. Et je gère mes rendez-vous en fonction de mes créneaux sportifs. Quand on a des enfants, on a des impératifs. Moi qui n’en ai pas, je me dis que je gère mon sport. Ce n’est pas une contrainte énorme.
La place du sport dans votre vie a-t-elle évolué ces dernières années ?
S.H. : Oui, je suis passée de 6h30 à 5 h par jour, sept jours sur sept. Le sport est toujours aussi primordial, mais mon dernier accident de vélo en 2018 m’a fait réfléchir. J’ai glissé sur une flaque d’essence sur la chaussée et j’ai subi une double fracture du fémur. J’ai beaucoup souffert et physiquement et moralement. Aujourd’hui, je suis plus raisonnable.
Avant cet accident, je sortais malgré le mauvais temps, malgré la fatigue. Sinon, je me sentais lâche, coupable et mauviette. Surtout si je savais que des copains étaient sortis quand même. Je doutais trop. Ne pas avoir confiance en soi, c’est une horreur. Aujourd’hui quand je sais négocier avec moi-même, cela me rend fière.
Quels sont vos sports de prédilection ?
S.H. : L’aviron qui est une vraie passion et le vélo, parce qu’il m’offre une vraie liberté. J’ai passé mon permis, mais je n’ai pas de voiture et le vélo est aussi mon moyen de locomotion. Je pars quand je veux, je roule seule ou avec les autres. Aujourd’hui, j’ai 50 ans, je sais que je récupère moins vite et que je suis moins souple. Je dois faire gaffe. J’essaie aussi de marcher plus, parce que la marche est meilleure pour les os que le vélo.
Quel conseil donneriez-vous à nos lecteurs ?
S.H. : Le sport, il faut en faire tout en trouvant la bonne mesure.
(1) Le sport, ma prison sans barreaux – Témoignage d’une sport-addict, Editions Böld, 2021
Depuis l’affaire Palmade, les addictions et leurs conséquences dans l’espace public et privé font la une des médias. Mais si les drogues les plus courantes s’appellent aujourd’hui alcool, tabac, cannabis ou cocaïne, les médicaments peuvent aussi engendrer une dépendance et être détournés de leur usage prescrit. Même chez les jeunes.
Les traitements dits à risque en termes d’addiction sont ceux liés à des médicaments psychoactifs qui agissent sur l’activité cérébrale et mentale ; ils sont utilisés pour traiter des troubles psychiques.
L’usage d’antalgiques opiacés, prescrits pour lutter contre la douleur, peut aussi créer de la dépendance. C’est ce qui explique, par exemple, l’arrêté du 12 juillet 2017 interdisant la vente de codéine sans ordonnance.
Comme pour n’importe quelle autre addiction, il existe une dépendance physique et psychique aux médicaments. La dépendance physique tient surtout de la tolérance croissante du corps, qui implique une consommation de plus en plus importante pour ressentir les effets de la substance.
La dépendance psychique, elle, tient dans le plaisir ressenti par la prise de certains médicaments qui ont un effet euphorisant, tranquillisant ou qui diminuent la fatigue. C’est là la raison première de l’usage récréatif détourné, sans prescription médicale et sans suivi, de certains traitements. Ces effets sont souvent recherchés par des personnes dépendantes à d’autres substances, lorsque ces dernières ne sont pas disponibles. L’usage des médicaments psychoactifs est alors détourné du cadre d’utilisation prévu par leur autorisation de mise sur le marché.
Dans la majorité des cas, les comportements addictifs des adolescents vis-à-vis des substances médicamenteuses commencent par la prise de médicaments qui ne leur sont pas destinés. Ils ont pu y avoir accès car ces médicaments sont disponibles dans leur entourage domestique ou social.
Les familles de médicaments à risque de dépendance et de détournement
Les benzodiazépines
Ils font partie des traitements les plus prescrits en France, notamment pour traiter l’anxiété, le stress, l’insomnie, les convulsions. Pour limiter un risque d’accoutumance qui pourrait conduire à une augmentation des doses et une dépendance, la durée maximale de prise de benzodiazépines ne doit pas dépasser quelques semaines. La dépendance peut d’ailleurs résulter d’une démarche volontaire, pour augmenter les effets thérapeutiques, comme cela peut être le cas notamment dans le traitement de l’anxiété.
En cas de dépendance ou d’intoxication chronique aux benzodiazépines, un état de confusion mentale et de somnolence diurne s’installe fréquemment. C’est alors un signe d’alerte, particulièrement chez l’adolescent, surtout lorsqu’un changement comportemental social y est associé.
Les opioïdes
Dérivés de l’opium, certains sont utilisés en thérapeutique comme puissants antidouleurs (morphine, fentanyl, codéine, etc.) D’autres, comme l’héroïne, sont issus de productions illégales, recherchés pour leur forte sensation d’euphorie et de plaisir qui les rendent très rapidement addictifs.
Lorsqu’ils sont utilisés dans le cadre thérapeutique, les opioïdes présentent un risque de dépendance si l’utilisation du médicament n’est pas encadrée.
Le fentanyl, 100 fois plus puissant que la morphine, est un médicament utilisé uniquement contre les douleurs intenses et rebelles, et sur de courtes périodes. Or, comme d’autres opioïdes, il se trouve aussi dans la rue où il est issu de productions illégales. Son coût étant plus abordable que l’héroïne, il est vendu sous forme de poudre qui peut être mélangée à d’autres drogues, également en poudre, comme l’héroïne et la cocaïne. Il peut aussi être sniffé, inhalé ou injecté.
Les amphétamines et leurs dérivés
Après avoir été longtemps utilisées comme coupe-faim ou comme stimulants psychiques, les amphétamines ne sont actuellement quasiment plus utilisées sous un mode thérapeutique.
Comme le fentanyl, elles ont également été produites pour les marchés de la drogue, où on les retrouve encore en grandes quantités, souvent associées à la cocaïne. Elles sont caractérisées par leur goût très amer. L’ecstasy, dont le principe est la MDMA (méthylènedioxyméthamphétamine), est la substance la plus répandue. Elle est vendue sous forme de comprimés, poudre, gélules, etc. Elle est souvent consommée avec de l’alcool pour en augmenter les effets. En France, on relève 400 000 usagers de MDMA/ecstasy dans l’année.
Les anesthésiques
La kétamine et le GHB (gamma hydroxy butyrate) sont de puissants anesthésiques utilisés à l’hôpital. La kétamine est également très utilisée en médecine vétérinaire, qui représente une source importante d’approvisionnement illicite. Le GHB peut, en plus, être utilisé contre une forme particulière de maladie du sommeil (narcolepsie).
Dans le milieu médical, ces deux médicaments sont très difficiles à obtenir car leur usage est très encadré. Ils sont pourtant également produits dans un cadre illégal et vendus sur le marché de la drogue.
La kétamine est recherchée pour ses effets euphorisants plus puissants que la MDMA. Le GHB l’est plutôt pour un usage malveillant car il est insipide et provoque une amnésie. Mélangé à une boisson, il constitue ce qui est communément appelé la « drogue du viol » ; la victime ne garde aucun souvenir de ce qu’il s’est passé.
Dr Bernard Basset,
Président d’Addictions France (1)
« Donner aux jeunes des compétences psychosociales pour résister aux sollicitations »
Quelle est la situation des jeunes en matière d’addictions ? Dans nos centres, nous faisons le constat qu’en matière de drogues illicites, les jeunes consomment essentiellement du cannabis, puis vient la cocaïne. Et, en milieu festif, ils peuvent prendre des drogues de synthèse, mais aussi des médicaments détournés, comme le GHB. Appelé aussi drogue du viol, il peut être utilisé pour soumettre chimiquement.
La consommation de médicaments détournés est-elle en hausse ? Je ne dirais pas ça. En règle générale aujourd’hui, les consommations de produits psychoactifs sont des polyconsommations. Ceux qui essaient tout sont susceptibles de tout associer. Les médicaments sont une possibilité. Si les jeunes goûtent par exemple au cannabis ou à la cocaïne, ils peuvent aussi consommer des médicaments.
Comment certains jeunes deviennent-ils dépendants à ces médicaments ? Comme à d’autres substances. C’est le même mécanisme que pour les autres drogues. Si un jeune consomme régulièrement des médicaments psychoactifs de type valium, par exemple, il aura tendance à augmenter les doses pour retrouver l’effet du début et il aura du mal à s’arrêter.
Peuvent-ils tomber dans cette dépendance quand un médecin leur prescrit des médicaments psychoactifs ? C’est possible, mais en général, les prescriptions ne peuvent être renouvelées sans l’avis du médecin. Et ces derniers savent aujourd’hui que ce sont là des prescriptions qui nécessitent un suivi, du fait du risque de dépendance. Par contre, les médicaments détournés peuvent être achetés ailleurs. On trouve de tout sur le marché. Ils peuvent aussi être détournés via la pharmacie familiale, si un proche du jeune prend des psychotropes.
Comment peut-on déceler les symptômes d’une addiction chez un jeune ? Ce qui peut alerter, c’est un changement dans son comportement habituel, avec un engourdissement de sa pensée. Il peut manifester des troubles de l’humeur, de l’attention, des difficultés dans sa relation aux autres. Et puis, si l’on est attentif, on peut observer qu’il essaie de se procurer des médicaments de manière compulsive.
Que préconisez-vous pour sortir un jeune de l’addiction aujourd’hui ? Il faut consulter. En France, nous avons différents types d’accès aux soins : la médecine libérale classique, les services hospitaliers d’addictologie, mais aussi tout le réseau des centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) et les consultations jeunes consommateurs (CJC) qui existent un peu partout.
La consultation jeune consommateur est en accès libre, gratuite et anonyme. Le jeune -et même ses parents- peut y avoir accès à des professionnels familiarisés avec les addictions (psychologue, éducateur, etc.) et faire un point. Et cela peut l’amener à entrer, s’il le souhaite et si c’est nécessaire, dans une démarche de soins. Les amis, qui sont en général un peu plus au courant que les parents de la réalité des consommations, peuvent le convaincre de se rendre à cette consultation.
Quelles actions de prévention menez-vous auprès des jeunes ? Nous avons des programmes de prévention et d’information dans les écoles. Ils sont reconnus par la MIDELCA (2) et le ministère de la Santé et financés par les autorités sanitaires ou le Fonds national de lutte contre les addictions. Dans les collèges, un de ces programmes s’appelle le JBG, le Jeu du bon comportement. Il s’agit de donner aux adolescents les compétences psychosociales pour résister aux sollicitations qui pourraient les entraîner dans une conduite addictive.
Selon une étude (1) financée par l’ONG de cybermilitantisme Avaaz, parmi les 16-25 ans, plus de 7 sur 10 trouvent l’avenir « effrayant ». Et près de la moitié des sondés estiment que l’éco-anxiété affecte leur vie quotidienne. Des résultats qui font froid dans le dos. Le rapport du GIEC, publié en février dernier, n’arrange rien : l’état de la planète s’étant fortement aggravé, ses experts estiment indispensable d’inverser la courbe des émissions de gaz à effets de serre à l’échelle mondiale au plus tard avant 2025. Dans trois ans seulement… De quoi inquiéter encore les jeunes esprits et les autres.
Les catastrophes naturelles provoquent des risques physiques, mais aussi psychiques. Ainsi, une personne sur trois présentait des symptômes de stress post-traumatique après le passage de l’ouragan Katrina en 2005. « Le dérèglement climatique en cours et, plus généralement, notre environnement de vie a de nombreux effets sur notre santé. Notre cerveau est un organe comme un autre : quand il souffre, c’est notre esprit et notre psychisme qui peuvent être altérés », explique Antoine Pellissolo, chef du pôle Psychiatrie et addictologie à Henri-Mondor (AP-HP) (2). Dès lors, quels effets des bouleversements environnementaux sont à craindre ? « L’expression la plus courante est l’éco-anxiété, qui correspond à une forte inquiétude concernant l’avenir de la planète, précise-t-il. Elle prend la forme de questionnements et de ruminations qui perturbent la sérénité, ou d’autres manifestations classiques du stress et de l’anxiété : symptômes physiques (maux de ventre ou de tête, palpitations, bouffées de chaleur), irritabilité, troubles du sommeil et de l’appétit ». Apparaissent des émotions comme la peur ou la colère, mais aussi un sentiment de culpabilité, d’impuissance et de solitude. Certaines personnes peuvent même manifester des symptômes ressemblant à ceux du stress post-traumatique, tels l’hypervigilance, des cauchemars, des idées fixes, quand elles ont été confrontées à des images répétées de catastrophes (incendies, inondations, tempêtes), avec l’impression que cela pourrait arriver à tout moment. Des chercheurs ont dénommé « solastagie », le sentiment de celles et ceux qui ont vu leur milieu naturel transformé ou détruit, qui le vivent comme une perte définitive, donc comme une sorte de « deuil écologique ».
1. Un mal-être de la jeune génération
Selon Antoine Pelissolo, les 15-30 ans sont les plus touchés. « Pour la première fois, cette génération se sent directement et personnellement concernée car les prévisions annoncent des bouleversements de l’environnement de vie, même dans nos pays, et à une échéance proche. Auparavant, les personnes s’inquiétaient pour leurs enfants et leurs petits-enfants. Aujourd’hui, l’annonce de la montée des températures ou des eaux, du manque de ressources alimentaires ou d’eau, conduit les jeunes à renoncer volontairement à avoir des enfants. » Si l’éco-anxiété reste marginale comme plainte principale en consultation, de plus en plus de patients souffrant d’anxiété ou de dépression évoquent les sujets de l’actualité climatique comme participant à leurs angoisses. Sans compter que la crise sanitaire et ses confinements sont passés par là. Ce que confirme Antoine Pélissolo : « Depuis deux ans, nous voyons de plus en plus de jeunes patients ayant un mal-être profond. »
2. Des solutions pour tenir le coup
Qu’est-il possible de faire ? « Pour mieux vivre le monde actuel, il faut commencer par se méfier et se protéger de la sur-information en limitant son exposition aux médias qui délivrent des informations en continu anxiogènes car spectaculaires. Il faut aussi équilibrer ses obligations professionnelles et sociales, avec des temps de loisirs et des durées de sommeil suffisantes. Enfin, il faut parvenir à un état d’esprit associant des objectifs personnels à long terme, basés sur des motivations fortes, une acceptation des réalités sur lesquelles nous n’avons pas de prise et une approche « au jour le jour » quand l’adversité est forte. L’anxiété risque toujours de nous conduire à envisager le pire et à anticiper des catastrophes. Il vaut mieux prendre les problèmes les uns après les autres, en se consacrant au moment présent. »
Autre piste : partager ses préoccupations avec d’autres. Comme le souligne Antoine Pelissolo, « un engagement personnel, conforme aux valeurs profondes souvent associées à l’éco-anxiété, dans une activité associative de défense de la nature ou dans une action en faveur de l’environnement permet de sortir d’un sentiment d’impuissance et d’isolement. Après une phase de sidération et d’angoisse, la personne peut aussi redonner sens à sa vie en adoptant un comportement individuel de limitation de sa propre empreinte carbone. »
(1) Menée entre mai et juin 2021 par l’Institut Kantar auprès de 10 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans dans dix pays (Australie, Brésil, États-Unis, Finlande, France, Inde, Nigéria, Philippines, Portugal et Royaume-Uni)
(2) Auteur avec Célie Massini, interne en psychiatrie, de Les émotions du dérèglement climatique, éd. Flammarion, 2021.
Auteure du Petit guide de survie pour éco-anxieux, éd. Philippe Rey, septembre 2022. Charline Schmerber exerce en libéral à Montpellier.
« Se trouver une action juste, adéquate pour soi. »
Qui sont vos patients éco-anxieux et quels symptômes présentent-ils ?
Charline Schmerber* : Il s’agit principalement de jeunes, qui se posent beaucoup de questions existentielles : dois-je faire des enfants ? Où dois-je aller vivre ? Dois-je changer de travail ? Ils ont des ruminations, des pensées obsessionnelles, des obsessions écologiques. Leur corps est atteint : ils ont du mal à dormir, à s’alimenter. Ils peuvent aussi montrer une fatigue émotionnelle et psychique. Certains s’isolent, ont du mal à faire du lien; ils veulent se couper du monde. D’autres, tels les militants écologiques par exemple, peuvent aller jusqu’à déclarer un burn-out écologique, parce qu’ils sont surmenés et dans un grand sentiment d’impuissance.
Comment les accompagnez-vous pour qu’ils aillent mieux ?
C.S. : Je travaille avec eux sur trois axes. L’idée est, d’abord, de leur permettre de prendre soin d’eux car ils sont dans le « trop », puis de parler et partager leurs émotions, et de retrouver une sécurité intérieure et un meilleur rapport au temps. Je leur propose des exercices de méditation, de cohérence cardiaque et de la lecture, par exemple, du psychanalyste Viktor Frankl (NDLR : il a créé la logothérapie, qui prend en compte le besoin de sens et la dimension spirituelle de la personne). Car ils peuvent être envahis par des scenarii catastrophistes à la Mad Max et ont besoin de retrouver de leur capacité à rêver. Nous travaillons ensuite la sécurité du lien avec les autres humains. Je les amène à comprendre tout l’impact qu’ils peuvent avoir par leur action. Se trouver une action juste, adéquate pour soi, permet d’aller mieux. Cela peut aussi être ne rien faire du tout. Il ne sert à rien d’approcher les autres seulement pour les convaincre de l’urgence de la situation. Enfin, nous travaillons sur leur reliance avec le vivant. J’organise des marches lentes en forêt avec des exercices de respiration, le dos contre un arbre. En parallèle, j’anime des groupes de parole. Mes patients peuvent ainsi réaliser qu’ils ne sont pas seuls, se reconnaître dans les autres et apprendre et à s’écouter et à écouter.
Que conseillez-vous aux parents dont les enfants se montrent éco-anxieux ?
C. S. : De rester dans l’écoute et le dialogue, et de consulter un professionnel si les symptômes persistent.
Source : enquête IFOP sur le réchauffement climatique (octobre 2018).
L’ashwagandha ou whitania somnifera est une plante majeure en ayurvéda, la médecine traditionnelle indienne. On retrouve l’usage de ses racines dans plus de 200 formules pour soigner de nombreuses maladies. Une merveilleuse alliée à découvrir…
1. Elle est adaptogène, à la fois relaxante et fortifiante
Stimulante, elle fortifie et renforce l’organisme (muscle, os, etc.) ;
Vitalisante et énergisante, elle traite les problèmes de fatigue chronique, la fatigue liée à l’anémie et les convalescences ;
Adaptogène, elle relaxe et insuffle son énergie en cas de stress, de troubles nerveux divers, et de fatigue physique autant que psychique. Elle apaise aussi les migraines;
Elle aide à avoir un bon sommeil réparateur. Elle possède aussi des vertus cardiorégulatrices et apaise l’hypertension ;
Elle renforce le système immunitaire ;
Elle sera d’une grande aide pour les femmes en post-partum afin de récupérer de l’énergie vitale.
2. Un plus pour le système hormonal et reproducteur…
Réputée aphrodisiaque, elle est connue pour stimuler la libido et la sécrétion d’hormones sexuelles reproductives. On la conseille surtout aux hommes en cas d’impuissance ou d’éjaculation précoce, mais aussi en cas de troubles de la fertilité car elle optimise la qualité et la quantité des spermatozoïdes ;
Régulatrice hormonale, elle sera l’alliée des femmes ayant des douleurs menstruelles, des règles trop abondantes ou absentes ;
Elle atténue les symptômes de la préménopause et de la ménopause ;
Elle agit sur les problèmes d’hypothyroïdie.
3. … Et le système digestif
Réputée comme hépatoprotectrice, elle vient réparer des lésions du foie et contribue au sevrage de certaines substances (alcool, drogues, médicaments) ;
Utilisée pour apaiser les ulcères d’estomac ou d’intestins, elle possède des propriétés anti-inflammatoires (syndrôme de l’intestin irritable par exemple) ;
Elle régule le transit intestinal et aide à lutter contre le diabète et le cholestérol.
Enfin, des études scientifiques tendent à prouver une action antitumorale. On retrouve certains de ses composés actifs dans des médicaments anticancéreux. Elle agirait aussi à titre de prévention dans les cancers du sein, des poumons et du côlon. Enfin, des brevets ont été déposés par le CNRS la concernant pour des traitements contre Alzheimer, Parkinson et les maladies de démyélinisation comme la sclérose en plaques. L’ashwagandha possèderait une action de protection neurologique ; des études sont actuellement en cours.
4. Utilisation et posologie de l’ashwagandha
La partie utilisée en herboristerie traditionnelle est la racine d’ashwagandha, dont on peut faire une décoction. Mais l’ashwagandha se consomme aussi sous forme de teintures, d’extraits fluides, de poudre ou de gélules extraits à partir des racines. Il est important de suivre la posologie recommandée.
5. Contre-indications
La consommation d’ashwagandha est contre-indiquée aux femmes enceintes en raison de son action sur le système hormonal. Elle est déconseillée aux personnes atteintes d’hyperthyroïdie également. Consommée excessivement, elle peut être aussi un véritable somnifère, avoir des conséquences sur les réflexes ou provoquer des troubles intestinaux.
Jusqu’à la moitié des adultes ont souffert ou souffrent de cette affection du cuir chevelu. Et des démangeaisons et inconfort en société qu’elle provoque. Coup de projecteur.
Anatomie de l’élément perturbateur
Les pellicules, qui peuvent être sèches et blanches comme des flocons de neige, ou grasses avec des amas jaunes, sont principalement causées par la levure Malassezia, qui vit sur la peau de la plupart des êtres humains. Soit à la surface, soit dans l’ouverture du follicule pileux qui entoure la racine et la mèche d’un cheveu.
La Malassezia se nourrit de sébum, l’hydratant naturel sécrété par les glandes sébacées pour empêcher le dessèchement de la peau. Ces dernières sont attachées à chaque follicule pileux et les cheveux fournissent un environnement sombre et couvert propice à la prolifération de la levure. En se développant, elle libère des molécules qui irritent la peau et perturbent son processus normal de renouvellement. Les cellules se regroupent et apparaissent sous forme de flocons blancs. Et, en cas d’excès de sébum, celui-ci peut se mélanger à elles et donner aux pellicules un aspect jaune.
Pourquoi chez moi et pas chez les autres ?
Tout dépend de votre barrière cutanée. La Malassezia peut pénétrer plus profondément si votre peau est endommagée. Par exemple, si vous avez pris un coup de soleil. Mais d’autres facteurs peuvent intervenir comme votre immunité ou votre utilisation de certains produits capillaires. Le développement de la levure dépend aussi de l’équilibre des micro-organismes qui vivent sous votre peau, comme les bactéries.
Comment en venir à bout ?
Vous pouvez traiter vos pellicules avec :
des shampoings antifongiques et des traitements du cuir chevelu pour freiner la croissance de la Malassezia. Ils contiennent le plus souvent de la pyrithione de zinc, mais certains peuvent aussi être à base de sulfure de sélénium, de kétoconazole et de goudron de houille. L’utilisation de ces produits doit souvent être répétée.
des masques et des gommages qui permettent de restaurer la barrière du cuir chevelu en réduisant son inflammation et son irritation. Mais ces produits ne contenant pas d’antifongique, les pellicules risquent de réapparaître.
des remèdes maison avec de l’huile essentielle d’arbre à thé, par exemple, ou encore du miel. Ils peuvent se montrer efficaces, à condition d’être bien dosés, car ils risquent aussi d’aggraver le problème en nourrissant la levure.
Pourquoi vos pellicules reviennent-elles ?
Aujourd’hui, les scientifiques constatent que les shampoings à base de pyrithione de zinc atteignent la surface de la peau, mais moins le cœur des follicules pileux, plus difficiles d’accès. Ils travaillent donc à une amélioration de la formulation de leur principe actif, et sur de nouvelles substances, telles que les enzymes carboniques, qui pourraient cibler différemment la croissance de la levure. Mais aussi sur le renforcement de la flore cutanée via des prébiotiques et des probiotiques dédiés.
Il suffit de 15 ou 20 minutes par jour pour faire travailler le mollet et activer la « pompe » veineuse. Que vous fassiez de la marche simple ou nordique, du ski de fond, du vélo ou encore de la natation, vous vous ferez du bien. Et si l’eau se présente à vous (mer, piscine, rivière…), marchez-y ! La pression de l’eau favorise grandement le retour veineux.
2. Maintenez votre poids de forme !
Une activité physique régulière et une alimentation variée et équilibrée vous aidera. Et si vous peinez à perdre vos kilos superflus, n’hésitez pas à faire appel à un médecin nutritionniste.
3. Méfiez-vous du sel !
Il peut provoquer de la rétention d’eau et est susceptible d’altérer votre circulation sanguine.
4. Faites des cures de son d’avoine ou de blé !
Vous pouvez aussi consommer des céréales et légumineuses complètes plusieurs fois par semaine, si vous êtes sujet à la constipation… Car elle est néfaste aux veines des jambes.
5. Choisissiez une garde-robe adaptée !
Evitez les pantalons trop moulants et les bottes qui entravent la circulation dans les membres inférieurs. Portez des chaussures avec des talons ni trop hauts (pas au-dessus de 7 cm) ni trop bas (pas en-dessous de 3 cm).
Utilisé depuis Hippocrate, le charbon actif ou charbon végétal est aujourd’hui reconnu pour sa capacité à absorber métaux lourds, insecticides, poisons et gaz… Mais il diminuerait aussi l’activité des virus, des bactéries et des champignons sur notre organisme. A placer de toute urgence dans la pharmacie familiale.
Le charbon actif est obtenu après carbonisation à haute température et en l’absence d’air, d’une matière organique : bois, écorce, coques de noix de coco ou cacahuètes, noyaux d’olives, houille, tourbe, lignite… Une nouvelle carbonisation a lieu ensuite en présence de vapeur d’eau, d’air ou de gaz et crée un vaste réseau de micropores piégeant les substances nocives (toxines, drogues, additifs). Il peut présenter ainsi une grande capacité d’absorption.
Si au XVIIIème siècle, il est recommandé pour éliminer les odeurs de la gangrène, purifier l’haleine ou encore soulager les fièvres, au XIX ème siècle, des expérimentations animales montrent sa capacité à neutraliser des métaux lourds, des poisons comme l’arsenic ou encore l’opium. Depuis cette époque, les techniques de carbonisation ont été modernisées et le charbon actif s’est ouvert à de nombreuses autres applications. Il est à la fois purifiant de l’organisme, antidote aux inconforts digestifs… Tout en protégeant le microbiote intestinal. Mais il peut aussi soigner et nettoyer le foie. On peut l’utiliser en cas de :
Intoxication
Il se montre efficace en cas d’intoxication aigüe à une drogue. Il a été démontré que la dose de 50g de charbon actif permet de neutraliser efficacement toute overdose de paracétamol.
Aseptisation intestinale
En cas de diarrhées (bactérienne, alimentaire ou côlon irritable), une cure de charbon végétal permet d’absorber toutes les toxines et de soulager les diarrhées. Il aseptise en effet le côlon et stimule sang et lymphe.
Inconfort digestif
Une cure de trois mois de charbon actif permet de diminuer gaz, ballonnements et de réduire les crampes. Mais aussi d’aider à maigrir et/ou garder un ventre plat.
Soin de la peau
Outre ses multiples utilisations médicales, le charbon actif, appliqué sous forme de masque est aussi efficace pour assainir la peau grasse et ses impuretés (points noirs, petits boutons…). Et redonner un coup d’éclat aux teints brouillés par la pollution et le tabac.
Soin des dents
Il a la réputation de blanchir les dents sous forme de dentifrice, mais les études actuelles ne montrent pas d’effet probant. Si une baisse des caries a pu être observée par certaines, d’autres montrent tout le contraire et d’autres encore confirment les impacts négatifs du charbon actif sur l’émail des dents. A utiliser avec parcimonie.
Il est utilisé à des fins thérapeutiques sous forme :
– De poudre et/ ou de granules à prendre avec de l’eau ou encore dans un yaourt, que l’on boit avec une paille pour éviter de noircir ses dents. ;
– De gélules, reconnues plus pratiques, mais qui peuvent se montrer moins efficaces (la gélule doit être digérée préalablement par l’estomac et la quantité de charbon qui s’y trouve est moindre) ;
– De comprimés, la forme idéale pour faire face à une intoxication.
Précautions
Selon les produits proposés dans le commerce, la prise de charbon activé peut se faire en dehors ou pendant les repas. Par contre, en cas de prise de médicament ou de complément alimentaire, il est important que le charbon soit pris deux heures avant ou après les repas.
Dans son rapport publié en mars dernier, la Cour des Comptes estime qu’environ 1,6 million d’enfants et d’adolescents souffrent d’un trouble psychique en France.
Entre 750 000 et 850 000 enfants et adolescents bénéficient annuellement de soins prodigués en pédopsychiatrie. Mais les Sages de la rue Cambon ont observé que l’organisation actuelle des soins, en particulier dans les centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ), une partie des patients suivis ne souffrent que de troubles légers. Au détriment de la prise en charge d’enfants souffrant de troubles plus sévères.
Ce qui, là encore, pose la question de l’accès aux soins, qui plus est depuis la crise sanitaire. « Malheureusement, nous ne pouvons que constater la place grandissante des psychotropes chez nos enfants, déplore Éric Delemar, Défenseur des enfants. Car, quand on n’a pas accès aux soins, on médique. En parallèle, la courbe croissante des hospitalisations en pédiatrie et pédopsychiatrie engendrée par la crise sanitaire n’a pas baissé. »
« Développer la prévention autour des tout-petits »
Entre 2010 et 2022, le nombre de pédopsychiatres a diminué de 34%. Ce qui empire la difficulté d’accès aux soins et la prise en charge dans les services infanto-juvéniles. Il s’avère, en outre, que le parcours de soins en pédopsychiatrie repose sur une offre organisée en « secteurs », aux missions souvent très larges. « Malgré nos alertes pendant la crise sanitaire, les décideurs politiques ont cru que les enfants allaient s’adapter et se réadapter. Alors que les enfants sont toujours les premières victimes », souligne Éric Delemar.
« Le défaut de prise en charge des troubles de santé mentale et les manquements aux droits fondamentaux, comme le droit à l’éducation ou à la protection qui en découlent, constituent une entrave au développement des enfants et à leur intérêt supérieur, affirme-t-il. La crise sanitaire a montré que la santé mentale est autre chose que l’absence de maladie. Il faut développer la prévention autour des tout-petits avec les maisons des 1 000 premiers jours*, qui accueillent enfants et parents gratuitement, et répondent au manque de lisibilité et de coordination de l’offre de soins. Et, à l’école, nous devons laisser les enfants prendre la parole pour qu’ils s’épanouissent et prennent confiance… Notre société doit changer son regard sur l’enfance. »
*Une recommandation du rapport remis en septembre 2020 par le psychiatre Boris Cyrulnik.
La sieste flash ou micro-sieste dure moins de cinq minutes. Elle est facile à pratiquer et se montre terriblement efficace. Elle peut se faire chez soi, mais aussi dans les transports ou sur une aire d’autoroute. Mode d’emploi.
Première étape :
Asseyez-vous confortablement, le dos appuyé contre le dossier de votre siège.
Deuxième étape :
Choisissez un petit objet (clés, stylo…) et tenez-le entre le pouce et l’index.
Troisième étape :
Fermez les yeux et relaxez-vous en inspirant et
en expirant plusieurs fois profondément en vous concentrant sur votre respiration.
Etape finale :
Quand l’objet que vous tenez dans la main tombe au sol, votre sieste flash est terminée.
Etirez-vous avant de reprendre le fil de votre journée.
Avant ou face à une situation qui vous apparaît comme stressante, l’automassage permet de se détendre en quelques minutes seulement et de retrouver de son calme. Trois techniques faciles à apprendre et à utiliser à la maison, au travail ou encore dans les transports.
Avant de commencer, asseyez-vous confortablement sur une chaise, le dos collé à son dossier et les deux pieds parallèles ancrés au sol. Inspirez et expirez profondément et calmement une dizaine de fois.
Permettez-vous de fermer les yeux pour prendre conscience de votre respiration. Réchauffez ensuite vos mains en les frottant avec énergie l’une contre l’autre.
Nuque et épaules : dénouez les tensions
Saisissez le muscle de l’épaule à pleine main et pétrissez-le. Répétez ce mouvement en remontant petit à petit vers le haut de la nuque puis redescendez vers l’épaule.
Trois de chaque côté.
Mains : retrouvez de la sérénité
Pincez avec deux doigts de la main droite, la partie charnue -entre le pouce et l’index- de la main gauche. Pressez en réalisant des mouvements circulaires.
Cinq fois de chaque côté.
Tempes : relaxez-vous
Pressez les tempes avec l’index et le majeur. Effectuez des mouvements circulaires.
Cinq fois dans un sens, puis cinq fois dans l’autre.
L’huile essentielle de menthe poivrée offre un large éventail de bienfaits : de l’apaisement de la peau au rafraichissement de l’haleine jusqu’à l’aromatisation des desserts et des plats. L’huile essentielle de menthe poivrée est toujours pratique à avoir sous la main.
Utilisations :
1. Mélangez deux ou trois gouttes à une huile végétale (coco, avocat, amande douce, etc.) par exemple, et massez-vous le cou et les épaules pour soulager les tensions ;
2. Ajoutez deux ou trois gouttes à une compresse d’eau froide ou à un bain de pieds pour les rafraichir en cas d’échauffement ;
3. Appliquez deux ou trois gouttes mélangées à une huile végétale sur les points de pulsation lorsque vous vous sentez fatigué ou avec peu d’énergie ;
4. Utilisez une goutte de menthe poivrée avec de l’huile essentielle de citron dans de l’eau pour un bain de bouche rafraichissant ;
5. Ajoutez-en une goutte à une tasse de thé chaud et buvez lentement pour apaiser les maux d’estomac.
Marie-Pierre Pruvot, née Jean-Pierre en 1935 dans l’Algérie française, a aussi été Bambi, icône des cabarets parisiens. Avant de devenir professeure de Lettres en collège pendant presque trente ans. Itinéraire d’une pionnière exceptionnelle.
Quels souvenirs gardez-vous de votre enfance en Algérie, dans la campagne de la Grande Kabylie ?
Marie-Pierre PRUVOT : Mon père était garagiste ; nous vivions dans la maison de sa mère. La vie était simple et facile. Je passais tous mes après-midi en robe dans un gynécée avec ma mère, ma grand-mère, mes tantes et les voisines. Dans ma tête, j’étais une fille. Á six ans, je suis entrée à l’école de garçons. On m’a ratiboisé les cheveux et interdit de porter des robes. Un vrai cauchemar ! J’ai haï l’école… même si ma mère se donnait un mal fou pour que je réussisse.
Comment s’est déroulée la suite de votre scolarité ?
M-P.P : Dès la fin de la guerre, en 1945, le collège a rouvert. Ma sœur devait y entrer, mais elle est décédée à l’âge de 14 ans, victime d’une épidémie. Moi, j’ai réussi le concours d’entrée en sixième la deuxième fois, mais j’ai fait le collège en trois ans. Je passais mon temps à lire. J’ai adoré le collège ! Quand il a fallu aller au lycée à Alger, mon père était mort, nous étions ruinés et je n’avais pas de bourse. J’ai donc logé à la Pointe Pescade, une ville balnéaire de la banlieue d’Alger, dans le café de l’amante de mon oncle avec qui je m’entendais bien. Je l’aidais au service. Au lycée, je n’ai pas beaucoup travaillé, ne suis allée que jusqu’en première. J’avais du mal à vivre dans mon corps.
« Dans ma tête, j’étais une fille. »
Quand avez-vous senti l’air de la liberté ?
M-P.P : Les artistes du cabaret Le Carrousel de Paris passaient au casino de la Corniche, dans la banlieue d’Alger, tout près de là où je vivais. J’ai alors compris que ma vie serait possible à Paris. Sur les conseils du patron du Carrousel, j’ai écrit à ma mère pour lui demander l’émancipation [NDRL : acte par lequel un mineur est juridiquement assimilé à un majeur] qui m’aurait permis de travailler chez Madame Arthur. Elle m’a répondu : « Rentres tout de suite ou je te fais ramener par la police. » Son premier acte d’autorité en dehors de l’école ! Je suis rentrée et nous avons parlé. Elle avait du mal à comprendre, mais elle m’adorait. Quand j’ai eu 18 ans, elle m’a accordé l’émancipation et je me suis installée à Paris.
« J’ai fait du cabaret comme dans un rêve »
Vous commencez alors votre vie d’artiste de cabaret ?
M-P.P : Oui, j’ai débuté chez Madame Arthur, connu pour ses numéros de travestis, des hommes qui s’habillaient en femmes… ce qui était du quotidien pour ma part ! Je chantais alors deux chansons : une à 23 heures ; l’autre à 4 heures du matin. Entre, j’attendais dans la loge. Je l’ai fait comme dans un rêve : c’était merveilleux. Je n’avais plus de souci. Je savais que ma vie allait se réaliser.
Comment avez-vous procédé pour devenir une femme ?
M-P.P : J’ai pris des œstrogènes dès mon arrivée à Paris. C’était novateur. Coccinelle [NDLR : nom de scène de Jacqueline Dufresnoy, née Jacques Dufresnoy en 1931 et décédée en 2006], avec qui j’ai partagé un appartement, les avait découverts avant moi. Elle s’est faite opérée en 1958 ; moi, deux ans plus tard. Pour voir ce que cela donnait. Il faut au moins autant de courage pour attendre que pour être opérée. Mais, après l’opération, il y a un épanouissement, une sorte de bonheur qui s’installe. Le physique est un accomplissement extrêmement intime. Mon ami a eu du mal à se faire à ce changement. Mais, ma loi sacrée a toujours été « moi d’abord ».
La vie quotidienne était-elle moins intéressante pour vous que celle du cabaret ?
M-P.P : Elle était agréable. Je vivais avec mon ami dans un bel appartement. Il aurait été sage que je me dépêche de quitter le cabaret, mais j’aimais le métier que j’avais appris. On croit qu’on ne pourra jamais se passer de l’amour du public. Ma mère, elle, s’interrogeait sur mon avenir. Je ne l’avais pas déçue. Toutefois, elle avait eu une fille qui était morte, et un fils qui n’était plus un garçon… J’ai pris des cours de langues, repris la lecture, me suis remise aux études, tout en travaillant au Carrousel. L’année du bac par correspondance a été la plus difficile ; mon cerveau était rouillé. Je l’ai décroché en 1969 et je suis entrée à la Sorbonne. Après une licence de Lettres, un mémoire, le Capes et des stages, je suis devenue professeure de Lettres. J’ai été mutée dans un collège de la banlieue de Cherbourg. Je suis partie avec mon chien, ma mère et mes meubles. Un changement de vie total ! J’avais déjà presque 40 ans. Finie la scène de cabaret ; une autre m’attendait : l’estrade.
Vous avez publié une dizaine de livres largement autobiographiques. Vous écrivez toujours ?
M-P.P : Oui, tous les matins. Depuis que je suis retraitée, je vis une vie enfermée d’écrivain. J’ai écrit mon premier livre [NDLR : J’inventais ma vie aux éditions Osmondes] sous le pseudonyme de Marie-Pier Ysser. Je n’aurais pu rester à l’Éducation nationale si quelqu’un avait découvert qui j’étais.
« Une opération et un changement d’état civil sont définitifs ! »
Quand vous écrivez sur votre parcours, avez-vous envie d’aider les jeunes qui s’interrogent sur leur identité?
M-P.P : Je ne crois pas qu’ils aient besoin de moi. Même s’il faudrait sans doute les aider à savoir s’ils sont véritablement décidés à changer de sexe ou si c’est un fantasme. Parce qu’une opération et un changement d’état civil sont définitifs ! En ce moment, il y a presque une mode sur le sujet. Il faut éviter le côté guignol. Quand on fait du spectacle, c’est autre chose. J’en ai fait, j’ai adoré. Mais, au fond, j’ai toujours rêvé d’être une femme comme les autres – une femme professeure de lettres déjeunant avec ses collègues, parlant de politique ou du temps – et de retrouver l’époque du gynécée en Algérie. Sans chercher à être un personnage. On n’est pas un personnage !
Jimmy Pagneux est comédien. Né à Castres dans une famille modeste, nombreuse et aimante, cet aîné d’une fratrie de huit enfants a découvert le monde dans les livres et s’est inspiré de ses super-héros pour trouver peu à peu son rôle dans la vie et sur scène. En avril prochain, à Toulouse, il présentera sur grand écran la série qu’il a écrite, réalisée et dont il est le héros. Avant de lui faire traverser l’Atlantique. Rencontre avec un éternel enfant responsable.
Qui rêviez-vous d’être quand vous étiez enfant ?
Jimmy Pagneux : Un personnage, un acteur, un héros. C’est le fil rouge de ma carrière. Quand j’ai huit ans, c’est Norrin Radd alias Silver surfer, le surfeur d’argent, un super-héros Marvel. Pour sauver sa planète, il fait un marché avec Galactus qui veut la manger. Il garantit à cet extra-terrestre de lui trouver des planètes pour qu’il puisse se nourrir de leur énergie. Mais il accepte aussi de ne plus voir la femme qu’il aime pour qu’elle soit épargnée. Je trouvais génial qu’il puisse glisser de planète en planète avec son surf d’argent en combinaison assortie. Il découvrait de nouvelles populations et n’avait plus besoin de se nourrir. Il faut dire qu’à cette époque déjà, mon père me disait que je vivais pour manger ! Plus tard, à l’adolescence, j’ai découvert l’acteur Denzel Washington dans un film et j’ai dit à mon père que je voulais être lui.
Comment définissez-vous vos origines ?
J.P : Mon père est Guadeloupéen et ma mère est née à Madagascar de parents réunionnais. Mon père était éboueur, ma mère faisait des ménages et puis, elle nous a élevés. Nous sommes huit enfants et je suis l’aîné, le responsable. Je pense que si je suis là, c’est parce que mon père était éboueur. Il récupérait les sacs poubelle de livres et ils les vidaient dans ma chambre, sans les trier. Ce qui fait que j’ai lu de tout, même des Harlequin. Je m’évadais comme ça. J’ai fait mille fois le tour de la Terre en lisant. Entre autres avec le Tour du monde en 80 jours de Jules Verne. Phileas Fogg était aussi mon héros parce qu’il est pragmatique et qu’il a le pouvoir de cacher ce qu’il pense. Pendant tout un temps, j’ai joué avec ce pouvoir. Je travaillais mon impassibilité et je sais que cela agaçait mon père, lui qui avait l’habitude de nous cerner très vite. Et puis, j’en usais aussi à l’extérieur de ce pouvoir, à l’école… Par jeu. Parce que j’étais riche d’expériences acquises par les livres.
Vous avez le goût des mots et du jeu…
J.P : Oui. Je suis un enfant. Le jeu est un des axes principaux de ma vie. La vie est très dure aujourd’hui, les gens souffrent et le jeu est pour moi un moyen d’adoucir les choses. Comme l’humour que j’ai toujours utilisé pour faire rire mes frères et soeurs et mes camarades de classe. Mes parents avaient une autorité forte et il me fallait sortir du lot. Je me testais à l’école pour vaincre ma timidité. Prendre la parole en public n’était pas un souci pour moi. J’osais, même si j’avais un petit trac au début. Celui que j’appelle aujourd’hui le trac du perfectionniste. D’ailleurs, la première chose que je dis à mes élèves en théâtre, c’est de ne surtout pas se débarrasser du trac. Il peut donner de l’intensité et montrer que la personne est bien ancrée dans le présent. Certains sont à l’aise, c’est super. Mais celui qui a le coeur qui bat a aussi le droit de prendre la parole.
Quel a été votre parcours de formation ?
J.P : Après mon bac de compta et mes études en force de vente, j’ai été VRP comme on disait. J’étais un excellent vendeur d’encyclopédies Hachette parce que j’avais beaucoup fantasmé sur elles au CDI du collège. J’y croyais. Mes formateurs me trouvaient super, mais ils me disaient que j’attendais que les clients lèvent le doigt pour savoir comment ils pouvaient acheter le produit. C’était une scène pour moi, la vente. Jusqu’au jour où j’ai compris qu’Hachette faisait son business sur les crédits que prenaient les clients pour se permettre d’acheter. Cela a été ma limite. Je me suis alors retrouvé vendeur à La grande récré. J’y ai été heureux, je testais les nouveaux jeux et je créais du lien avec les clients, qui décidaient sciemment de faire un achat.
« Avec lui (NDRL : René Gouzenne), j’ai été formé à l’ancienne. C’était militaire, direct, juste. Il était sincère. »
Quand vous tournez-vous vraiment vers la scène théâtrale ?
J.P : Vers 20 ans, j’ai été repéré par le metteur en scène Gilles Ramade qui trouvait que j’avais quelque chose de Harpo des Marx Brothers. Le côté espiègle, l’œil qui brille sans doute. Il me disait : tu n’as pas besoin de parler. Alors que je parle beaucoup. Dans son spectacle lyrique Night in the opera, j’ai réussi à sortir mon épingle du jeu sans dire un seul mot, mais je ne me sentais pas légitime. Alors j’ai fait un stage de mime avec Laura Hertz, qui a été révélateur et marquant. J’ai ensuite passé une audition avec René Gouzenne à La cave poésie, à Toulouse. Il m’a testé dans le rôle du Dr Knock que j’avais préparé et il m’a choisi. Même si avec mon look fashy et mon cheveu blond décoloré d’alors, je n’avais rien de commun avec son univers. Je ne savais même pas qu’il avait été l’élève de Jean Vilar et qu’il avait connu Louis Jouvet.
Le comédien et metteur en scène René Gouzenne (collection personnelle de Jimmy Pagneux)
Avec lui, j’ai été formé à l’ancienne. C’était militaire, direct, juste. Il était sincère. C’est ce que je voulais. Il a vu que j’avais été bien éduqué et que j’avais un but. J’ai tout appris avec lui, la nécessité d’être ancré dans le moment, d’être juste. Quand je suis sorti de chez Gouzenne, j’avais tout. Et il m’a dit que je ne serais pas reconnu avant 20 ou 25 ans à cause de ma liberté…
La scène est-elle une autorisation à être pour vous ?
J.P : C’est un espace de liberté, on peut tout y faire. On devrait pouvoir tout y faire. Encore plus aujourd’hui qu’avant. Mais il faudrait avertir le public sur l’âge de ceux qui peuvent assister au spectacle. C’est important. Un artiste est responsable de ce qu’il fait sur scène. Je suis protecteur dans ma famille, suppléant de mes parents, je suis l’aîné.
Vous avez été mannequin, vous avez fait de la pub…
J.P : J’étais modèle pour des photos, des pubs pour des catalogues, des défilés pour des bijoux et des vêtements… Parce que j’avais une aisance sur scène. Mais je ne supportais pas certains regards qui se posaient sur moi, certains compliments…
Avec son professeur et mentor, François Berléand.
« François Berléand recommande d’aller dans une gare pour observer les gens, pour voir l’intensité en action, leur justesse. Le comédien s’ancre par le travail. »
… Et vous avez aussi fait de la télé…
J.P : J’ai beaucoup travaillé avec les agences de communication, d’événementiel pour intervenir dans des entreprises… Un jour, j’ai été recommandé pour présenter l’émission Flash conso sur France 3 Midi-Pyrénées. Et alors que je ne me sentais pas légitime, j’ai réussi à convaincre de rafraîchir le contenu de l’émission et sa présentation. Cela devait durer trois mois et cela a duré cinq ans. Ça a changé ma vie d’artiste, ma vie. Les téléspectateurs aimaient ce que je faisais. On me reconnaissait dans la rue et j’étais rassuré financièrement. J’étais intermittent, mais j’avais un revenu régulier. Tout roulait et dans mes castings de théâtre, cela a commencé à changer aussi. Parce qu’en présentant cette émission, j’avais aussi rassuré ma prise de parole. D’ailleurs, François Berléand recommande d’aller dans une gare pour observer les gens, pour voir l’intensité en action, leur justesse. Le comédien s’ancre par le travail. Moi, ma prestation s’appuyait sur le travail, une intervention préparée, une mise en scène, un texte, dans un objectif de représentation. J’ai connu le cœur qui bat très vite…
Présenter l’émission Flash conso sur France 3 a changé la vie d’artiste de Jimmy Pagneux.
En jouant, cherchez-vous à emporter le public ?
J.P : Non, j’oublie le public. Je veux le respecter en ne jouant pas pour lui. Je déteste la séduction sur scène. Quand je vais voir quelqu’un sur scène, je ne vais pas voir quelqu’un qui est là pour me séduire. Je viens assister à quelque chose d’authentique, voir des comédiens, des humains, qui sont ensemble et solidaires… C’est sans doute pour cela que j’ai toujours refusé de faire un seul-en-scène. Je travaille dur pour continuer à jouer. Quand je joue au théâtre, je veux proposer de l’authentique.
J.P : Depuis plus de 15 ans, cette pièce ne quitte jamais mon chevet. Je les lue cent fois. Elle dit toute l’importance dans le couple de prendre soin de l’autre. L’amour, le couple, c’est tellement précieux que cela n’est jamais gagné. C’est une attention de chaque instant.
Jimmy Pagneux aime s’imprégner de l’expérience du grand comédien.
Vous vous êtes donné les moyens d’obtenir les droits de cette pièce, de la mettre en scène et de la jouer. Vous êtes devenu un chef d’entreprise…
J.P : Je ne voulais pas la mettre en scène. Même si j’ai été formé à la mise en scène par René Gouzenne et amélioré au théâtre et au cinéma par François Berléand, mais j’ai essayé plusieurs metteurs-en-scène qui voulaient laisser leur patte et moi, je voulais qu’elle soit au service de l’auteur et de son texte. Alors je l’ai mise en scène. La pièce raconte la vie d’un couple et le public sait ce qu’est un couple, alors il faut que le couple qui joue soit crédible. Juste. Mais nous ne sommes que des outils, comme disait aussi Gouzenne. Alors je rappelle toujours à mes comédiennes que la première distribution de cette pièce a été Charlotte Rampling et Bernard Giraudeau ! Quel couple ! J’ai fait une mise en scène et des placements très simples. Le couple de comédiens mûrit sur scène et je dis à la comédienne qui joue avec moi d’amener peu à peu son essence, son vécu de femme…
« Quand je joue au théâtre, je veux proposer de l’authentique. »
1. Sur scène dans la pièce « Petits crimes conjugaux » d’Éric-Emmanuel Schmitt 2. Rencontre avec le public après la représentation.
L’auteur a mis très peu d’indications sur le profil des deux personnages…
J.P : Oui, très peu. Quand je l’ai rencontré, Eric-Emmanuel Schmidt m’a regardé et il m’a dit : je suis curieux de voir. Pourquoi maintenant ? a-t-il ajouté. Ce à quoi j’ai répondu : parce que je sais maintenant ce que c’est d’aimer, d’être amoureux… Quand nous la jouons et que le théâtre est plein, je garde toujours à l’esprit que c’est avant tout pour Eric-Emmanuel Schmidt que le public est venu.
« Le travail me rassure dans ma légitimité. Le fait que je respecte les autres aussi. »
L’affiche officielle de sa série télé Othello-Special agent & shadowman
Voyez-vous votre parcours comme un parcours difficile ? Un parcours de combattant ?
J.P : Je ne le trouve pas difficile et pas celui d’un combattant. Parce que je connais de vrais combattants, mes parents, par exemple. Il y a des difficultés, oui, mais c’est ce qui permet d’être poussés dans ses retranchements. C’est ce qui fait de moi un meilleur artiste. Le travail me rassure dans ma légitimité. Le fait que je respecte les autres aussi. Plus je travaille, plus je suis libre ensuite de circuler dans les mots, le jeu, plus je peux m’amuser. Moins je travaille, moins je me régale.
Cela n’a pas été trop dur, les vaches maigres ?
J.P : Toutes les histoires qu’on aime sont des catastrophes dont on s’est sorties. En ayant lu beaucoup de livres, je savais qu’une belle histoire passe par des hauts et des bas. Les bas n’ont jamais été des découragements. Je me disais : tu as envie ou pas ? J’ai douté, bien sûr. Il y a cinq ans, je me suis même demandé si j’avais raison de m’obstiner. Et en même temps, cela fait 30 ans que je suis dans le même corps de métier et que j’en vis. Alors j’en ai conclu que j’avais réussi !
C’est quoi réussir pour vous ?
J.P : Jouer un film d’action avec Denzel Washington. Sans doute parce que je l’ai vu jouer un avocat. Un métier dont j’ai rêvé aussi avant de découvrir que pour l’être, il fallait accepter de défendre des méchants. A l’époque, mon père m’a dit : je n’ai pas fait tout ça pour que tu finisses acteur !
Que diriez-vous de vous à quelqu’un qui ne vous connaît pas ? Que vous êtes un guerrier dans l’âme ? Un égocentrique qui se contrôle par le travail ? Un bourreau de vous-même ? Un rêveur ?
J.P : Un guerrier pacifique rêveur. Je ne suis pas un artiste qui aime souffrir, j’ai besoin de paix, d’amour, de rire, c’est comme ça que je suis la meilleure version de moi-même. Je m’aime au plus haut point, à savoir je connais mes défauts et mes qualités – et je suis loin d’être le meilleur – et j’aimerais que sur Terre tout le monde s’aime au plus haut point. Il y aurait moins de cette frustration responsable de la jalousie, de la violence, de la convoitise. J’aimerais m’aimer aussi fort que mes parents m’aiment. Inconditionnellement. J’ai l’impression que rien ne pourra changer leur amour pour moi. Je n’ai pas d’enfant, mais je suis témoin de leur amour pour moi. Aussi, mon art n’est pas prioritaire, mais il aère, il distrait. Pour moi, les artistes sont des soupapes de dépressurisation.
Vous tenez le rôle principal dans la série Othello que vous avez écrite. Vous y êtes un ancien agent spécial un peu spécial qui revient aux affaires…
J.P : Cette série est inspirée d’Othello, la tragédie de William Shakespeare. Et qui dit Othello dit Desdémone, sa femme. Dans ma série, Othello, ancien des Forces spéciales, est accusé du meurtre de sa femme. Il perd toutes ses accréditations pour exercer, mais il est réhabilité à la suite de meurtres en série et d’un kidnapping d’enfant et reforme son contingent d’hommes. Mais il veut avant tout retrouver le meurtrier de sa femme. Parce que ce n’est pas lui.
L’idée vous est venue il y a longtemps ?
J.P : Non, mais j’avais travaillé le monologue d’Othello dans la pièce de Shakespeare en français pour le présenter à des casteurs il y a 12 ans. Parce que le personnage est haut en couleurs et a été joué par de nombreux acteurs de renom. Un client a montré le monologue à des agences artistiques de Los Angeles et de New York et elles ont voulu que j’envoie une vidéo en anglais. Je me suis alors posé la question : qui serait Othello aujourd’hui ? J’ai fait une vidéo avec mon personnage moderne en plus du monologue en anglais et j’ai envoyé le tout aux Américains qui m’ont invité à venir les rencontrer en juin prochain.
Sur la scène du théâtre à l’italienne de Bagnères-de-Luchon.
Mais avant cette rencontre avec les Américains, vous avez choisi d’organiser une avant-première à Toulouse…
J.P : Oui, je présenterai la bande-annonce et le premier épisode de la série dans une salle de cinéma toulousaine le 22 avril prochain. Je suis chauvin ! La France est un pays extraordinaire. Je n’ai pas vraiment de fascination pour les Etats-Unis, mais je présenterai ensuite le tout à New York en juin.
Cet Othello vous ressemble ?
J.P : Non, pas du tout. Il a des méthodes expéditives. Je n’y connais pas grand-chose au militaire et j’ai confiance en la justice. Lui, non.
« Je ne suis pas un artiste qui aime souffrir. »
Qu’est-ce que vous changeriez de la société actuelle ?
J.P : Dans cette société me manque la bienveillance, la vraie, celle qui est nimbée d’amour, de respect, de l’oubli de soi pour aider l’autre, et l’humilité.
A quoi rêvez-vous ?
J.P : Personnellement, j’aimerais que mes proches soient immortels. C’est insupportable de penser que parce que c’est dans l’ordre des choses, je vais être amené à dire au-revoir à mes parents. Je rêve que cela continue. Professionnellement, rencontrer Denzel Washington. Et je le rencontrerai. Parce que c’est avec lui que tout a commencé… J’appellerai alors mon père pour le lui dire et il sera plus heureux que moi. Je le sais.
Auteure prolifique de 57 livres pour la jeunesse et les adultes, mère de deux « fournées » d’enfants, Agnès Desarthe, 57 ans, sait voyager à travers les âges…Dans son dernier roman, Le château des rentiers (1), elle nous invite dans une tour du XIIIème arrondissement de Paris, chez ses grands-parents maternels, juifs de Bessarabie rescapés des camps d’extermination… Pour goûter avec eux à une vieillesse vécue comme un privilège, la porte de leur deux-pièces ouverte à leurs amis. Rencontre avec une femme puissante. Au-delà du temps.
A quoi ressemblait votre enfance ? Agnès Desarthe : Un grand frère (2), une petite sœur (3), moi au milieu et deux parents. Tout ça dans le même appartement dans le XIIIème arrondissement de Paris. De mes 0 à mes 19 ans dans une vraie continuité. Nous étions cinq, une famille très soudée. Certains amis nous appelaient « le clan », parce que nous aimions les mêmes films, les mêmes musiques.
Mon père (4) exerçait son métier de pédiatre dans l’appartement. Nous espionnions les patients quand ils arrivaient à son cabinet. Nous ne devions pas faire de bruit et, le week-end, nous allions jouer dans la salle d’attente avec les jouets qui avaient l’air mieux que les nôtres.
Ma mère a arrêté d’enseigner quand je suis née. Elle était angliciste de formation. Ensuite, elle prenait les rendez-vous pour mon père et faisait sa comptabilité. Rien de bien exaltant. Je lui ai d’ailleurs imaginé une vie plus glamour dans un livre pour enfants (5) …
J’ai adoré mon école maternelle, La cité dorée. C’était une école de quartier qui ressemblait à une maison de dessin d’enfant. J’y ai appris la pratique artistique, la liberté qu’elle donne, la transe dans laquelle elle nous plonge… Ma maîtresse, qui est devenue un personnage que j’évoque dans mes livres, me conseillait pour la peinture avec le même sérieux que pour l’alphabet. Je ne voulais pas aller en récré, je voulais peindre !
« J’étais décidée à écrire et à devenir écrivain tôt. Déjà à 15 ans, quand je regardais l’émission Apostrophes, je me demandais quand j’y serais invitée. »
Quelles études avez-vous choisies ? A.D : J’ai fait hypokhâgne et khâgne un peu par hasard. Surtout parce que je savais qu’ensuite, si je réussissais le concours de Normale Sup, je serais payée pour étudier et pourrais être ainsi autonome financièrement. J’étais prête à tout renier pour y entrer. Seul mon objectif comptait.
On me disait que je n’étais pas bonne en dissertation, alors j’ai choisi l’anglais en spécialité et il m’a sauvée. Je suis ainsi entrée à l’Ecole Normale Supérieure. C’était génial. On était en effet payés et il y avait du vin à la cantine. Le paradis.
A 19 ans, je gagnais ma vie. J’étais passionnée d’études, j’allais à tous les cours qu’on pouvait prendre, pour apprendre encore et encore. Je n’étais pas blasée, ni effrayée d’avance. Je travaillais dans la joie.
Vous vouliez enseigner ? A.D : Jamais. J’ai remplacé une fois ma prof de version à Normale Sup et j’ai réalisé que cela me prenait tout mon temps, parce que je voulais sortir les élèves d’affaires. Alors si j’avais enseigné à des élèves de cinquième de quartiers défavorisés, je me serais donnée totalement en pâture et je n’aurais pas pu écrire. J’ai donc demandé un congé pour convenance personnelle, puis un deuxième, puis un troisième… Et au bout d’un moment, ils m’ont dit que je n’y avais plus droit, mais j’ai quand même coché « congé » et cela m’a éjectée du système.
Mais, en tant que Normalienne, ne deviez-vous pas des années d’enseignement à l’Education Nationale ? A.D : Si, des années que je n’ai pas faites. Un jour, j’ai reçu un coup de fil de l’Education Nationale et j’ai pensé que c’était la fin de ma clandestinité. La personne qui m’a appelée avait l’impression de m’avoir causé du tort en m’ayant perdue. C’était une conversation surréaliste. Je n’ai pas trop parlé. Elle m’a demandé si j’étais heureuse. J’ai répondu oui. Elle a dit : alors je reperds votre dossier ? Et elle a raccroché. Et puis, j’ai été dénoncée au Rectorat par une ancienne prof, à qui on a répondu qu’avec mes livres je faisais autant pour les enfants que si j’enseignais. C’est fou ! J’ai beaucoup de gratitude pour ce système qui m’a comprise dans mon désir d’écrire pour les enfants et s’est montré d’une générosité effarante.
Depuis quand saviez-vous que vous vouliez écrire ? (Elle montre une assiette qu’elle a peinte à l’âge de 4 ans et demi). A.D : A la maternelle, j’alignais des motifs par ligne sur les jupes des princesses que je peignais, qui étaient comme des signes avec un rythme… Alors que je ne savais pas encore écrire. Pendant longtemps, faire ça, c’était écrire pour moi. J’avais aussi la passion de raconter des histoires à mes camarades, des fables, c’était mon véhicule social.
J’étais décidée à écrire et à devenir écrivain tôt. Déjà à 15 ans, quand je regardais l’émission Apostrophes, je me demandais quand j’y serais invitée.
Je ne sais pas d’où ça vient… Dans ma famille, on nous poussait à faire des études ; il fallait faire une grande école, de la musique et être parfaits. On était des enfants chanceux de parents qui avaient eu une vie difficile et des petits-enfants de grands- parents qui avaient eu une vie horrible. On avait intérêt à honorer notre chance.
« J’écris quand j’ai le temps, au milieu de l’autre temps. »
Comment avez-vous commencé dans le métier d’écrire ? A.D : J’ai cherché du boulot dans l’édition. On m’a donné des fiches de lecture, mais je ne gagnais pas bien ma vie. Au bout d’un an, j’avais 23 ans, un éditeur pour qui je travaillais m’a envoyée chez Geneviève Brisac, qui était éditrice à l’Ecole des Loisirs et normalienne comme moi. Elle m’a demandé quel était le livre qui m’avait vraiment plu. Contrairement à tous les autres éditeurs qui me demandaient si je savais taper à la machine… Je lui ai répondu qu’elle ne pouvait pas connaître Une lubie de M. Fortune de Sylvia Townsend Warner.
Et elle m’a dit : ça tombe bien, c’est un de mes livres préférés. Un vrai coup de foudre ! En sortant de son bureau, j’avais du travail : un livre à traduire. Et c’est comme ça que j’ai commencé tout ce que j’ai commencé. Si Geneviève avait édité des livres pour cigognes, j’aurais écrit des livres pour cigognes. Je voulais travailler pour elle, parce que c’était une éditrice et une auteure géniale.
Vous avez donc commencé par la traduction. Quand est venu le temps de votre écriture ? A.D : Un jour, Geneviève Brisac, qui savait que je voulais écrire, m’a demandé un texte. Je lui ai proposé un conte, mais elle l’a refusé. Un moment cuisant, mais fondateur de la confiance qui nous lie. Parce que j’ai su alors qu’elle n’accepterait rien pour me faire plaisir. Elle m’a demandé dans la foulée d’écrire quelque chose de proche de moi. Et j’ai écrit Je ne t’aime pas Paulus (6). A partir de là, j’ai toujours traduit des livres pour enfants et toujours écrit. Quand Geneviève Brisac a quitté l’Ecole des loisirs, je l’ai quittée aussi.
Elle a ensuite parlé de moi à Olivier Cohen, fondateur des éditions de l’Olivier, qui m’a alors demandé un livre pour adultes. Et il y a eu un enchaînement vertueux incroyable. Aujourd’hui, je continue de traduire et j’écris.
Vous dîtes souvent que vous faîtes d’autres choses qu’écrire… A.D : La maison est plus grande maintenant que nous vivons à la campagne et me prend beaucoup de temps. Le ménage, le linge, le jardin… Et, à force de temps passé à régler l’administratif, j’ai aussi l’impression d’être la secrétaire martyrisée de Mme Desarthe qui ne veut pas être dérangée. Je fais aussi beaucoup la cuisine ; c’est pour moi un moment de créativité magique.
Il y a toujours aussi le livre en cours et tout ce qu’il y a autour : écrire une chanson, une nouvelle, un article, participer à un projet collectif, à un spectacle… Des tas de petites choses périphériques qui peuvent m’éloigner du livre pendant des semaines. J’adorerais ne rien faire à certains moments, mais je n’y arrive pas. Je lis des interview d’écrivains à l’emploi du temps bien réglé. Mais chez moi, c’est haché.
J’écris quand j’ai le temps, au milieu de l’autre temps. J’ai du mal à résister à l’amitié. Si un ami m’appelle et me dit : je viens, je ne lui dis pas que je travaille, même si je travaille. C’est toujours plus important, l’amitié. A la campagne, les gens passent aussi et j’adore ça. Ils frappent à la porte, prennent un café, nous allons nous promener. Je ne suis pas dans la rentabilité. Mais mon système fonctionne. Et je n’écris jamais la nuit, parce que je ne veux pas abîmer mon sommeil.
D’où vient votre grand pouvoir de concentration ? A.D : L’année où j’ai commencé à écrire, j’ai eu mon premier enfant, qui ne faisait pas beaucoup la sieste et j’ai développé l’habilité à être complètement à ce que je fais quand je le fais. Ça m’a permis d’être maman, traductrice, écrivain… Le travail ne s’arrête jamais. Je monte en pression comme une cocotte-minute et, ensuite, je lâche ce que j’ai à écrire.
Vous vous êtes installée en Normandie il y a quelques années. Paris, vous y allez encore ? A.D : Oui, pour voir trois de mes enfants maintenant. C’est la ville où j’ai vécu plus de 50 ans et j’aime qu’elle me soit familière, d’autant plus parce que je n’y vis plus. J’ai un attachement tendre à certains quartiers qui sont liés à certains souvenirs. Le temps devient de l’espace et l’espace du temps. Cela donne une sensation presque enivrante. Mais les gens ont l’air malheureux et font la gueule. Tout y est compliqué et on y est sans cesse confronté à une brutalité gratuite et à la misère. Tout ça est sorti de ma vie maintenant. Dans ma campagne normande, j’ai perdu énormément en stress.
« Pour eux, c’était du temps en plus, la vieillesse. Un privilège. Ils ne comptaient pas à l’envers. Ils savaient la chance qu’ils avaient d’être vivants. »
Dans votre nouveau livre, vous évoquez vos grands-parents maternels qui, à 65 ans, achètent un petit deux-pièces sur plan dans le XIIIème arrondissement ? A.D : Ils ont quitté leur petit appartement sans ascenseur rue du Vieux Colombier pour se rapprocher de nous. Notre quartier -à l’exception de notre immeuble en pierre de taille et de mon école- avait été totalement détruit. Jusqu’à la construction des tours, comme celle où se sont installés mes grands-parents. Ils y laissaient leur porte ouverte à leurs amis. Il régnait là une vraie culture de l’amitié, qui venait peut-être de leur passé communiste. Ils avaient traversé la même tragédie et ils avaient la solidarité du deuil. Beaucoup avaient perdu un conjoint en camp d’extermination.
La mort est derrière eux, ils y ont échappé… Cette communauté qu’ils créent, c’est que du bonheur au présent… A.D : Pour eux, c’était du temps en plus, la vieillesse. Un privilège. Ils ne comptaient pas à l’envers. Ils savaient la chance qu’ils avaient d’être vivants.
Mes grands-parents, c’était l’expérience collective de l’élimination. Cela m’a fait réfléchir sur le comment ma génération, qui a vécu des années plutôt « pépères », sans véritable drame collectif, allait vieillir. Parce que nous pouvons parfois avoir des réactions de colère d’enfants gâtés. Un peu comme les boomers qui nous précèdent.
Je suis très attachée au collectif. Parce que nous vivons plus vieux aujourd’hui, mais aussi parce que nous savons que nous allons perdre en vigueur et en pouvoir d’achat, il faut nous organiser. Que faire de nous ? Que faire pour ne pas encombrer ? Et, plus égoïstement, que faire pour pouvoir continuer et être là aussi utilement et agréablement que possible ?
« Je suis à la fois une jeune mère d’enfants adultes et une vieille maman d’enfants ados. Je suis les deux en même temps. Je ne sais vraiment pas quel âge j’ai. »
Vous vous sentez vieillir ? A.D : J’ai eu une pathologie de vieille alors que je n’étais pas âgée et cela m’a permis d’effectuer un voyage dans le temps un peu plus rapide. Je ne pratique pas l’écriture thérapeutique, mais plutôt l’écriture spéculative. J’ai ainsi eu l’occasion d’aller explorer une cohorte qui n’est pas la mienne, de l’espionner. Peut-être que je n’aurai pas l’envie d’écrire là-dessus quand je serai vieille, alors autant le faire maintenant.
Qu’est-ce que ça veut dire être vieille pour vous ? A.D : J’ai deux fournées d’enfants. Quatre en tout. Une double maternité. Je suis à la fois une jeune mère d’enfants adultes et une vieille maman d’enfants ados. Je suis les deux en même temps. Je ne sais vraiment pas quel âge j’ai. Parce que quand je suis avec mes enfants adultes, je me sens très jeune, et quand je suis avec les ados, je me sens très vieille. Je n’ai pas l’âge des mères de leurs amis et je vois bien que je ne suis pas la même mère non plus. Cela crée une confusion en moi que je n’essaie pas de mettre au clair. Pour moi, le temps d’une vie ne se déroule pas sous la forme d’une flèche ou d’un vecteur, mais bien plutôt comme une bobine. On est tout le temps près du noyau, du début.
« Pour moi, le temps d’une vie ne se déroule pas sous la forme d’une flèche ou d’un vecteur, mais bien plutôt comme une bobine. On est tout le temps près du noyau, du début. »
Dans le livre, les amis à qui vous proposez votre projet d’habitat collectif, de phalanstère, ne sont pas tous convaincus… A.D : Oui, pas tous, parce que certains ne se sentent pas concernés et éprouvent même du dégoût. Mais d’autres regardent déjà les annonces, repèrent même des hameaux… L’objet même du livre, c’est de me donner l’auto-envie d’y être puisque je vais y être à un moment. Il doit bien y avoir quelque chose d’agréable.
Je crois que rester visitable est important. Et puis, comme le sirop qu’on doit diluer parce qu’il est trop concentré à boire, c’est bien de diluer la famille dans l’amitié. Comme dans les expériences collectivistes. Quand on porte une poutre à cinq, c’est moins lourd que tout seul. Alors pourquoi ne pas se répartir le poids de la vieillesse.
(1) Editions de l’Olivier, 2023. (2) Laurent Naouri, chanteur d’opéra. (3) Elsa Rooke, metteuse en scène d’opéra. (4) Aldo Naouri. (5) La femme du bouc émissaire, L’école des loisirs, 1993. (6) L’Ecole des Loisirs, 1991.
La cathédrale Saint-Etienne, chef d’œuvre de l’architecture gothique, date du XIIIème siècle. Ne manquez pas ses vitraux exceptionnels et son horloge astronomique.
La Cathédrale Saint-Étienne d’Auxerre reflète à elle seule le riche passé religieux et culturel de la région. Sa construction s’est étendue du XIIIème au XVIème siècle. Ce qui en fait d’elle une merveilleuse vitrine de différents styles architecturaux gothiques. Sa façade, ornée de sculptures délicates et de gargouilles, capte immédiatement l’attention, tandis que son imposant portail invite de fait les visiteurs à entrer et à découvrir les trésors qu’elle renferme.
Un intérieur lumineux
L’intérieur de la cathédrale Saint-Étienne s’avère tout aussi impressionnant, avec ses hautes voûtes, son ambiance solennelle et ses magnifiques vitraux. Remarquables de beauté et de finesse, ces derniers offrent un spectacle de lumière et de couleur qui évolue tout au long de la journée. Datant principalement du XIIIe siècle, ils narrent des scènes bibliques et la vie des saints et constituent un précieux témoignage de l’art médiéval.
Le chœur, quant à lui, est entouré de chapelles rayonnantes qui ajoutent à la grandeur de l’ensemble architectural. L’un des éléments les plus fascinants de la cathédrale est son horloge astronomique du XVe siècle, une merveille technique et artistique de l’époque.
Au-delà de son importance religieuse, la cathédrale Saint-Étienne d’Auxerre joue aujourd’hui encore un rôle central dans la vie culturelle de la ville. Elle accueille régulièrement des concerts de musique classique et des événements qui bénéficient de son exceptionnelle acoustique et de son cadre historique unique. Tout en faisant rayonner sa splendeur. Visiter la cathédrale Saint-Étienne d’Auxerre, c’est plonger dans l’histoire de la Bourgogne. Qu’il soit croyant, amateur d’histoire, d’art ou simplement en quête de beauté, le visiteur en ressort fort d’une expérience inoubliable.
Situé au cœur de la ville historique, ce quartier est l’un des endroits les plus emblématiques et charmants de la région. Il tire son nom de la célèbre Tour de l’Horloge, un monument historique qui domine les toits des ruelles médiévales avec sa silhouette caractéristique.
La Tour de l’Horloge est un vestige précieux de l’architecture médiévale et un symbole de l’histoire riche d’Auxerre. Elle servait autrefois de porte de ville et a été transformée au fil des siècles ; elle témoigne à elle seule des évolutions architecturales et des différentes époques qui ont laissé traces à la ville. Son cadran astronomique, ajouté au XVIe siècle, illustre la fascination de l’homme d’alors pour le ciel et les étoiles.
Coeur battant d’Auxerre entre passé et présent, avec ses petites rues pavées, bordées de maisons à colombages, de boutiques artisanales, de cafés et de restaurants, mais aussi ses placettes animées, le quartier de l’Horloge invite à la promenade et à la découverte des trésors cachés de la ville. Vous y ressentirez pleinement l’âme de la ville.
L’Yonne traverse Auxerre. Voie de commerce de la ville, la rivière a en effet été un axe vital pour son développement, un lien entre elle et le reste de la Bourgogne ainsi que Paris, via le canal du Nivernais. Ses quais aménagés témoignent aujourd’hui encore de ce riche passé, avec des bâtiments historiques tels que l’ancien grenier à sel et plusieurs maisons de négociants.
Mais les quais invitent aussi à la détente et à la découverte. Ils permettent au visiteur de découvrir autrement la beauté architecturale de la ville, une harmonie entre la pierre et l’eau et ce qu’elle peut dégager d’atmosphère nostalgique et romantique.
Le regard n’a de cesse de se porter tour à tour sur les façades colorées des maisons anciennes, les tourelles et les fenêtres à meneaux qui se mirent dans l’Yonne et offrent un spectacle enchanteur et changeant au gré de la lumière du jour… Mais aussi sur les jardins soigneusement entretenus, les espaces verts… Tout au long de sa promenade, le visiteur est invité à prendre le temps de vivre en pique-niquant ou en s’installant à la terrasse d’un café ou d’un restaurant pour déguster des spécialités locales et des vins de Bourgogne. Tout en gardant toujours vue sur la rivière et son cours tranquille et apaisant. Libre il est encore de choisir de quitter les quais pour découvrir pierre et eau en canoë, kayak ou en petit bateau. Ou de suivre le cours de l’Yonne à vélo pour découvrir les vignobles alentours.
Aux alentours d’Auxerre, les vignobles d’étendent à perte de vue. Baignés qu’ils sont par le soleil de Bourgogne et caressés par des brises légères, ils donnent naissance à des vins parmi les plus reconnus et appréciés en France et dans le monde entier.
A une trentaine de kilomètres au nord-ouest d’Auxerre, le vignoble de Chablis, est sans doute le plus célèbre. Réputé pour ses vins blancs élégants, minéraux et d’une grande finesse, Chablis bénéficie d’un terroir unique, composé de kimméridgien, une roche calcaire riche en fossiles de petites huîtres. Cette particularité confère aux vins une typicité et une complexité aromatique incomparables, célébrées par les amateurs de vin du monde entier.
Au sud d’Auxerre, les vignobles d’Irancy s’épanouissent dans un amphithéâtre naturel, offrant des vins rouges profonds et charnus, principalement issus du cépage Pinot Noir. Ces vins, aux arômes de fruits rouges et noirs, sont appréciés pour leur structure et leur potentiel de vieillissement. Irancy, avec ses paysages vallonnés et ses caves pittoresques, est une invitation à la découverte des traditions viticoles locales, où la passion et le savoir-faire se transmettent de génération en génération.
Non loin, Saint-Bris-le-Vineux se distingue par sa production exceptionnelle de vins blancs issus du cépage Sauvignon Blanc, une rareté dans une région dominée par le Chardonnay. Ces vins, frais et aromatiques, offrent une palette de saveurs où se mêlent agrumes, fleurs blanches et notes minérales. La visite des caves de Saint-Bris est une expérience oenotouristique enrichissante, permettant de découvrir une facette différente de la viticulture bourguignonne.
Les vignobles aux alentours d’Auxerre sont également le théâtre de nombreuses activités oenotouristiques. Des dégustations dans les domaines aux balades à vélo entre les vignes, en passant par des ateliers de découverte des vins et des marchés de producteurs locaux. Chaque expérience devient occasion de plonger au cœur de la culture viticole de la région. Les vignerons, fiers de leur terroir et de leur travail, accueillent volontiers les visiteurs pour partager leur passion et leurs connaissances.
Perchée sur sa colline éternelle, Vézelay est un lieu chargé d’histoire et de spiritualité. Ce petit village, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, est célèbre pour son abbaye Sainte- Marie-Madeleine, un chef-d’œuvre de l’art roman qui attire chaque année des visiteurs du monde entier, pèlerins ou amateurs d’art et d’histoire.
L’abbaye de Vézelay, fondée au IXe siècle, est avant tout un lieu de pèlerinage. Dès le Moyen Âge, en raison de ses reliques de Marie-Madeleine, elle s’est en effet imposée comme l’un des points de départ majeurs pour le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. A travers les siècles, et ceci malgré l’histoire religieuse et les conflits, elle a su garder toute sa splendeur et son autorité.
L’architecture de l’abbaye reflète la quête de lumière et de spiritualité caractéristique de l’art roman. La basilique, avec sa nef majestueuse et ses voûtes harmonieuses, est baignée d’une lumière qui change au fil de la journée, filtrée par les fenêtres ornées de vitraux délicats. Le tympan du portail central, représentant le Jugement dernier, est une œuvre d’art emblématique qui fascine par sa richesse iconographique et sa profondeur symbolique.
Un lieu magique
La montée vers la belle lumineuse, à travers les ruelles étroites de Vézelay, est en elle-même une expérience unique. Le village, avec ses maisons soignées en pierre, ses ateliers d’artisans et ses petites boutiques, semble suspendu tout comme elle dans le temps. Et les points de vue sur la campagne environnante, avec ses vignobles et ses vallées verdoyantes, ajoutent à la magie du lieu.
L’abbaye de Vézelay n’est pas seulement un monument historique ; elle est un lieu vivant de rencontre et de réflexion, un lieu culturel et spirituel. Tout au long de l’année, elle accueille des concerts, des expositions et des conférences. Les célébrations liturgiques en son sein, en particulier lors de la fête de la Sainte-Madeleine ou à l’occasion de Noël, sont des moments forts qui perpétuent la tradition religieuse du lieu. Tout en sobriété et en pureté. Des moments rares.
Vézelay invite son visiteur, qu’il soit croyant ou non, à un voyage de contemplation, de découverte de soi et d’ouverture au monde. Inoubliable.
Enfant du Sud-Ouest, Cédric Soulette a grandi sur un terrain de rugby jusqu’à devenir un pilier émérite du XV de France et marquer les mémoires d’un « coup de tête » lors de la demi-finale de la Coupe du monde de 1999 contre les All Blacks. L’ancien international consacre aujourd’hui sa deuxième vie à l’art et a choisi le coq -toujours- pour figure de proue de son entreprise. A quelques mois de la prochaine Coupe du monde de rugby, il nous confie son désir toujours ardent de défendre l’identité française.
Vous êtes né à Béziers. Jouer au rugby, était-ce réellement un choix ? Cédric Soulette : Non, pas vraiment, c’était plutôt par dépit. Comme beaucoup d’adolescents, j’ai fait beaucoup de sport. J’ai commencé par le judo, ce qui m’a aidé d’un point de vue psychomoteur, mais je n’y prenais pas de plaisir immédiat. Au village, j’ai fait aussi du foot pendant deux ans, mais j’ai marqué deux fois contre mon équipe et on m’a demandé alors d’aller voir du côté du club de rugby.
L’aventure du rugby se joue le premier jour. J’avais 13 ans, l’entraîneur, M. Hugon, m’a dit tout simplement : comment tu t’appelles ? J’ai répondu : Cédric. Et il a lancé à la cantonade : eh bien, faîtes comme Cédric ! Je me suis senti valorisé. C’est important pour se construire à la pré-adolescence et cela génère une belle énergie.
Vous avez joué pendant 15 ans dans trois clubs prestigieux que sont Béziers, Toulouse et Clermont-Ferrand et 13 fois en équipe de France. Un beau palmarès ! Quels souvenirs en gardez-vous ? C.S : J’ai joué dans toutes les toutes catégories en équipe de France depuis mes débuts en junior jusqu’à la grande équipe de France. Je dois tant au ballon ovale et à tout ce qui conditionne ce jeu. De mon expérience de cette époque, qui n’a rien à voir avec celle que vivent les joueurs d’aujourd’hui, je garde le souvenir de l’amateurisme, de la disponibilité des gens pour que cette discipline fonctionne, de la richesse de la diversité sociale des joueurs que nous étions et de nos échanges. J’ai vécu la double transition de l’amateurisme au semi-professionnalisme et du semi-professionnalisme au professionnalisme. Dans les équipes, il y avait alors aussi bien des banquiers que des maçons. Aujourd’hui, les joueurs sont plus protégés et adulés. Comme une élite. On les regarde derrière une barrière.
« Cela m’a permis de réfléchir à ce que je voulais vraiment et à me protéger pour ne pas oublier qui je suis. »
Etes-vous nostalgique de votre époque ? C.S. : Non, j’ai vécu les trois phases, car j’ai eu aussi droit à l’adulation. Cela m’a permis de réfléchir à ce que je voulais vraiment et à me protéger pour ne pas oublier qui je suis.
Les Français ont le souvenir de votre «coup de tête» pour neutraliser le n°7 des All Blacks lors de la victoire des Bleus en demi-finale de la Coupe du monde en 1999… Et vous ? C.S. : C’est vrai que nous avons vécu un moment en communion avec les passionnés du rugby. Le peuple français a classé ce match dans les matchs de légende, mais moi, je retiens que nous avons perdu en finale. Comme beaucoup de sportifs de haut niveau, j’ai pris l’habitude de regarder ce que je manque. Une compétition se gère émotionnellement au-delà de la victoire en demi-finale. Et le conditionnement mental doit nous pousser vers l’objectif qui suit. Nous nous sommes un peu endormis après la victoire en demi-finale. C’est une leçon. Alors, de mon côté, je retiens plutôt notre victoire en Grand Chelem en 1998. Une compétition menée avec un état d’esprit constant de détermination et de cohésion.
Le coup de tête, c’est sympa, mais c’est un détail. Dans un sport collectif, on doit être plus sur la performance du groupe que sur une action de jeu.
En 2005, votre carrière de sportif de haut niveau prend fin et vous commencez une deuxième vie dans le domaine de l’art. Qu’est-ce qui vous a motivé dans ce virage ? C.S. : J’étais dans une curiosité précoce. J’ai aimé très jeune la matière, les artistes… Et j’aimais dessiner. J’ai très tôt acheté des pièces originales, des tableaux… Ce virage, je l’ai anticipé. J’avais le souhait d’aller vers l’art quand je jouais encore au rugby. Je dessinais quand je m’ennuyais en fin de soirée et j’offrais mes dessins. J’avais besoin de m’évader plutôt que de bâiller.
Quand avez-vous créé votre entreprise Stan’art ? C.S. : Quand je jouais encore, pour facturer mes droits à l’image. « Stan » est le sobriquet qu’on m’avait donné avec affection dans l’équipe. Et puis, c’est devenu quelque chose de sérieux.
En tant que joueur, j’étais très investi dans l’associatif dédié aux enfants malades. Mais quand j’ai arrêté le rugby à haut niveau, je ne me suis plus senti crédible auprès des enfants, eux qui sont tellement dans le présent ; je ne voulais pas seulement leur parler de qui j’étais avant. Alors, j’ai plutôt choisi de mener mon entreprise en y associant une action associative. Je verse donc de l’argent à des associations.
Vous préférez donc vous concentrer sur le présent ? C.S. : Oui, la vie d’un sportif de haut niveau, c’est une remise en question constante, il ne faut pas s’endormir. Et pour faire une création, il faut travailler et sans cesse se renouveler. Parfois, cela n’est pas facile, parce que mes idées n’avancent pas aussi vite que je le voudrais. Mais quand j’arrive à mettre sur la table ce que je veux, après souvent des mois de travail et de doutes, j’en tire une réelle satisfaction.
Quelle est la mission de Stan’Art ? C.S. : Pour les initiés, aujourd’hui, Soulette, c’est le coq, et j’en suis heureux. J’ai en effet créé un coq qui peut être fabriqué dans toutes les matières et se décliner à mon envie et celle d’autres artistes quand je le leur confie. Au service des entreprises et des institutions. C’est une façon pour moi de défendre l’identité française. Parce que mon grand-père a été déporté, parce que j’ai joué en équipe de France, parce que j’ai eu un coq sur le maillot, parce que nous devons être fiers de nos couleurs… C’est mon coq, c’est moi qui l’ai créé. Je travaille aussi beaucoup sur le monde du vin, sur les grappes de raisin, et sur les enclumes, en hommage au poste de pilier que j’avais. J’étais une tête d’enclume dans l’équipe.
A quoi rêvez-vous aujourd’hui ? C.S. : J’ai créé 14 000 coqs ! Mais pour cela, je n’ai pu compter que sur ma volonté. Car, quand on passe de pilier à la création artistique, ce n’est vraiment pas facile. Aujourd’hui, à 51 ans, je n’ai plus envie de courir la planète pour solliciter les uns et les autres. J’ai besoin d’apaisement et d’avancer en choisissant mon temps de travail. Pour que mes dernières années d’activité deviennent un héritage. J’ai beaucoup appris sur moi et sur les autres et je souhaite me démarquer de ce que j’étais hier pour m’améliorer. La vie est là, fragile, mais elle est là. J’éviterai donc de me mettre la rate au court-bouillon.
Installée en République démocratique du Congo, la primatologue Amandine Renaud, 41 ans, consacre sa vie à la sauvegarde et à la conservation des chimpanzés, aujourd’hui menacés de disparition (1). Avec son association P-WAC (2), elle a fondé un centre de réhabilitation en pleine forêt (3), leur milieu naturel, et au cœur des populations locales. Rencontre avec une femme d’action passionnée.
Enfant, imaginiez-vous vivre en Afrique au cœur de la forêt et veiller sur des singes ?
Amandine RENAUD : J’ai toujours été attirée par le monde animal et la forêt. Je me souviens que j’enguirlandais les voisins qui se pendaient aux branches des arbres de crainte que cela leur soit douloureux. J’ai voulu travailler avec les animaux, la nature, et je suis passée par plusieurs phases, mais une chose est sûre, il fallait que mon métier dépote, me passionne et soit en lien avec la préservation de la nature.
Lipipi, orpheline recueillie à l’âge de six mois.
Comment vous est venue l’envie de devenir primatologue ?
A.R. : Selon ma famille, à sept ans, j’ai vu le film « Gorilles dans la brume » sur la vie de Dian Fossey. Mais je n’en ai pas un souvenir précis pour déclarer que cela m’aurait poussée à me dire « c’est ce que je veux faire ». En fait, je n’ai pas réussi à faire d’études scientifiques, alors je me suis d’abord tournée vers la finance. Un domaine qui m’a énormément appris en matière de rigueur et de budget. J’ai travaillé dans une banque pendant sept ans, ce qui m’a permis de financer mes voyages et la suite de mes études. A 22 ans, j’ai mis les pieds au pays des « poilus » comme je les appelle. Je suis partie en mission bénévole en Afrique et là, je suis tombée amoureuse des chimpanzés. Ils m’ont tellement appris, pour ne pas dire tout, sur le monde des primates. J’ai su alors que ma carrière était auprès d’eux ! A ce retour de mission, j’ai repris mes études par correspondance tout en travaillant, jusqu’à intégrer une université anglaise pour devenir primatologue (NDRL : le diplôme n’existe pas en France).
Vous menez aujourd’hui une thèse en anthropologie de la nature… Qu’est-ce que qui vous passionne dans la primatologie et dans ce nouveau domaine ?
A.R. : Avant la primatologie, j’ai étudié la psychologie. Ces deux domaines sont complémentaires car, ne l’oublions pas, nous sommes des primates ! J’ai ensuite choisi de passer en anthropologie de la nature afin d’étudier les relations hommes-faune sauvage. Ce qui s’avère nécessaire quand on veut mettre en place des stratégies de préservation d’espèces menacées par l’homme. Ces trois disciplines sont interconnectées : on étudie l’homme, le singe et leurs interactions pour mieux vivre en harmonie. La boucle est bouclée ! Malgré ce cursus universitaire, j’ai décidé de laisser la recherche de côté, et de me focaliser sur ce qui me tient vraiment à cœur : la protection in situ (4) des primates, de leur habitat et des actions concrètes de préservation et de sauvegarde des chimpanzés, avec l’implication des populations locales.
L’être humain partage un ancêtre commun et 99% de gènes avec le chimpanzé, son plus proche cousin. Mais une fois adulte, ce dernier a de 5 à 7 fois la force d’un homme.
« Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire. »
Albert Einstein
Quelle est votre journée-type de travail ?
A.R. : Je n’ai pas de journée-type. En forêt, aucune journée ne ressemble à une autre, mais je me lève toujours avec le soleil. Mon action consiste à recueillir, soigner et, à terme, remettre en liberté des chimpanzés victimes de braconnage et/ou de maltraitance. Je peux donc aussi bien observer les orphelins du site, intervenir en cas de maladie, aider l’équipe au suivi de faune sauvage que planter des arbres au camp, rencontrer les villageois pour travailler sur des projets, tout comme je peux aussi passer ma journée au bureau à chercher des fonds et des partenaires, gérer les réseaux sociaux, rédiger des rapports… Je donne aussi des conférences tout public et j’organise des animations pour les enfants. Et je gère l’équipe et la logistique.
(1) Les chimpanzés étaient deux millions au début du XXème siècle et ne seraient plus que 200 000, selon P-WAC. Ils sont présents dans 21 pays.
(2) Project for wildlife and apes conservation ou Projet pour la vie sauvage et la conservation des primates.
(3) Le centre est situé dans la forêt de Kiobo, à une dizaine d’heures de route de Kinshasa.
(4) Dans leur milieu naturel.
Pour lutter contre la déforestation qui sévit en RDC, P-WAC a déjà planté des milliers d’arbres.
40% des ménages français détiennent une assurance-vie. Ce placement tout terrain peut en effet s’adapter à tous les objectifs patrimoniaux. Mais pour en tirer le meilleur parti, encore faut-il avoir choisi un contrat de qualité.
L’assurance-vie est une enveloppe financière dans laquelle peut être versé de l’argent librement et sans engagement. L’assureur s’occupe de tout et notamment de la valorisation du capital. À tout moment, le détenteur peut récupérer tout ou partie de son épargne. Et la règle fiscale lui devient plus favorable dès que le contrat atteint huit ans d’existence. S’il décède, le capital est transmis, dans un cadre fiscal avantageux, au(x) bénéficiaire(s) qu’il a désigné(s) dans le contrat.
Un placement à équilibrer
Ce que rapporte l’assurance-vie dépend des supports financiers choisis pour investir. Les fonds en euros, qui garantissent la sécurité du capital, ont depuis dix ans un rendement en baisse. Mais il est également possible d’investir sur des supports en actions aux rendements bien plus élevés certaines années, qui, eux, sont sans aucune garantie en capital.
Les fonds en euros restent cependant un outil indispensable pour sécuriser un capital d’autant plus que les montants investis n’y sont pas plafonnés. Mais pour gagner plus, il est intéressant de diversifier la mise et donc de prendre des risques. La gestion pilotée ou encore la pierre-papier peuvent être, par exemple, des solutions.
Plus de 200 contrats d’assurance-vie sont aujourd’hui commercialisés. Avancer sur ce marché avec prudence et prendre le temps d’examiner les offres avant d’en choisir une est essentiel.
Quelle que soit votre état de santé d’aujourd’hui, si vous avez au moins 18 ans, vous pouvez, si vous le souhaitez, rédiger des directives anticipées concernant votre fin de vie.
POURQUOI FAIRE CETTE DÉCLARATION ?
Pour faire connaître à votre médecin et à vos proches ce que vous ne voulez pas en ce qui concerne les décisions médicales à prendre si vous vous retrouviez dans l’incapacité de communiquer à l’approche de votre fin de vie, notamment après un accident grave ou à l’issue d’une maladie rare.
QUAND LA RÉDIGER ?
N’importe quand, que vous soyez en bonne santé ou malade, certains évènements s’avérant propices (changement de conditions de vie, annonce d’une maladie rare…)
Sa validité n’a pas de limite de temps et vous pouvez la modifier ou l’annuler à tout moment.
COMMENT VOUS Y PRENDRE ?
En écrivant vos directives sur une simple feuille de papier datée et signée ou en remplissant un formulaire (cf. modèles sur has-santé.fr ou solidarites-sante.gouv.fr ou appeler le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie au 08 11 02 03 00 – 0,006 euros/mn + prix d’un appel local).
En faisant écrire à quelqu’un à votre place, devant vous et deux témoins, si vous êtes dans l’impossibilité physique d’écrire seul.
QUELS ÉLÉMENTS INDIQUER ?
Votre identité et vos coordonnées, celles de votre personne de confiance* si l’avez désignée (ce qui est recommandé).
Les traitements ou actes médicaux à engager, limiter, arrêter ou refuser : réanimation, assistance respiratoire, dialyse, alimentation artificielle, maintien artificiel de vos fonctions vitales, sédation profonde et continue associée à un traitement de la douleur jusqu’au décès…
D’autres informations, souhaits ou convictions : situation personnelle ou familiale, présence de personnes auxquelles vous tenez, lieu de fin de vie, craintes (douleur, angoisse…), etc.
Où conserver votre document ?
Chez vous dans un endroit facilement accessible. Vous pouvez aussi le confier à votre personne de confiance* ou à vos proches ou le remettre à votre médecin ou à l’établissement où vous êtes admis (il sera intégré à votre dossier médical) ou encore l’enregistrer dans votre dossier médical partagé.
Informez votre personne de confiance, votre médecin et vos proches de son existence et de son lieu de conservation.
*C’est elle qui sera consultée en priorité comme témoin de vos volontés. Vous pouvez désigner toute personne majeure de votre entourage dès lors qu’elle accepte cette mission.
80% des ménages français détiennent un livret A, qui pèse 343,4 milliards d’euros (fin 2021). Mais avec la hausse des prix, le poids des livrets doit être limité dans votre patrimoine pour l’optimiser.
L’argent que vous avez placé sur un livret d’épargne ne connaitra pas de baisse, c’est garanti. Mieux, il va grossir, un taux d’intérêt étant appliqué par quinzaine. Toute personne, même mineure, peut détenir un livret A. Pas de frais, pas d’impôt sur les gains et liberté totale d’y effectuer des versements –en respectant les plafonds sur les livrets réglementés (22 950 euros pour le livret A)-, puis d’y retirer de l’argent en cas de besoin.
Même si le taux annuel du livret A est passé de 1 à 2% au 1er août dernier, y compris de tout impôt, il ne fait pas d’étincelles. Et pourtant, même si son rendement est faible, il est un matelas de sécurité financière qui a pour avantage d’être immédiatement disponible par un virement sur le compte courant. Pour autant, inutile de remplir à l’excès ses livrets. C’est une source d’appauvrissement compte de l’inflation.
Surnommé à ses débuts « Le fou chantant », Charles Trenet est l’auteur de mille chansons à l’inspiration souvent poétique. Cet artiste exceptionnel est né dans une « maison aux volets verts » à Narbonne le 18 mai 1913. Située au 13 de la rue qui porte aujourd’hui son nom, la bâtisse fut aussi pour lui un lieu d’inspiration et d’épanouissement de son talent artistique. Ouverte au public depuis novembre 2000, la maison Trenet propose une scénographie audiovisuelle et interactive. Le visiteur peut y découvrir documents d’archives et souvenirs personnels ; il se retrouve plongé dans le « jardin extraordinaire » chanté par Trenet.
2. Cathédrale Saint-Just et Saint-Pasteur et Cloître
Héritière des cathédrales gothiques du Nord de la France, la cathédrale Saint-Just et Saint-Pasteur domine la ville. Doté de voûtes audacieuses, ce vaste chœur hisse ses arcs-boutants et ses clochers à plus de 60 mètres, tandis que le retable sculpté de la chapelle Notre-Dame de Bethléem, chef d’œuvre de l’art gothique européen du XIVe siècle, se dévoile avec raffinement. Au cœur du centre historique médiéval, la cathédrale constitue, avec le cloître et le palais des Archevêques, un ensemble monumental prestigieux.
Située à l’étage de la Chapelle de l’Annonciade, la salle dite du Chapitre, présente une pièce de plan carré, couverte d’une coupole en briques qui lui confère un curieux phénomène acoustique de propagation du son, d’un angle à l’autre de la pièce. Le Trésor réunit des pièces de la période carolingienne à l’époque moderne : une plaque d’évangéliaire en ivoire sculptée au IXe siècle, une pyxide hispano-mauresque du XIe siècle, le pontifical enluminé de l’archevêque Pierre de la Jugie, la tapisserie flamande de la Création (1500) ainsi que d’autres objets liturgiques exceptionnels.
Le Pavillon de style Baltard fut construit au début du siècle près du canal de la Robine. Sa superbe structure métallique, ses piliers et ses portes de pierre, mais aussi sa toiture majestueuse abritent un des plus beaux marchés de France. Respectueusement rénovées, les halles ont acquis encore plus de séduction grâce aux transparences des vitres et au jeu des lumières et des couleurs intérieures. Près de 70 commerces y proposent les meilleurs produits frais de la région, des fruits et légumes, en passant par le poisson, les fromages ou encore les vins d’Occitanie. Ce marché unique est reconnu dans tout le Languedoc pour sa qualité, son choix et son ambiance. A visiter absolument pour le plaisir des yeux et du palais !
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Les halles sont ouvertes 365 jours par an de 7h à 14h.
Le pont des Marchands a la particularité d’être un des rares encore habités de France. Il est construit entre l’ancienne cité de Narbo Martius, sur la rive gauche, et l’ancien bourg médiéval de la rive droite. Durant l’époque romaine, il comptait six ou sept arches, franchissait l’Atax -l’Aude- et accueillait le passage de la via Domitia. Mais le parcours de l’Aude a été modifié au cours de l’Antiquité tardive, puis au Moyen-Age, et le pont franchit désormais le canal de la Robine.
Très bien conservé, il est cependant difficilement perceptible dans son architecture d’origine. Ses six ou sept arches et rampes d’accès sont en effet noyées dans le bâti environnant, car elles servent de caves aux maisons qui surmontent le pont depuis l’époque médiévale. Une seule arche demeure encore visible.
Terres de reliefs naturels, d’histoire et de résistance, la vallée de l’Isère et le Vercors offrent au visiteur curieux moult possibilités de se faire découvrir. De leurs sentiers de randonnée à leurs couvents en passant parleurs villages d’exception. Une véritable bouffée d’air pur.
A l’entrée du Vercors, sur le sentier « Au fil de la Bourne »
La communauté de communes Saint-Marcellin Vercors Isère, en lien avec le Parc régional du Vercors, a aménagé ce nouveau sentier balisé de 33 km. La randonnée itinérante – qui peut se faire sur deux ou trois jours – permet, en suivant le cours de la rivière, de rallier les villages de Rencurel à Saint-Nazaire-de-Royans, en passant par huit communes des départements de l’Isère et de la Drôme. Le tout à une altitude allant de 160 à 730 mètres. L’occasion de traverser de magnifiques paysages entre plaine et plateau de montagne, décors naturels de l’entrée du Vercors et des Gorges de la Bourne. Mais aussi de découvrir des villages typiques comme Choranche et sa grotte et de réaliser la place que l’eau joue depuis des milliers d’années et joue encore aujourd’hui. Cette randonnée offre des sentiers accessibles à tous entre Saint-Nazaire-en-Royan et Pont-en-Royans, tout en permettant aux randonneurs les plus chevronnés de découvrir, liés à son tracé, des centaines de kilomètres de sentiers balisés pour réaliser leur propre circuit. Notamment sur la partie plus engagée jusque Rencurel.
La Bourne est l’axe qui structure le Vercors. Elle prend sa source vers Lans-en-Vercors et court jusqu’à Saint-Nazaire-en-Royans. Au fil du temps, elle a sculpté le territoire et s’est imposée à l’Homme, qui a dû s’y adapter (aqueduc, passerelle himalayenne, maisons suspendues…) pour pouvoir profiter de ses vertus et de son environnement. Ce dernier peut aussi admirer, par exemple, et ceci dès la route, le paysage des gorges qu’elle a creusées, tout comme il peut y pêcher la truite fario à un de ses nombreux spots. Un paradis pour les amoureux de la nature qu’ils soient grimpeurs, marcheurs, cyclistes, pécheurs ou encore spéléologues.
Cette grotte, logée entre Pont-en-Royans et Villars de Lans, est une caverne de merveilles. Vous pourrez y déambuler au fil de deux rivières souterraines et y découvrir des stalactites fistuleuses, véritables pailles de calcite. Un spectacle unique en Europe.
Au cours de votre visite, vous pourrez aussi rencontrer des protées, ces petits animaux cavernicoles étonnants, avant de finir votre parcours dans l’immense salle de la Cathédrale pour un son et lumières d’exception.
La cité médiévale de Saint-Antoine-l’Abbaye
Classée parmi les plus beaux villages de France, la cité de Saint-Antoine-l’Abbaye est un des joyaux du patrimoine aurhalpin.
L’église abbatiale de Saint-Antoine-l’Abbaye
Construite du XIème au XVème siècle, l’abbatiale fut érigée sous l’impulsion des Antonins, des moines médecins. Leur ordre hospitalier rayonna pendant le Moyen-Age sur toute l’Europe autour des reliques d’Antoine l’Egyptien. Au fil des siècles, cette église a accueilli les pèlerins de tous les pays, qui venaient voir les reliques de Saint Antoine l’Egyptien pour bénéficier de son miraculeux pouvoir de guérison. A sa beauté architecturale s’ajoute la richesse de sa décoration intérieure avec de très belles peintures murales, mais aussi des boiseries et des reliquaires exceptionnels. Son orgue, qui date du XVIIème siècle et se dresse dans la nef, comprend 44 jeux. Classée monument historique en 1840, grâce à Prosper Mérimée, l’église abbatiale, tout comme son trésor, valent vraiment la visite.
Situé dans le Vercors, le bel espace naturel des Ecouges témoigne de la diversité des milieux forestiers des massifs préalpins. Mais il garde aussi la mémoire des Chartreux et des maquisards de la Seconde guerre mondiale (1). Le promeneur peut emprunter un sentier balisé aux points de vue vertigineux pour découvrir les hêtraies et érablaies qui peuplent sa pente, mais aussi torrent ou cascade, rares points d’eau de l’espace. Et, s’il a de la chance, observer des chamois, des marmottes ou encore des aigles royaux, seigneurs de ce site exceptionnel.
(1) Pendant la Seconde guerre mondiale, le maquis du Vercors fut une importante base de la Résistance française réfugiée dans le massif du Vercors, considéré comme une véritable forteresse naturelle.
Le couvent des Carmes
Le couvent des Carmes, fondé au XIVème siècle à Beauvoir-en-Royans, est un haut-lieu de l’histoire du Dauphiné à l’époque médiévale. Il permet de découvrir aujourd’hui l’histoire des Dauphins, seigneurs du Dauphiné, mais aussi l’étonnante collection de César Filhol, fondateur du musée Delphinal il y a plus d’un siècle. Le bâtiment actuel du Couvent, remanié au XVIIème siècle, accueille également une exposition permanente consacrée au peintre néerlandais Bob ten Hoope (1920-2014) qui a vécu dans le Royans.
La visite se poursuit à l’extérieur avec la découverte du jardin médiéval, tout fait de plantes et fleurs, et d’un verger conservatoire, riche de beaux arbres fruitiers.
Une visite entre nature – entre les contreforts du Vercors et une vue plongeante sur l’Isère – et culture. A ne pas manquer.
Inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2010, cette puissante création architecturale est d’une beauté éblouissante et singulière. Construite à partir du XIIIème siècle en brique issue de la terre du lit du Tarn, elle s’affiche rouge, ocre ou rose selon la lumière et signe l’identité de la ville. Si la visite de ses puissants piliers, le palais de la Berbie et la cathédrale Sainte-Cécile, s’impose, marcher dans ses quartiers médiévaux, le nez en l’air, est un voyage dans le temps inoubliable.
Le palais de la Berbie
L’architecture militaire de l’ancien palais des évêques d’Albi est assise sur un site naturellement fortifié en belvédère sur le Tarn. Au Moyen-âge, il symbolisait l’affirmation du pouvoir des évêques face aux consuls de la ville. Avec les siècles, le palais s’est transformé en résidence d’agrément. Si l’architecture de sa partie la plus ancienne ressemble à celle de la cathédrale, sa partie latérale est, elle, couverte d’un toit en ardoise comme celui des châteaux de la Loire, ajouté par les Amboise, évêques d’Albi de la fin du XVème au début du XVIème siècle. La Berbie est un des palais les mieux conservés de France ; il a été classé monument historique en 1862. Sa visite, tout en chapelle, plafonds peints, salles voûtées, pavements médiévaux, galeries Renaissance, grands salons est étroitement liée à la découverte du musée Toulouse-Lautrec (accessible par la cour intérieure) qu’il abrite, principalement consacré aux œuvres du peintre postimpressionniste Henri de Toulouse-Lautrec, né à Albi. Et en extérieur, son jardin à la française offre un très beau panorama sur le Tarn, sur la cathédrale et sur le quartier de la rive droite d’Albi.
La cathédrale Sainte-Cécile
Elle est le premier site visité dans la Cité épiscopale. Plus grande cathédrale de brique au monde et plus grande cathédrale peinte en Europe, construite en seulement 200 ans (1282-1493), elle a l’allure d’un château-fort qui dominerait les toits albigeois. Son style gothique méridional du XIIIème siècle et son allure militaire et austère, affirmés par ses mensurations, la distinguent de ses belles contemporaines d’Amiens, Chartres et Reims.
La Mappa Mundi
Elle est l’une des deux plus anciennes représentations connues du monde habité tel qu’il était perçu au VIIème siècle et un des 77 feuillets d’un manuscrit appartenant au chapitre de la cathédrale d’Albi. Conservée par les Albigeois depuis 1300 ans, cette carte du monde est un témoignage inestimable de l’Humanité, inscrit sur le registre « Mémoire du Monde » de l’UNESCO depuis 2015.
Peinte sur un parchemin épais en peau de chèvre ou de mouton, elle représente le monde sous forme de fer à cheval. Un monde centré autour de la Méditerranée (seul monde connu à cette époque) orienté à l’Est. Une cinquantaine de noms de villes, de régions, de fleuves, de mers et de vents y sont écrits en latin.
L’original de cette mappemonde médiévale, extrêmement fragile, est à l’abri de la lumière et de l’humidité, comme d’autres manuscrits médiévaux, dans les réserves de la Médiathèque Pierre Almaric, dans le quartier des Cordeliers. Mais, de juin à septembre, son fac similé est exposé sous vitrine dans la salle du Trésor de la cathédrale avec neuf panneaux d’information expliquant son histoire.
« Albi est la seule ville française, en dehors de Paris, comptant des inscriptions sur deux registres différents de l’UNESCO : Patrimoine mondial pour la Cité épiscopale et Mémoire du monde pour la Mappa Mundi. »
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Albigeois, l’autre nom des cathares
Dès la moitié du XIIème siècle, le nom « Albigeois » a servi à désigner les hérétiques du Languedoc, adeptes du catharisme. La croisade contre les Albigeois, prêchée par le pape Innocent III, durera vingt ans (1209-1229). Les hérétiques subirent alors une répression sanglante. Et la construction de la cathédrale Sainte-Cécile d’Albi fut un des symboles de la lutte de l’Eglise romaine contre leur foi dissidente.
Les Cathares se considéraient comme les seuls vrais disciples des apôtres et souhaitaient adopter le modèle de vie, les rites et les sacrements des premières communautés chrétiennes. Ils s’appuyaient principalement sur les enseignements du Nouveau Testament et leur unique prière était le Notre Père. Ils rejetaient aussi la guerre, l’Enfer, l’Incarnation et l’Ancien Testament. Ils considéraient que toutes les pratiques et sacrements instaurés par l’Eglise n’avaient aucune valeur. L’idéal cathare était fondé sur une vie ascétique. Ils n’attachaient pas d’importance aux églises bâties, car pour eux, la parole du Christ pouvait être enseignée partout où se réunissaient les fidèles.
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Le Musée Lapérouse
Autre natif célèbre d’Albi, Jean-François de Galaup, comte de Lapérouse, dit Lapérouse, naît en 1741. Il fait carrière brillante dans la Marine royale et, en 1785, le roi Louis XVI le choisit pour conduire la plus grande expédition maritime autour du monde jamais organisée.
Découvrez la vie d’aventures de cet explorateur d’exception parti découvrir le Pacifique Nord et Sud, mais aussi les côtes d’Extrême-Orient et de l’Australie, avec la Boussole et l’Astrolabe, navires qui comptaient à leur bord plus de 200 personnes dont moult savants de l’époque.
Ancienne province du centre de la France, le Bourbonnais comprend le département de l’Allier et le sud-ouest du département du Cher et a pour capitale historique la ville de Moulins. Cap sur l’Ouest du fief historique de la dynastie des Bourbons et quelques balades culturelles et vivifiantes.
De petites cités médiévales
Vue générale du village de Hérisson. Source : Wikipédia
Hérisson
Fondée au Vème siècle, Hérisson présente un réel intérêt historique et archéologique et propose à son visiteur harmonie et sérénité. Ancienne place forte des Bourbons, cette petite cité médiévale, sise sur les bords verts d’une boucle de l’Aumance, s’est développée au pied de son château construit entre le XIème et le XVème siècle sur un éperon rocheux. Elle s’habille en son cœur de portes fortifiées, de vieilles demeures des XVème, XVIème et XVIIème siècles et du clocher subsistant de la collégiale Saint-Sauveur. Un beau site pittoresque qui accueille nombre de manifestations artistiques dont, en juillet, le festival des Arts Mêlés.
Idée de balade
Partez du parking de l’Office du Tourisme, près de la Poste. Depuis les ruines rousses de la forteresse des ducs de Bourbon, découvrez la cité médiévale en passant devant la maison Mousse, le clocher-porche Saint-Sauveur, en parcourant la rue de l’Enfer jusqu’à la porte éponyme, puis terminez la balade par la rue de l’Abbé Aury et la porte fortifiée de Gateuil.
Tout près d’Hérisson, se trouve Châteloy, ancienne cité gallo-romaine, dominant le val d’Aumance. Cet oppidum très important, dont on retrouve les vestiges autour du hameau actuel, contrôlait la voie reliant Bourges-Clermont-Ferrand.
Cette autre cité médiévale, aujourd’hui restaurée, est classée parmi les plus beaux villages de France. Ses rues et ses ruelles pavées offrent au visiteur l’occasion de découvrir en flânant maisons anciennes, église du XIIe siècle au clocher tronqué, tour de l’horloge, halle aux piliers de bois, demeure à colombages et encorbellement du XIVe siècle, cour des Dames, puits fleuris ou encore portes fortifiées… Mais aussi un savoir-faire artistique et artisanal avec, par exemple, la confection de sa célèbre moutarde ! La visite du musée de Charroux et de son canton, fort de ses collections de vestiges gallo-romains et de ses archives, permet aux plus curieux d’explorer l’histoire locale.
Ses eaux chaudes sont réputées pour leurs bienfaits depuis l’Antiquité. Sans doute est-ce pour cela que Néris-les-Bains respire tant encore aujourd’hui histoire et bien-être. En s’y promenant, le visiteur traverse une fresque historique qui va de l’époque gallo-romaine à la Belle époque. Chaque lieu de la station témoigne, par son architecture, de son riche passé. Dans le parc des Chaudes, des piscines gallo-romaines et un oppidum gaulois. Plus loin, un amphithéâtre romain, une nécropole mérovingienne, une église romane. Et puis, un théâtre de style Napoléon III, un casino, un établissement thermal et une ancienne gare de la Belle époque. Les thermes de Néris-les-Bains sont spécialisés dans le traitement des affections rhumatismales, neurologiques et psychosomatiques. Leurs eaux ont la réputation d’être à la fois sédatives, antalgiques et relaxantes. Mais si vous ne cédez pas à la tentation de les prendre pour vous détendre, qu’importe, vous pourrez le faire tout simplement en marchant et en respirant, le nez en l’air et les yeux grand ouverts… Car, Néris-les-Bains compte aussi 17 hectares de parcs fleuris et arborés.
Sa cité médiévale est blottie contre l’imposante silhouette du château des ducs de Bourbon. En prenant ses ruelles étroites, vous découvrirez de magnifiques maisons à pan de bois et des hôtels particuliers comme autant de témoins des grandes heures médiévales de la ville. Mais aussi, en contrebas des fortifications, des monuments remarquables comme la maison des Douze apôtres, le passage du Doyennée et les églises Notre-Dame et Saint-Pierre. L’église Notre-Dame, construite au XVème siècle, abrite un Christ aux liens en pierre du XVème siècle et une statue de Notre-Dame de Montluçon du XVIIème siècle. L’église romane Saint-Pierre, érigée aux XIème et XIIème siècles, héberge quant à elle une splendide statue de Sainte Madelaine de la fin du XVème siècle.
Dominée par un château fort du XIIIème siècle, la route des gorges de Chouvigny, située dans les Combrailles, au cœur des gorges de la Sioule, entre Menat et Ebreuil, offre aux automobilistes, motards et cyclistes qui la sillonnent, une succession de beaux paysages, à la fois sauvages et verdoyants, ponctués de hautes falaises. Pour découvrir ce site naturel classé sous un angle différent, rien de tel qu’une descente de la Sioule en canoë-kayak, au départ du Pont de Menat ! Ouvert au public de mai à fin septembre, le château de Chouvigny, perché sur un éperon rocheux, offre depuis ses terrasses une superbe vue sur les gorges. Sa visite dévoile également d’autres attraits, comme le salon d’honneur, la salle d’armes, la tour du trésor ou encore la tour de guet.
Le château des ducs de Bourbon à Montluçon. Source : Wikipédia
Les sites des lacs de Nantua et de Sylans, tout comme celui du lac Genin, sont de véritables écrins naturels d’eau, de faune et de flore. Une richesse reconnue et protégée par le label ENS (Escales naturelles sensibles). Le département de l’Ain y veille en effet à préserver la biodiversité tout en les aménageant pour y accueillir leurs visiteurs dans les meilleures conditions.
Tous ces sites sont ouverts au public gratuitement. Vous pouvez vous y baigner dans une eau claire, y pêcher, faire de la voile et même de la plongée ou tout simplement marcher et visiter une nature généreuse. Les paysages à couper le souffle pourraient bien, mine de rien, vous transporter jusqu’en Scandinavie…
2. Les grottes du Cerdon
Une fois passé le lac de Nantua et avant d’arriver à l’Ain, l’eau a créé au fil des âges les grottes du Cerdon. A la Préhistoire, les hommes avaient choisi les cavités de ce site comme refuge. Un bel exemple de ce que la nature, une fois encore, offre à ceux qui prennent le temps de l’observer pour y trouver leur place. Des fouilles archéologiques ont mis au jour en 1914 leurs poteries, cendres, ossements d’animaux, silex taillés et même le crâne de l’un d’entre eux. Le site était, semble-t-il, déjà habité il y a 12 000 ans. Depuis cette époque reculée, situation dominante oblige, il n’a cessé de servir de poste d’observation aux hommes.
Ainsi, dès la plus haute Antiquité, la ligne des crêtes qui cerne la reculée de Cerdon a été défendue militairement. Pour preuve les nombreuses ruines et les documents qui attestent de l’importance de ces postes de défense au fil des siècles. Pour preuve aussi le grand nombre de légendes qui racontent le lieu. On prétendait ainsi dans la région que toutes ces défenses communiquaient par des passages souterrains, qu’un chemin caverneux descendait jusqu’à la vallée de Cerdon ou encore que le trésor de guerre des troupes savoyardes était enfoui dans une mystérieuse cachette, sous une des tours défensives. Peut-être…
Dans les années 1930, un fromager avait acheté la plus grande cavité naturelle de Saint-Julien pour y affiner son bleu de Gex. Intrigué par un vol de chauve-souris en haut de la voûte, il grimpa et découvrit une galerie supérieure à l’origine du réseau souterrain connu à ce jour sous le nom de Grottes du Cerdon. C’est ce que raconte à l’envi la légende…
Vous pouvez prendre un billet pour visiter les grottes (durée du parcours de 1 à 1H30), à 4 km du village de Cerdon, mais aussi le coupler avec un billet pour entrer au parc de loisirs préhistorique qui vous propose des activités pour les petits (à partir de 4 ans) et les grands. Pour partager en famille un peu de la vie des premiers hommes (faire du feu par percussion, de la poterie néolithique, de la peinture, etc.) ou encore entrer dans la peau de l’archéologue qui l’a mise au jour.
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04 74 37 36 79 | info@grotte-cerdon.com
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3. L’abbatiale Saint-Michel à Nantua
Elle est l’édifice roman le plus important du département de l’Ain. La « sœur aînée et fille de Cluny » invite son visiteur à la majesté et à la quiétude. Dès le linteau de sa porte, elle l’accueille par une phrase latine dont la traduction est : « De peur que le temps ne fasse oublier le passé, cette pierre rend hommage de ce qui s’est accompli. »
Forte d’une longue histoire qui court du VIIème au XIXème siècle, cette église affiche une architecture sobre, héritage de sa destination première d’abbatiale, mais offre aussi des prouesses comme la voûte de la chapelle Sainte Anne qui comporte un réseau d’arcatures moulurées dégagées du plafond et dessinant 32 triangles et 17 nœuds. Elle abrite aussi « Le martyre de Saint Sébastien », un magnifique tableau du peintre Eugène Delacroix et des orgues datant de 1845 du facteur Nicolas-Antoine Lété.
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4, rue du Cloître 01130 Nantua
04 74 75 02 84
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4. Izernore la gallo-romaine
Avant la conquête romaine de la Gaule, Isarnodurum était une petite bourgade située au sud du territoire séquane, peuple gaulois à la tête de la Franche-Comté actuelle. Les archéologues ont mis au jour et daté ses céramiques, ses fibules et sa monnaie des IIème et IIIème siècles avant Jésus-Christ.
Ils ont aussi montré que le site s’est développé jusqu’à devenir une bourgade rurale de taille et d’importance moyenne, ce que l’on appelait alors un vicus. Ils ont pu identifier les vestiges d’un temple sans doute dédié à Mars -les seuls encore élevés de cette époque- mais aussi reconnaître la trace d’autres constructions gallo-romaines comme, par exemple, des thermes, aujourd’hui invisibles.
Plusieurs auteurs ont tenté, jusqu’au début du XXème siècle, de prouver que celle que l’on appelle aujourd’hui Izernore était l’Alésia de la Guerre des Gaules. Il est vrai que ce vicus était animé par une belle activité artisanale et commerciale et que des cultures agricoles ont laissé des traces dans les hameaux de Bussy et de Pérignat. La villa découverte au début du XXème siècle à Pérignat, avec ses peintures murales réalisées selon des techniques importées de la péninsule italienne, et sa galerie à colonnes avec vue sur la vallée de l’Oignin, témoigne du haut niveau de vie de ses propriétaires de l’époque gallo-romaine.
Visitez le temple d’Izernore et son musée archéologique…
Moussa (Sami Bouajila) a toujours été un homme doux et gentil, un père et un employé dévoué. Divorcé, il s’est remarié avec une Marocaine qui ne répond plus à ses appels téléphoniques et qu’il est bien décidé à sortir de sa vie. Son frère Ryad (Roschdy Zem) est le présentateur vedette d’une émission de télévision à qui leur famille reproche son égocentrisme.
Un soir, sorti avec ses collègues, Moussa fait une chute et se cogne violemment la tête. Diagnostic : une grave commotion cérébrale. Sa vie bascule et sa personnalité change. Il critique sa sœur, se brouille avec sa fille et son fils, se fâche avec son autre frère Salah (Rachid Bouchared). Ses accès de colère et de parole libérée sèment la zizanie dans la famille. Mais entre Ryad et lui, le lien se renforce. Peu à peu, son état s’améliore. Et la famille se retrouve dans un nouvel équilibre.
Dans un film inspiré de ce qu’il a vécu après l’accident de son frère et écrit avec Maïwenn, Roschdy Zem interroge cette place que chacun d’entre nous se voit confier dans sa famille, peut prendre, accepte de prendre ou se contente de prendre. Et que la vie, au détour d’un drame quotidien, interroge en rappelant à tous et à chacun qu’elle est fragile, toujours, mais que, tant qu’elle est là, elle vaut la peine de bouger les limites d’hier. Un film juste, soutenu par une belle et vive distribution.
A l’affiche actuellement.
2. Une comédie humaine
Synopsis
Tony (Franck Dubosc), la cinquantaine, est chauffeur de bus scolaire en province. Renfermé, il vit seul après avoir abandonné femme et bébé vingt ans plus tôt. Un malaise cardiaque sans séquelles lui donne la force donner sens à sa vie en faisant face à son passé. Il décide de s’inscrire incognito au cours de danse latine que donne sa fille de 20 ans à Paris.
Un film de et avec Franck Dubosc qui donne à voir un peu plus encore du talent très humain qu’il cachait jusqu’alors trop souvent dans la peau de personnages de caricature. Jean-Pierre Darroussin en collègue fidèle est toujours aussi exceptionnel et la jeune Louna Espinosa, 22 ans seulement, est lumineuse. Une comédie à voir pour le plaisir, mais pas que.
Rudolf Höss, commandant d’Auschwitz, et sa femme Hedwig, tentent de construire une vie idéale pour leur famille dans une maison avec jardin et piscine, juxtaposée au camp de concentration et son horreur.
Avis de la rédaction
Adapté du roman éponyme de Martin Amis, le film se distingue par son approche unique du sujet de l’Holocauste et une réalisation audacieuse et très perturbante. Le spectateur est plongé dans la vie quotidienne des Höss, à l’extérieur des murs d’Auschwitz. Il ne voit jamais ce qui se passe dans le camp de concentration ; il ne peut que palper toute son horreur hors champ. Comme invité chez les Höss, dans leur intimité étouffante. La nuit, avec un de leurs enfants qui n’arrive pas à dormir, il peut ainsi voir, par la fenêtre, les cheminées du camp crachant leur fumée. Et la journée, du jardin ou de la cour de la maison, il entend des ordres proférés de l’autre côté du mur et des cris horribles… Le réalisateur Jonathan Glazer, en créant cette dichotomie entre réalité monstrueuse et normalité, réussit un tour de force magistral. Le choix des couleurs et des lumières souligne avec finesse le malaise ambiant. Sandra Hüller, déjà distinguée dans le film Anatomie d’une chute de Justine Triet, tient à merveille le rôle de l’épouse du « patron » d’Auschwitz et respire à elle toute seule le mal banal. Cette Mme Höss qui n’a de cesse de vouloir réussir sa vie de famille. Le film a été présenté en compétition officielle au Festival de Cannes en 2023, où il a remporté le Grand prix et le prix FIPRESCI.
Mathieu et Vincent sont amis depuis longtemps. Mathieu doit tout à Vincent, qui lui a sauvé la vie et l’a aidé à rebondir professionnellement. Depuis, ils travaillent et réussissent ensemble sur la Côte d’Azur avec à leurs côtés, leurs épouses respectives. Une vie sans nuage jusqu’au jour où Mathieu découvre que Vincent trompe sa femme. Et que la maîtresse de Vincent est retrouvée morte.
Avis de la rédaction
« Un coup de dés », réalisé par Yvan Attal -qui joue aussi le rôle de Mathieuest un thriller passionnant. Il maintient le spectateur dans une tension continue et lui offre une expérience cinématographique immersive et réfléchie, toute faite de rebondissements imprévus, incarnés par des acteurs très convaincants. Quant à la musique « hitchkockienne », elle ajoute une touche élégante à la mise en scène et à son image léchée. Même s’il ne parvient pas à égaler les maîtres de cinéma auxquels il rend hommage tout au long de son film, Yvan Attal réalisateur propose là un très bon film au scénario abouti et au jeu brillant d’un bout à l’autre de l’intrigue. A commencer par le sien.
Distribution : Guillaume Canet, Yvan Attal, Marie-José Croze, Maïwenn, Victor Belmondo
Iris, la quarantaine, est dentiste, mariée et mère de deux fi lles. Installée dans la vie, comme on dit, mais il lui manque un peu de piment. D’autant qu’Iris n’a plus de relations sexuelles avec son mari depuis maintenant quatre ans. Un soir de réunion parents-profs au lycée de sa fi lle aînée, elle croise une inconnue qui lui conseille de prendre un amant. Car quoi de plus simple aujourd’hui ? Il suffit de s’inscrire sur une application de rencontre… Iris se lance.
Avis de la rédaction
Après le très réussi Antoinette dans les Cévennes, Caroline Signal plonge la vitaminée Laure Calamy dans une cellule familiale bourgeoise et un Paris désespérément gris. Mais malgré tous les efforts de l’actrice, le spectateur s’ennuie avec elle. Même quand elle va voir ailleurs à grands coups d’aventures sans lendemain. Le scénario, poussif, peine à nous faire croire à la recette miracle de la pincée de sel, comprenez le « coup » d’un soir, qui redonnerait du goût au couple. Seule une scène enjouée de comédie musicale, dans un décor bétonné et sur le fameux tube It’s raining men des Weather girls, sauve la mise. A voir pour la formidable Laure Calamy, qui peut tout jouer.
Simon (Denis Podalydès), réalisateur dépressif, commence un fi lm sur une grève d’ouvriers qui ont voulu sauver leur usine. Mais, dès le premier jour, le tournage tourne au cauchemar. La pluie n’en fi nit pas de tomber, ses investisseurs se retirent du projet, son producteur disparaît dans la nature, sa directrice de production entre en mode survie et son acteur principal, à l’ego démesuré, sème la zizanie dans l’équipe de tournage… Sans compter que sa vie de couple est en plein naufrage. Heureusement que le jeune figurant, passionné de cinéma, qu’il a recruté à l’arrache, assure, caméra sur l’épaule, pour filmer le making of malgré la tempête…
Avis de la rédaction
Le réalisateur Cédric Kahn signe avec Making of une première comédie très réussie. Une comédie sociale qui rend hommage au 7ème art, tout en en faisant une critique intelligente. Parachuté dans les coulisses d’un tournage, au cœur d’une équipe/famille au bord de la crise de nerfs, le spectateur assiste à des scènes ubuesques et, s’il ne connaît pas le milieu du cinéma, découvre un secteur où création et rentabilité doivent désespérément cohabiter. « Le cinéma est un microcosme social comme un autre et les rapports de classe qui s’y exercent, y sont similaires », souligne Cédric Kahn. Un fi lm drôle, mais aussi politique, avec des acteurs formidables qui maitrisent leur rôle dans la vraie vie à la perfection.
Distribution : Denis Podalydès, Jonathan Cohen, Emmanuelle Bercot, Xavier Beauvois, Valérie Donzelli
Notre sélection de cet hiver : Anatomie d’une chute, doublement récompensé lors des Golden Globes. Voici un avant goût de ce film Made in France.
1. Le couple disséqué au laser
Synopsis
Sandra Voyter, Samuel Maleski et leur fils malvoyant Daniel, 11 ans, vivent à la montagne, non loin de Grenoble. Un jour, Samuel est retrouvé mort par Daniel, au pied de leur chalet.
Suicide ou homicide ? Une enquête est ouverte et Sandra est inculpée malgré le doute. Un an plus tard, Daniel assiste au procès de sa mère.
Comme l’a écrit la magistrate Valérie Dervieux, c’est « l’histoire d’un couple dont le délitement, analysé par une focale judiciaire, est comme magnifié par le seul « vrai » procès qui nous reste, celui des Assises. Ce n’est pas « Jusqu’à la garde »*, incroyable opus qui dissèque un mécanisme de violence conjugale jusqu’à l’irréparable acmé du presque féminicide, mais un récit qui débute par la mort suspecte du mari et s’achève par une décision qui laisse ouverts tous les (im)possibles. »
Palme d’Or au dernier Festival de Cannes, « Anatomie d’une chute », réalisé par Justine Triet, est un procès de l’entité Couple. A voir ABSOLUMENT !
*Film de Xavier Legrand (2017) avec Léa Drucker et Denis Ménochet.
En Bonus dans notre sélection hiver :
2. Le souffle de la passion
Synopsis
Une famille recomposée de quinquagénaires. Anne est une avocate brillante spécialisée dans le droit des mineurs victimes d’abus sexuels(!), Pierre, son mari, un chef d’entreprise contrarié par un contrôle fiscal. Ils ont adopté des jumelles d’origine asiatique. La routine et l’ennui se sont doucement installés dans leur confort bourgeois. Jusqu’au jour où Théo, 17 ans, le fils de Pierre, né d’un premier lit et qu’il avait perdu de vue, vient s’installer chez eux… Et qu’entre lui et Anne naît une folle passion sexuelle.
Qui eut cru que Catherine Breillat reviendrait dix ans après son film Abus de faiblesse ? Elle qui avait été victime d’un terrible AVC y racontait l’escroquerie qu’elle avait vécue avec Christophe Rocancourt. Et pourtant, avec L’été dernier, la réalisatrice de 74 ans signe sans aucun doute son plus bel ouvrage. Sans peur aucune de laisser sa caméra accompagner ce qui pourrait être vu comme sale. Le feu de la passion interdite qui dévore tout, la différence d’âge entre la femme mûre et le jeune adolescent, dont les deux corps brûlants de désir dégagent tant d’érotisme, n’en déplaise à l’âgisme ambiant… Avec une grande rigueur morale, elle filme avec précision la toxicité qu’exerce la femme sur son jeune amant et son mari.Et qui, pour garder la face s’enlise dans la manipulation et le mensonge. Dans ce quinzième long métrage de Catherine Breillat, tout ne se dit pas, mais tout s’entend et se voit. Cinéma oblige. Du souffle des ébats des deux amants à la lâcheté de ceux qui font avec leurs petits arrangements ordinaires, quitte à sacrifier la pureté de l’émotion vraie. Intense.
Blanche et Grégoire se rencontrent dans une fête en Normandie. Elle est professeure de français, lui travaille dans une banque. C’est le début d’un amour fou… Très vite, Blanche est enceinte et ils se marient. Dans la foulée, Grégoire raconte à Blanche qu’il est muté à Metz et ils déménagent en Lorraine. Jusqu’au jour où Blanche découvre que Grégoire lui a menti ; c’est lui qui a demandé sa mutation. Loin de sa mère et de sa sœur jumelle, elle est tombée dans un terrible piège, celui de l’emprise de son mari.
Adapté du livre d’Eric Reinhardt, le film homonyme L’amour et les forêts de Valérie Donzelli, marque un beau retour de la réalisatrice. En suivant au plus près son héroïne, elle montre ô combien le poison de sa relation toxique s’infiltre insidieusement dans sa vie ordinaire. Une belle maîtrise de la caméra soutenue par un scénario tout en épure narrative, co-écrit avec Audrey Diwan, qui fait prendre à une histoire intime une respiration haletante de film policier.
Virginie Efira, dans le rôle de Blanche et de sa jumelle, que l’on voit pourtant dans moult films chaque année, continue là, à alpaguer et étonner le spectateur. Avec une grande facilité d’apparence. L’actrice crève une nouvelle fois l’écran jusqu’à rendre son partenaire Melvil Poupaud, le mari pervers, presque lisse.
2. Maïwenn dans la cour des grands
Synopsis
Jeanne Bécu, dite aussi Jeanne Bécu de Cantigny ou Jeanne Gomard de Vaubernier, née roturière, cherche à s’élever socialement en utilisant ses charmes. Elle rencontre le comte Du Barry, libertin notoire, qui devient son amant, trouvant là occasion de s’enrichir. Avec l’aide du vieux duc de Richelieu, il présente Jeanne au roi Louis XV, qui décide d’en faire sa favorite.
Maïwenn a tout lu sur son héroine, dixit, et laissé les années infuser son envie de lui donner pleinement chair sur grand écran. Et cela se voit. Derrière et devant sa caméra pendant le tournage, mais aussi dans la promotion de son film, elle irradie de désir jamais assouvi d’exister. Et même si la facture de son oeuvre s’avère classique, le charme opère. Le spectateur plonge dans le faste de Versailles au XVIIIème siècle, éclairé aux chandelles, tout en perruques poudrées, dentelles, joyaux, jeux de pouvoir et convenances. Jusqu’à se laisser peu à peu lui aussi gagner par l’ennui de la cour d’alors. Jeanne avec ses cheveux lâchés, son sourire et son naturel, gène l’ordre établi comme Maïwenn, la déjà réalisatrice de « Mon roi » peut agacer le cinéma français et sa critique, mais elle sait ô combien en rire et en jouer pour ne pas trop en pleurer. Plus triste devient alors encore le sire incarné par un Johnny Depp, produit de l’industrie cinématographique, que les années et les excès ont dévoré.
A dix-sept ans, Nicholas semble en pleine dérive ; il n’est plus l’enfant solaire qui souriait tout le temps sur les photos. Que lui arrive-t-il ? Dépassée par la situation, sa mère, qui vient de découvrir qu’il ne va plus au lycée, accepte qu’il aille vivre chez son père. Remarié depuis peu et père d’un nouveau-né, ce dernier va tenter de dépasser l’incompréhension, la colère et l’impuissance dans l’espoir de retrouver son fils…
Distribution : Hugh Jackman, Laura Dern, Vanessa Kirby, Zen McGrath, Anthony Hopkins…
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Avis de la rédaction
Ce drame réalisé par Florian Zeller et adapté de sa pièce de théâtre du même nom nous plonge au cœur de la dépression qui touche un adolescent en prenant le point de vue de ses parents. Finalement, comme l’auteur s’était déjà intéressé dans The Father à l’Alzheimer d’un homme âgé du point de vue de sa fille. Une facture une fois encore classique aussi pour ce film au décor épuré et glacé d’un New York de gratte-ciels et d’appartements impersonnels. Les acteurs y sont impeccables, plus particulièrement Hugh Jackman, qui montre une fois encore tout son talent, même sans super pouvoirs. Mais le spectateur peut regretter que la dépression, qui est une maladie très complexe et multifactorielle, n’ait finalement très vite dans ce film pour seule cause que le divorce des parents de l’adolescent.
2. Partition intense
Synopsis
Lydia Tár est la cheffe avant-gardiste d’un grand orchestre symphonique berlinois. Celle que l’on appelle avec révérence Maestro est au sommet de son art et de sa carrière. Elle s’apprête à sortir son livre et prépare avec acharnement la 5ème de Mahler pour un concert enregistré très attendu. Jusqu’à ce que sa vie personnelle et professionnelle, en l’espace de seulement quelques semaines, se désagrège d’une façon très actuelle…
Un film de Todd Field, à la fois drame, thriller et musical, envoûtant. Une partition merveilleusement interprétée par l’impeccable Cate Blanchett qui, elle aussi, méritait l’Oscar de la meilleure actrice cette année. Plus de 2h30 de plongée dans l’univers de la musique classique et de son exigence impitoyable… qui joue avec vos émotions fortes.
« Ca commence parfois par une inquiétude ou un malaise. On se sent en décalage, on craint d’agir de manière déplacée. On a le sentiment de ne pas « être à sa place ». Mais qu’est-ce qu’être à sa place, dans sa famille, son couple, son travail ? Quels sont les espaces, réels ou symboliques, qui nous accueillent ou nous rejettent ? Faut-il tenter de conquérir les places qui nous sont interdites, à cause de notre genre, notre handicap, notre âge, notre origine ethnique ou sociale ? Peut-être faut-il transformer ces lieux de l’intérieur et s’y créer une place à soi ? »
La philosophe Claire Marin explore toutes les places que nous occupons -quotidiennement, volontairement ou contre notre gré, celles que nous avons perdues, celles que nous redoutons de perdre- et interroge ce qui est à la fois la formulation d’un désir personnel et un nouvel impératif social. Un ouvrage passionnant et sensible par l’auteure de Rupture(s) qui avait connu un très gros succès critique et public.
Etre à sa place, Editions de l’Observatoire, 2022
2. Au cœur de la vie d’un couple
Serge est brillant, entreprenant, narcissique. Marianne est sincère, ardente, déterminée au bonheur. Cherchez la femme raconte l’histoire de leur couple qui se forme, s’établit, procrée, s’épanouit, subit l’épreuve du temps et la déchirure de l’infidélité.
Nos destinées affectives sont-elles libres ? De quel poids pèsent les rêves et les échecs de la génération précédente ? Quelles forces obscures (le passé, l’enfance, l’origine sociale, l’argent, la carrière professionnelle, les convictions, les valeurs) sont à l’œuvre dans la vie conjugale et menace cet entrelacs fragile de deux solitudes engagées l’une vers l’autre ?
Alice Ferney sait observer et analyser l’intimité dans la société. Dans ce roman, elle trouve les mots justes pour dépeindre ses personnages et leurs différences face à la vie et sait nous mettre au cœur de leur bonheur comme de leur désarroi. Elle nous emmène dans le voyage d’un couple qui interroge tous les autres. Avec une seule question pour bagage : qu’est-ce que s’aimer veut dire ?
Eloge du risque, Anne Dufourmantelle, Rivages poche / Petite bibliothèque, 2011.
1. Un essai passionnant et sensible
« Risquer sa vie » est l’une des plus belles expressions de notre langue. Avec cette phrase à la première page de son essai, la philosophe et psychanalyste Anne Dufourmantelle écrivait tout de son engagement. Dans la vie et pour la vie. Pour le désir et l’inconnu qui en font le sel. Tout au long de son Elogedu risque, elle fait bien plutôt l’éloge de la prise de risque. La question qu’elle y pose : qu’est-ce que risquer sa vie, à savoir prendre le risque de vivre ?
Après avoir installé le décor de l’époque anxiogène dans laquelle nous vivons, celle-là même où la sécurité nous est donnée pour valeur principale, où l’exacerbation des peurs de toutes sortes et la servitude volontaire sont encouragées, elle entre dans les lieux où le risque se rencontre : la vie amoureuse, la séparation, la dépendance, mais aussi le langage, les biotechnologies ou encore la vie sociale. En fine observatrice, elle les explore dans de courts chapitres. Intenses et prompts à nous pousser à réfléchir. Tout au long de son ouvrage, elle n’a de cesse en fait de commenter la célèbre phrase du poète allemand Hölderlin : « Là où croit le péril, croît aussi ce qui sauve » pour affirmer que ce temps du risque – celui des résistants – serait le contraire miraculeux de la névrose. Prendre le risque d’aimer, de vivre afin de s’extirper de toute dépendance… Là serait pour nous l’essentiel de toute forme d’éthique.
Anne Dufourmantelle aura eu le courage de se saisir du poème d’Hölderlin jusque dans sa mort tragique le 21 juillet 2017 sur la plage de Pampelonne, près de Ramatuelle (Var), en portant secours au fils d’une de ses amies, âgé de dix ans, qui était en train de se noyer. Au cours de ce sauvetage, elle a succombé à un arrêt cardiaque. Elle avait 53 ans. Elle a laissé une oeuvre importante et essentielle.
Avec les fées, Sylvain Tesson, Equateurs littérature, 2024.
2. Capter le merveilleux du monde
L’écrivain Sylvain Tesson, désespérément voyageur, s’est donné trois mois pour relier en voilier – avec deux amis au parcours de vie aussi escarpé que le sien – les promontoires de Galice, Bretagne, Cornouailles, du pays de Galles, de l’île de Man, de l’Irlande et de l’Ecosse. L’occasion pour l’homme de vivre trois fois plus. A l’accostage pour marcher le long des falaises et dans la lande, toute colorée par la bruyère et le genêt, à bord du bateau pour écrire dans son carnet ce qu’il a vu, rencontré, observé, ressenti, et, en mer, à tenir bon son quart ou à partager les joies de l’amitié autour d’un verre et un cigare en regardant le ciel du pont ou en parlant littérature dans le carré…
Cette fois-ci, l’écrivain, qui n’a de cesse de se ressourcer de notre « monde de banquiers et de machines » en le quittant, est parti capter le merveilleux d’un autre monde, le vrai, tout fait de nature forte, celui qui échappe encore – un peu – à la modernité. « Le mot fée signifie autre chose. C’est une qualité du réel révélée par une disposition du regard. Il y a une façon d’attraper le monde et d’y déceler le miracle », écrit-il. A le lire à chacun de ses chapitres, qui sont autant d’escales d’un très beau voyage chez les Celtes, on se dit qu’il a bel et bien réussi à rencontrer les fées. Ce récit est un bijou de poésie à la fois joyeuse, jouissive et mélancolique.
Loin de Chandigarh, Tarun J Tejpal, Le Livre de Poche.
1. De la force du désir
L’Inde du Nord à la fin des années 1990. Depuis quinze ans, un journaliste et son envoûtante femme Fizz vivent une intense passion amoureuse entre Chandigarh et Delhi. Mais une étrange découverte dans leur vieille maison, accrochée aux contreforts de l’Himalaya, fait basculer leur couple. Au cœur de cette demeure délabrée, soixante-quatre épais carnets reliés de cuir livrent les secrets de Catherine, une intrépide aventurière américaine et précédente propriétaire de la maison. Subjugué par la lecture de ces carnets très intimes, le narrateur s’éloigne peu à peu de Fizz.
Le journal de Catherine l’entraîne à Chicago, Londres et Paris au tournant du XXème siècle, puis dans le tourbillon de l’histoire de l’Inde à la veille de son indépendance. Il lui apporte aussi les clefs des énigmes du désir et de l’amour. Salué il y a vingt ans en Inde et en Angleterre comme un incontestable événement littéraire dans le ciel de la fiction contemporaine, Loin de Chandigarh est avant tout le roman de l’Inde du début du XXIème siècle. Porté par une écriture forte, sans concession pour les nostalgies de l’orientalisme, et traversé par un érotisme puissant.
Un roman qui émerge comme une œuvre emblématique de Tarun J Tejpal, écrivain réputé poursa capacité à naviguer dans les complexités de l’âme humaine tout en dressant un portrait saisissant de l’Inde contemporaine. Tejpal excelle en effet dans la création d’un récit riche en nuances, où les descriptions luxuriantes de l’Inde se mêlent à des réflexions introspectives sur la condition humaine. Loin de Chandigarh s’inscrit dans la continuité de son œuvre en offrant une exploration profonde des thèmes de l’amour et de la rédemption, le tout ancré dans un paysage à la fois exotique et familier.
Sa prose est à la fois poétique et percutante, capable de capturer l’essence éphémère des émotions et des paysages. L’auteur sait naviguer dans les différentes couches de son histoire, tissant des liens entre le personnel et le politique, le spirituel et le matériel, dans une narration qui est à la fois complexe et captivante.
Un roman puissant et provocateur, qui interroge les dilemmes moraux de ses personnages, mais aussi ceux du lecteur. Profondément humain.
Une seconde vie, François Jullien, Le Livre de Poche.
2. Une seconde vie
Cet essai philosophique d’une centaine de pages se distingue par son exploration profonde et réfléchie sur la potentialité d’une renaissance personnelle au sein de l’existence déjà tracée. La prose poétique et accessible de François Jullien invite le lecteur à contempler la possibilité d’embrasser une nouvelle manière d’être, sans pour autant rejeter totalement le passé ou le présent. Sa thèse est à la fois provocante et réconfortante.
Il écrit : « une « seconde vie » est une vie qui procède de la vie passée, en continuité avec elle, en même temps qu’elle revient sur elle pour autant qu’elle s’en est démarquée. » Il suggère donc qu’une « seconde vie » s’ouvre à nous dans la continuité de la première, sans rupture totale, par une transition douce et réfléchie.
L’ouvrage se lit avec délectation. Il mêle des références philosophiques orientales et occidentales et offre ainsi au lecteur une perspective riche et nuancée sur la question du changement individuel. François Jullien ne lui impose pas une voie unique pour atteindre une seconde vie, mais lui propose plutôt une réflexion sur la manière dont les individus peuvent trouver leur propre chemin vers un renouveau, en s’appuyant sur leur expérience et leur sagesse acquises.
Le style du philosophe est élégant et ses arguments sont éclairés par des anecdotes personnelles et des exemples historiques qui rendent son texte vivant et pertinent. Même s’il peut apparaître abstrait parfois.
Un essai stimulant et essentiel pour tous ceux qui cherchent un nouveau souffle. A ne plus seulement être, mais à exister.
La phrase d’Héraclite au début du nouvel essai de Claire Marin, intitulé « Les débuts – Par où commencer ? », le définit si bien. Après ses deux grands succès critiques et publics « Ruptures » et « Être à sa place », la philosophe livre à ses lecteurs une belle réflexion sur les commencements, ceux qui, tout au long de notre vie, l’animent et/ ou la réaniment. Car, enfin, ce sont là des occasions de « renaître » qui ne sont pas réservées qu’à l’enfance et l’adolescence. Comme l’auteure en témoignait récemment dans une interview : « L’idée de combiner les débuts et les recommencements dans le titre était une façon de sortir de la représentation générale selon laquelle les débuts n’auraient lieu qu’au début chronologique de notre vie. L’enfance et l’adolescence seraient les périodes de l’euphorie des débuts, et après, il y aurait une diminution de cette vivacité. Je crois que c’est faux : il y a de vrais débuts tardifs et des recommencements totalement inattendus. »
Un livre qui questionne les débuts heureux et plus douloureux de la vie sans imposer des réponses toutes faites. Un livre qui accompagne le lecteur dans son questionnement, quel que soit le moment de début et/ou de recommencement qu’il a traversé ou traverse. Et qui peut, qui sait, lui permettre de retrouver de l’intensité, de l’ardeur aussi, pour réinventer sa vie et lui (re)donner goût d’existence.
Les débuts – Par où recommencer ?, autrement, 2023.
2. Procès d’un père lâche
Publié chez Grasset en 2021, « Enfant de salaud », le puissant roman de Sorj Chalendon se lit cette année en Livre de poche. Après « Profession du père », le récit romancé de son enfance avec un père mythomane et violent, le journaliste et écrivain raconte là, dans un roman encore plus autobiographique, comment un fils, devenu journaliste, découvre, en ayant accès à son dossier judiciaire, l’histoire vraie de son père mythomane, alors qu’il couvre en parallèle le procès Barbie pour Libération* en 1987. La vie de roman d’un génie du mensonge, perdu dans la guerre, entre résistance et collaboration, qui n’a jamais dit vrai à son fils et qui, jusqu’au bout, comme Barbie, face à ses victimes, restera dans le déni.
L’enfant de salaud, nommé ainsi par son grand-père, – « devenu journaliste pour comprendre, pour chercher la vérité. Pour qu’on arrête de me mentir », confiait l’auteur à France info à la sortie de son livre, – n’a eu de cesse de faire dire la vérité à ce père qui n’a pas su l’aimer. Sans succès. Le bourreau Barbie, lui, certes condamné à la perpétuité, s’est lâchement dérobé à son procès, échappant une fois de plus à ses victimes. Sorj Chalendon réussit là avec brio à questionner et son histoire et celle de la France de Vichy. Ses mots percutent, heurtent, oppressent. A lire sans se dérober.
*Sorj Chalendon s’est vu décerner le Prix Albert Londres pour son travail.
Enfant de salaud, Sorj Chalandon, Le Livre de poche, 2023
Deux ans après son Enfant de salaud, le journaliste et écrivain Sorj Chalendon revient dans la rentrée littéraire d’automne avec L’enragé. Ce conteur hors pair raconte le destin de Jules Bonneau, dit « La Teigne », un adolescent enfermé avec d’autres en 1932 dans le centre d’éducation surveillée de Belle-Ile-en-Mer. Le seul, qui, après une évasion collective le 27 août 1934, échappera à la traque des mâtons et de la police, aidés par les plus mesquins habitants de l’île. Il s’inspire là d’une histoire vraie et, fort du « je » dont il use, se glisse dans la peau du fugitif.
Sorj Chalendon imagine l’avant évasion et nous fait partager le quotidien des enfants -dont les plus jeunes n’ont que 12 ans- aux parcours de vie déjà incurables, qui se retrouvent encore une fois humiliés et exploités dans l’enceinte de leur bagne et dans les fermes avoisinantes.
Avec ce récit écrit au couteau, ses tripes posées sur la table d’écriture, l’écrivain nous plonge dans l’histoire de la France de l’entre-deux-guerres, marquée par la montée des fascismes et l’esprit de résistance des Bretons. Il le peuple de personnages hauts en couleurs, tout en courage d’hommes de mer et de femmes aguerries au gouvernail domestique qu’en lâcheté sourde de piliers de l’administration et d’anciens combattants de 14 perturbés devenus mâtons.
L’ancien grand reporter de Libération nous emmène aux portes de la Seconde guerre mondiale. Au cœur de la violence et de la haine. Et de la souffrance de son « enragé », qu’il connaît si bien et n’a de cesse de soulager au fil de ses livres. Celle d’un enfant battu, « obligé de desserrer les poings pour saisir les mains tendues». Fort.
L’enragé, Sorj Chalendon, Grasset, 2023.
2. Ô vieillesse, mon amie
Agnès Desarthe l’écrit, elle n’a jamais eu beaucoup de mémoire. Est-ce pour cela qu’elle arrive aussi bien à la convoquer, au fil des jours qui passent, de petits événements du quotidien et de son imagination, pour raconter ce qu’elle a vécu aux différents âges de son existence. La vie comme un rêve éveillé. Emerveillée.
Dans son dernier livre, Le château des rentiers, elle marche dans la rue du même nom, dans le XIIIème arrdt de Paris, et s’imagine à nouveau dans l’immeuble de ses grands-parents maternels. Là même où l’existence vieillissante s’incarnait dans la joie d’être encore vivants. Tsila et Boris Jampolski, la soixantaine venue, y avaient acheté sur plan un petit deux-pièces et avaient invité leurs amis à faire de même. Comme eux, ils étaient juifs bessarabiens et rescapés des camps de la mort.
La porte des appartements était toujours ouverte pour faciliter les allers et les venues des uns et des autres et ça sentait bon le gâteau aux noix de Tsila, partagé dans les rires. Ces « vieux »-là s’étaient connus jeunes et vigoureux sur les bords de la Mer noire et, malgré leur arthrose et leurs cheveux blancs, se voyaient toujours comme des filles et des garçons en maillots de bain. Agnès Desarthe les voient encore elle aussi, comme quand elle leur rendait visite après l’école. Ils lui parlent, ils s’asseoient à côté d’elle. Ces « sur-vivants » lui ont tant appris le goût des choses simples, de la solidarité, mais surtout de l’espoir.
De son écriture cousue de délicatesse et nourrie d’observation fine, Agnès Desarthe partage avec générosité au fil des pages son héritage humain. Il n’a pas de prix ; il porte tant de l’âme sensible de ceux qui le lui ont légué. Précieux comme l’ont été aussi les bijoux en toc que sa grand-mère portait avec dignité. Et, après avoir voyagé dans le temps passé, l’auteure laisse la place à la femme à la cinquantaine flamboyante. Aura-t-elle elle aussi le luxe de vivre sa vieillesse en compagnie d’amis ? Comme un privilège.
Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe, Éditions de l’Olivier, 2023.
Le couple de Gallois Raynor et Moth Winn perdent tout en 2016 : la banque saisit la maison qu’ils ont mis des années à retaper et qui assure leur subsistance en accueillant des voyageurs. Et, une mauvaise nouvelle arrivant rarement seule, Moth, 50 ans, apprend qu’il est atteint d’une maladie neurodégénérative incurable, qui, dixit le médecin, le tuera dans les prochaines années.
« -On pourrait simplement marcher.
C’était une idée ridicule, mais j’avais décidé de la proposer quand même.
-Marcher ?
-Oui, simplement marcher. »
Moth saisit l’idée de celle qu’il aime depuis 30 ans et, ensemble, toujours, ils décident de partir parcourir les 1013 kilomètres du South West Coast Path, le célèbre sentier côtier du Sud-Ouest de l’Angleterre. Sacs bon marché et tente d’occasion sur le dos, avec seulement 250 euros en poche, le couple découvre le camping sauvage, les longues journées de marche, malgré la pluie, le froid, le vent, la faim… Du Sommerset au Dorset, en passant par le Devon et les Cornouailles. Mais au fil des kilomètres, ils apprennent surtout à vivre au gré du soleil et des marées, s’imprègnent de la nature et, peu à peu, l’état de santé de Moth s’améliore…
Le chemin de sel est le récit qu’a écrit Raynor Winn après cette longue marche avec son mari vers l’espoir. Paru en Angleterre en 2018, il s’est vendu à un million et demi d’exemplaires. Enfin traduit en français, ce best-seller nous entraîne dans un merveilleux voyage vers la renaissance. Dans des paysages à couper le souffle.
« Le chemin de sel », Raynor Winn, traduit de l’anglais par Marc Amfreville, Stock, 2023.
2. Rebecca
Un manoir majestueux : Manderley. Un an après sa mort, le charme obscur de l’ancienne propriétaire, Rebecca de Winter, hante encore le domaine et ses habitants. La nouvelle épouse, jeune et timide, de Maxime de Winter, pourra-t-elle échapper à cette ombre, à son souvenir ?
Dans le peloton gagnant de tous les classements internationaux des 100 meilleurs romans policiers, le chef-d’œuvre de Daphné du Maurier, paru en 1938, est inspiré des œuvres de Charlotte Brontë et sans doute aussi de Jane Austen. Ce classique de la littérature anglaise a fasciné plus de trente millions de lecteurs à travers le monde. Et Alfred Hitchkock l’a immortalisé dans un film qui remporta l’Oscar en 1940.
Ses atmosphères nimbées de mystère et l’ambiguïté de ses personnages font de Rebecca un roman subtil indémodable qui hante votre esprit toute votre vie. A lire absolument !
Rebecca, Daphné du Maurier, Le Livre de poche (poche).
Ce mois de mai 2023 a été l’occasion pour Héraclide de devenir membre de la communauté des zèbres. Une finalité dont nous sommes fiers et qui visera à accroître l’impact positif pour le bien vieillir sur le long terme, en coconstruisant ensemble, un avenir meilleur à travers les territoires.
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